Le ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique estime que la prime d'excellence ne touchera pas tous les enseignants et chercheurs universitaires. Pour les cinq autres primes, la commission mixte devra, très prochainement, se prononcer. Le document de quatorze pages, confectionné par le Syndicat national des enseignants universitaires (Sneu), une organisation affiliée à l'UGTA, est actuellement sur la table des négociations. La dernière réunion entre le partenaire social et le ministre en charge du secteur, Rachid Harraoubia, a été sanctionnée par une série de recommandations à même de permettre au département ministériel de concrétiser les promesses et de mettre en œuvre une dynamique afin de faire sortir l'université de son marasme. Partant du décret présidentiel de janvier 2008, portant “statut particulier de l'enseignant chercheur”, le régime indemnitaire, tel que défini dans ce document, dont Liberté s'est procuré une copie, “doit contribuer à améliorer l'efficacité globale et individuelle du système universitaire, par la reconnaissance des efforts fournis par les universitaires. Mais également reconnaître le mérite de cet enseignant chercheur qui s'est investi lors de sa vie professionnelle pour ce noble secteur, et ainsi lui permettre de bénéficier d'une retraite à la hauteur de ce mérite”. Le texte de base fort argumenté par les initiateurs fait ressortir que ledit régime devra toucher les enseignants chercheurs, les maîtres de conférences et professeurs des universités, qui ont la double mission d'assurer l'épanouissement de la recherche fondamentale et appliquée et de transmettre aux étudiants les connaissances qui en découlent, sans rétention, sans complaisance, partant du principe du mérite. Selon le document, l'évaluation et la quantification de ses primes “est opérée sur la base du traitement dénommé rémunération principale et comprenant le salaire de base de l'enseignant et l'IEP”. Selon le syndicat, qui se réfère aux standards internationaux, ces indemnités seront soumises à une actualisation suivant un échéancier qui sera déterminé par les deux parties en négociation. “En règle générale, estime-t-on, un poste de travail, au vu de l'évolution scientifique et technologique, est actualisé en moyenne tous les trois ans, et la rémunération y afférente se doit absolument de suivre”, et ce, afin d'éviter tout dysfonctionnement du système et autres situations conflictuelles. Mais les syndicalistes semblent se prémunir puisque le régime indemnitaire proposé à la tutelle est essentiellement basé sur le statut particulier de l'enseignement supérieur (articles 2, 4, 9, 22, 68, 73 et 74) et l'ordonnance de la Fonction publique (articles 3, 119, 121, 124 et 125) et qui veulent que ces indemnités seront exposées sous forme de primes fixes et d'autres variables. Et si la partie variable ne comprend qu'une seule prime, à savoir celle liée aux travaux de recherche en laboratoire, il est clair que le reste est assujetti au paramètres des primes variables, donc susceptibles d'être revues à tout moment une fois que le délai prescrit (3 ans) expire. Le document précisera, en ce sens, que “les primes de recherche sont considérées comme complément de salaire et répondent beaucoup plus à un sentiment social que scientifique dans l'organisation et la proposition de l'équipe de recherche. Les écarts entre grades sont insignifiants, d'où nous proposons de les revoir à la hausse. Cette partie variable ne bénéficiera qu'aux personnes agissant dans le cadre de leurs activités productives”. Qu'en est-il du reste des primes et quel en sera l'impact ? La partie fixe comprend le reste des primes. La première est liée à l'indemnité spécifique à l'enseignement supérieur (code ISES). Elle sera attribuée à tous les enseignants chercheurs en activité dans un établissement d'enseignement supérieur et évaluée à 60%. Un acquis important au vu des besoins de cette corporation en souffrance depuis des années. “Cette indemnité s'articulera autour de trois grands axes principaux”, partant du fait que le nouveau statut de la Fonction publique précise que l'enseignant universitaire se trouve être classé parmi “les hauts cadres de la nation”. Selon les rédacteurs du texte, cette population, qui ne représente par ailleurs que 1/1000 de la population globale algérienne, lui reconnaissant et conférant la valeur et le statut d'élite de la nation. “D'où il est tout à fait juste et légitime à ce que cette catégorie de fonctionnaires puisse, par sa spécificité, jouir de mesures que nous considérons absolument comme des mesures accompagnant la noble activité, soit celle ‘d'enseignant chercheur' du secteur de l'enseignement supérieur en Algérie”, explicite-t-on comme pour mettre des garde-fous à cette plate-forme de revendications. Ouverte de droit, mensuellement, et de plus, légitimée par les textes officiels, cette indemnité devra ainsi refléter deux éléments de référence, à savoir l'expérience pédagogique et scientifique et l'accomplissement de la fonction. Vient ensuite l'indemnité d'encadrement et de compensation (code IEC) évaluée à 20%. Cette prime découle de la nature même du rôle de l'universitaire, un rôle central. Elle devra, du coup, compenser les frais de communication et d'échange, de déplacement, frais de consultation (TICE) et qui engagerait l'enseignant dans des dépenses matériels (frais de tout type) et cela devrait lui permettre de bénéficier d'un effet compensatoire, tel que défini par l'article 119 du statut de la Fonction publique. L'inaccessible excellence, pomme de discorde ? La pomme de discorde demeure, en revanche, dans l'indemnité de performance et d'excellence (code IPE) et évaluée à 40 %. Et les rédacteurs du texte justifient devant la commission ministérielle cette prime. Mieux, ils tentent de défendre cette indemnité devant un ministre pas tout à fait chaud pour l'accorder à toute la famille universitaire. “Par sa nature, un enseignant chercheur du supérieur, se doit d'être constamment productif, performant et excellent. Pourquoi ? Mais le cours, sa démarche pédagogique, son enrichissement, son actualisation, de même que l'encadrement des différents mémoires de licence, master, doctorat, y compris le séminaire de méthodologie du travail universitaire en première année, à celui de la méthodologie de la recherche de la 2e et 3e années de licence, de la 1re et 2e années de master et de celle du doctorat, exigent à ce que l'enseignant s'inscrive dans la performance, mais et surtout de l'excellence, et ce, dans la détention et le transfert des connaissances et dans la diversité des sujets et des thèmes de recherche.” Mais qui excelle et qui pourrait exceller pour pouvoir toucher une prime arrêtée à 30% ? Les syndicalistes trouvent la réponse dans l'esprit même du dernier discours du chef de l'Etat, Abdelaziz Bouteflika, à Sétif devant la famille universitaire. Ils estiment que l'excellence appartiendrait à “celui qui serait d'un degré supérieur dans la perfection, tant scientifique, technologique, qu'académique. Qui innove, crée, développe des procédés nouveaux, s'inscrivant non seulement dans une recherche développement, mais et surtout fondamentale. Cette indemnité serait valable pour l'ensemble des trois corps de l'enseignement supérieur, mais à condition de répondre aux critères de mesure de l'excellence”. Et là, les enseignants énumèrent les critères de mesure de l'excellence, à savoir la perfection (au niveau procédés, outils, démarche pédagogique de résolution, la création et l'innovation au point d'influer non seulement sur l'environnement, mais surtout sur celui du socioéconomique, socioculturel, artistique, technologique, etc. Mais les syndicalistes reconnaissent, toutefois, qu'“il faudrait être prudent au plan de l'évaluation de l'excellence par la mise en place d'une commission scientifique intègre et spécifique qui évaluerait cela et déterminerait qui en bénéficiera, et ce, avec la participation de notre syndicat Sneu-UGTA”. Une prime au nom du nouvel ordre universitaire Enfin, note-t-on, le document conclut par l'indemnité de recherche et de production pédagogique (code IRPP) et évaluée à 30%. Celle-ci s'inspire de trois paramètres majeurs, dont l'accompagnement, la production pédagogique et la performante recherche permanente. Les syndicalistes du Sneu relèvent à ce propos que concernant le transfert de connaissances, l'enseignant chercheur assume un rôle d'accompagnateur auprès de l'étudiant, quant à l'acquisition de connaissances. D'où celui-ci assume non seulement l'accompagnement, mais également l'encadrement et le suivi pédagogique, et scientifique. Justifiant cette indemnité au nom du nouvel ordre universitaire, les rédacteurs du document apportent des réponses à même de convaincre leurs vis-à-vis afin de négocier ce qui semblerait être le facteur prépondérant pour provoquer un véritable déclic. Du coup, ils estiment que cette prime permettra aux universitaires de “faire face à l'évolution scientifique, au flux d'étudiants et aux nouvelles filières pouvant être aménagées dans le profil d'enseignement”. Aux yeux des syndicalistes, mais aussi des représentants du secteur, l'enseignant chercheur nécessite un travail d'investigation, de réflexion et d'analyse, de projeter ces analyses en relation aux développements scientifiques, technologiques, socioéconomiques et autres, et exige à ce que l'enseignant chercheur puisse être en permanence en adéquation avec les développements. L'obligation de résultats étant mise en avant, les rédacteurs du document insistent sur la productivité scientifique et pédagogique et exigent des enseignants des approches et démarches pédagogiques et des réflexions, analyses en tenant compte des innovations scientifiques et de facto, pédagogiques. “Tous les enseignants chercheurs, et au vu de leur statut particulier, s'investissent et se doivent de s'investir dans cette démarche, afin d'influer positivement sur la qualité scientifique de l'enseignement supérieur et par là, sur la formation qualitative de l'étudiant algérien. Toute cette philosophie et cette projection tiennent compte de ce nouvel ordre économique et scientifique”, concluent-ils.