Depuis quelques mois, la coopération entre les deux pays s'accélère. Au grand dam de Paris. En effet depuis quelques mois, la coopération entre l'Algérie et les Etats-Unis s'accélère. Après avoir obtenu d'importants contrats dans les champs pétroliers du sud du pays, les Américains s'attaquent à présent à deux autres secteurs stratégiques : la défense et l'éducation nationale. Washington négocie, depuis quelques mois, l'installation d'une base militaire dans le sud du pays. Sans doute pour ne pas heurter la sensibilité des Algériens, les discussions sont menées dans le cadre de l'Otan, une organisation avec laquelle Alger entretient de bonnes relations. Placée sous l'autorité de l'armée algérienne, la future base militaire ne devrait, officiellement, servir qu'en cas de menace terroriste avérée dans la région du Maghreb ou du Sahel. Les Américains pensent que de nombreux chefs d'Al-Qaïda, qui ont fui l'Afghanistan, au lendemain de la chute des taliban, ont trouvé refuge dans la région du Sahel. Située en plein Sahara, cette vaste zone désertique que se partagent l'Algérie, le Mali et le Niger, échappe à tout contrôle des autorités de ces pays. Et comme le montre la prise d'otages des touristes européens dans la région de Tamanrasset, les terroristes islamistes commencent déjà à se montrer très actifs. Mais en proposant aux Algériens un tel accord, les Américains ont d'autres projets en tête : protéger leurs installations pétrolières en Afrique et surtout accroître leur influence dans un pays sensible, qu'ils considèrent comme le “talon d'Achille” de la France. Car, entre Paris et Washington, la guerre feutrée pour renforcer leur présence en Algérie fait rage depuis quelques mois maintenant. Une concurrence qui a redoublé à la faveur de la tension entre les deux pays sur le dossier irakien. “Les Américains veulent nous faire payer cher notre refus de participer à la guerre en Irak. Ils vont essayer, avec tous les moyens, de déstabiliser toutes nos zones d'influence stratégiques”, souligne un diplomate français, sous le couvert de l'anonymat. Et pour l'instant, les Américains ont une longueur d'avance sur les Français, grâce, notamment, à une excellente coopération militaire entre l'Otan et l'armée algérienne. Car, contrairement aux Français qui continuent à maintenir un embargo sur les ventes de certains types d'armes à l'Algérie, le Pentagone s'est souvent montré plus souple sur cette question sensible. Mais les Américains ne veulent surtout pas réduire leur coopération, avec les Algériens, aux seuls aspects militaires. Ils entendent s'impliquer davantage en Algérie. Washington veut, à présent, s'attaquer à l'éducation nationale, un secteur aussi sensible que la défense. Depuis maintenant plusieurs années, les gouvernements successifs n'ont pas réussi à mettre en place une véritable réforme du système éducatif, en pleine déconfiture. L'échec de la politique d'arabisation et de l'école fondamentale a conduit les autorités algériennes à réfléchir à la mise en place d'un système nouveau, avec, par exemple, l'introduction des langues étrangères dès l'école primaire. Et c'est sur ce point précis que Français et Américains se livrent une bataille feutrée. En échange d'une promesse d'aide financière importante à l'école algérienne, Washington veut, non seulement voir l'anglais prendre la place du français dans les écoles, mais aussi pouvoir accueillir les meilleurs bacheliers algériens dans ses universités pour les former. Une demande qui inquiète particulièrement les Français. Paris, qui a convaincu récemment Alger de se joindre au Sommet de la francophonie, ne veut pas voir l'anglais prendre la place du français dans les écoles du deuxième pays francophone au monde après la France. Le Quai d'Orsay et l'Elysée soupçonnent le président Bouteflika de se livrer à un double jeu diplomatique. Après avoir tenté, en vain, de mettre en concurrence Français et Américains dans le domaine, Abdelaziz Bouteflika va-t-il tenter de rééditer le même scénario dans le domaine de l'éducation, au risque de déstabiliser une école déjà trop fragile ? N. L.