Le montant global des devises transférées illégalement par des sociétés syriennes, activant sur le territoire national dans le domaine du textile, est estimé à plus de 18 millions d'euros et 20 millions de dollars. Plus de 11 cadres de douane au port d'Alger seront auditionnés très prochainement par le magistrat instructeur de l'affaire au tribunal de Chéraga à Alger. L'affaire, traitée par la section de recherches du groupement de la gendarmerie de la wilaya d'Alger, a duré plus de deux ans. Les faits remontent à l'année 2004, selon une source judiciaire proche du dossier. Des opérateurs syriens avaient bénéficié de décisions d'investissement dans le domaine textile par l'Agence nationale de promotion d'investissement (Andi). Ils ont bénéficié aussi des avantages fiscaux. Ce qui leur permettait d'importer des machines de textile avec des sommes importantes qui atteignaient souvent la bagatelle de 1 million de dollars, selon les déclarations faites aux services de la douane. L'enquête a dévoilé que ces investisseurs importaient des machines et des équipements de leurs propres sociétés basées en Syrie et qu'ils étaient eux-mêmes “les fournisseurs”. Ces machines déclarées neuves étaient en réalité vieilles et vétustes, mais retapées. Ces pseudos investisseurs syriens se servaient de garages loués avec des noms fictifs. On compte 11 sociétés écran qui leur servaient pour le transfert de capitaux de l'Algérie vers leur pays. Un haut cadre de la douane nous a expliqué que le service contentieux de la douane a relevé les contraventions et une requête a été adressée à la direction demandant la désignation d'un expert agréé pour déterminer la valeur réelle des machines. Et c'est à partir de là que le pot aux roses a été découvert. Le rapport de l'expertise a démontré que la valeur des machines importées a été estimée à moins de 150% de leur valeur déclarée. “C'est du métaux ferreux”, relève le rapport. Des machines ont été déclarées à 800 000 dollars alors que leur vraie valeur ne dépasse pas les 4 000 dollars. Toujours, selon le rapport de l'expertise, “la facture d'importation des machines a été gonflée pour pouvoir transférer à l'étranger le différentiel entre le prix déclaré et le prix réel en devises de la machine importée”, concluent les enquêteurs. 11 cadres de la douane au port d'Alger, parmi eux des inspecteurs et agents de contrôle, sont cités dans cette affaire et seront très bientôt entendus par le magistrat instructeur, alors qu'ils ont été déjà entendus par les enquêteurs de la gendarmerie. Il est à souligner que le dossier de l'enquête a été transféré du tribunal d'El-Harrach vers le tribunal de Chéraga. Reste à situer la responsabilité des services des banques qui ont procédé au transfert des devises sans la copie jaune délivrée généralement par les services des douanes. “C'est une pièce de conformité nécessaire pour tout transfert de devises”, nous explique-t-on. Récemment, la Banque d'Algérie a durci les conditions de transfert des devises pour mieux contrôler les opérations. Les investisseurs désirant transférer des devises devront désormais fournir les attestations fiscales de leurs prestataires et fournisseurs à l'étranger. Cette affaire n'est pas la première du genre. Plusieurs pays de la Zone arabe de libre-échange sont à l'origine de ce genre de malversations en utilisant leurs prétendues activités industrielles en Algérie pour détourner de grosses sommes en devises.