Des appartements de grand standing et de somptueuses villas ont été détournés au profit de hauts responsables. Sur plus d'un millier de résidences luxueuses relevant des biens immobiliers du ministère des Affaires étrangères, il n'en reste, à présent, qu'un nombre réduit. Pour cause, des hauts responsables, qui se sont succédé à la tête des ministères et des institutions de la République, les ont accaparées, voire détournées au dinar symbolique. Des exemples édifiants dans ce sens sont légion, selon notre confrère El Khabar. En effet, le quotidien arabophone a fait, dans son édition d'hier, des révélations, pour le moins fracassantes, sur le détournement et la confiscation des villas somptueuses et des appartements de grand standing situés dans les quartiers les plus huppés de la capitale. Il s'agit des demeures occupées auparavant par des ambassadeurs et des consuls étrangers, mises à leur disposition par le ministère des AE à titre de résidences personnelles ou de sièges abritant les représentations diplomatiques étrangères à Alger. Au lendemain de l'Indépendance, le pouvoir politique proposait des villas et autres résidences abandonnées par les Français aux pays amis et frères, pour les encourager à ouvrir des représentations diplomatiques en Algérie. Cependant, cette générosité vis-à-vis des étrangers a commencé à cesser après l'entrée en vigueur du principe de réciprocité. C'est ainsi que la “rafle” des propriétés du ministère des Affaires étrangères a été érigée en règle générale. C'était du temps où M. Abdelaziz Bouteflika était le premier responsable de la diplomatie. L'ex-ministre des AE s'est adonné impunément au “partage” des villas et autres palais situés sur les hauteurs d'Alger entre les anciens membres du Conseil de la Révolution et autres hauts responsables de l'Etat à l'époque. Ces attributions ont été accordées, incontestablement, d'une manière confuse et anarchique et ce, en l'absence de textes de loi régissant ces biens. Cela faisant, cette razzia a incontestablement atteint son pic dans les années 1980, durant le règne de Chadli Bendjedid. En 1982, les hautes autorités du pays ont pondu à cet effet la loi relative à la cession des biens de l'Etat. Le passage de Ahmed Taleb El-Ibrahimi à la tête du département des Affaires étrangères a été marqué de façon indélébile par les ventes massives des biens immobiliers de son ministère à bas prix. Notre confrère, citant des anciens diplomates, révèle que Ahmed Taleb El-Ibrahimi a distribué, durant son règne, plus de 50 résidences somptueuses, situées à Didouche-Mourad, El-Biar, boulevard Mohamed V et Hydra. Les bénéficiaires étaient des cadres du ministère et des personnes étrangères à son département. Le journal cite une longue liste d'attributaires. Il évoque, pêle-mêle, Larbi Belkheïr, directeur de cabinet à la présidence, le secrétaire général des AE, Ben Ghezel, Salah Ben Kobi, conseiller au Conseil de la nation, Antar Ben Daoud, actuel ambassadeur d'Algérie au Mali, Ramdhane Lamamra, M. Harbi, ancien ministre de la Coopération, Cherif Rahmani, Ahmed Attaf, ancien ministre et ambassadeur à Londres. Ce dernier a bénéficié d'un appartement qu'il aurait revendu à 1,5 milliard de centimes. Taleb a également fait profiter les proches de Chadli Bendjedid dont le gendre, Lahouel, ancien wali de Tipasa, ainsi que le général Noureddine Ben Kortbi, qui a, pour sa part, revendu sa villa à plus de 13 milliards de centimes. Signalons au passage que Hocine Aït Ahmed a aussi bénéficié d'une villa située au Chemin des Glycines. Le bénéficiaire qui sort du lot et qui a accaparé, à des prix insignifiants, le plus de biens du ministère des Affaires étrangères est incontestablement M. Abdelaziz Bouteflika. Le président de la République s'est approprié pas moins de huit résidences. Il a acquis une villa à Sidi Fredj, un étage de deux appartements, ainsi qu'une autre villa à l'avenue Bachir-El-Ibrahimi. Le chef de l'Etat a fait également profité sa petite sœur d'un grand appartement à El-Mouradia. Le premier magistrat du pays a également acheté une autre villa, en 1991, d'une superficie de 9 000 m2, à… 20 DA le mètre carré ! La valeur de cette demeure est estimée à présent à plus de 50 milliards de centimes. Le président de la République ne s'est pas contenté uniquement de l'acquisition de biens de l'Etat en Algérie. Citant des sources concordantes, notre confrère a divulgué que M. Abdelaziz Bouteflika dispose de biens immobiliers à l'étranger, un immeuble, un ranch et des puits de pétrole à Abou Dhabï. Auxquels faut-il ajouter un appartement luxueux à Paris, acheté au nom de son frère Saïd Bouteflika. L'actuel Chef du gouvernement a eu sa part de ces biens bradés au dinar symbolique. M. Ahmed Ouyahia a bénéficié de trois demeures, la première à Hydra, la deuxième à Kouba et la troisième au Club-des-Pins. À cette liste s'ajoute les ministres qui se sont succédé à la tête du département des Affaires étrangères. Les Dembri, Attaf, ainsi que le général Betchine, la chanteuse Fella Ababsa, Noureddine Morsli… ont eu le privilège d'accaparer des villas à bas prix. Le seul haut responsable qui aurait refusé de s'approprier ces villas somptueuses proposées par M. Ahmed Ouyahia est l'ancien chef de l'Etat, M. Liamine Zeroual. Au lendemain de l'investiture de Bouteflika à la présidence, Zeroual a remis les clés de la demeure qu'il occupait durant l'exercice de ses fonctions, située à l'avenue Bachir-El-Ibrahimi, à proximité de l'ambassade des USA. Cette villa fait l'objet de procédures judiciaires pour être cédée à la mère de M. Abdelaziz Bouteflika, qui l'occupe actuellement. R. H. Panique au sommet de l'Etat Sollicités par nos soins pour avoir d'éventuelles précisions par rapport aux révélations faites par notre confrère El Khabar, les services de la présidence de la République et du Chef du gouvernement se sont dérobés à nos questions. Une source de la présidence nous a néanmoins confié qu'il est nécessaire de se rapprocher du département ministériel de Abdelaziz Belkhadem. La source a ajouté qu'elle n'est pas habilitée à s'exprimer sur un sujet qui relève directement du ministère des Affaires étrangères. Au niveau des services du Chef du gouvernement, notre interlocuteur, chargé des relations avec la presse, s'est dérobé à sa manière, puisque il a promis de nous fournir une réponse, mais en vain. En revanche, une source autorisée au ministère des Affaires étrangères, après insistance, nous a précisé tout de même que M. Abdelaziz Belkhadem a présidé, durant l'exercice de ses fonctions au département des Affaires étrangères, deux fois la commission des patrimoines du ministère. Ces deux réunions se sont soldées par l'attribution de deux studios (une pièce cuisine) à deux fonctionnaires du secteur. Notre source a précisé également que ladite commission ne siégera ni en septembre ni en octobre, tel que rapporté par notre confrère El Khabar. Concernant les biens déjà affectés, notre interlocuteur nous a recommandé de prendre attache avec la direction des domaines au niveau du ministère des Affaires étrangères. Cette déclaration sous-entend tout bonnement que des villas et des appartements ont été cédés aux responsables de la République. R. H. Document Bouteflika : Ce qu'il possédait officiellement Déclaration de patrimoine de M. Abdelaziz Bouteflika, président de la République, faite en application des articles 2, 3, 7 et 15 de l'ordonnance n°97-04 du 2 Ramadhan 1417 correspondant au 11 janvier 1997, relative à la déclaration de patrimoine. Je, soussigné, Abdelaziz Bouteflika Né le : 2 mars 1937 à Oujda Fonction ou mandat : Président de la République Demeurant à : Alger Déclare sur l'honneur que mon patrimoine et celui de mes enfants mineurs est composé des éléments ci-après à la date de la présente La fortune de Ouyahia En date du jeudi 18 janvier 1996, El Moudjahid publiait la déclaration de fortune du gouvernement de Ahmed Ouyahia. Voici le texte le concernant : “M. Ahmed Ouyahia, Chef du gouvernement : un appartement à Alger acquis dans le cadre des cessions des biens de l'Etat ; un véhicule de tourisme année 1990.”