Alors que depuis plusieurs mois des experts nationaux et étrangers estiment que l'Algérie se doit de revoir sa stratégie énergétique, notamment dans le domaine gazier, compte tenu du contexte de crise économique, mais surtout du développement du gaz non conventionnel aux EU, le ministre de l'Energie et des Mines ne semble pas de cet avis. Intervenant sur la question, lors de son point de presse tenu à Oran ce samedi, en marge des préparatifs liés à la 16e conférence du gaz naturel liquéfié et du 10e Forum des pays exportateurs de gaz du 18 au 21 avril, Chakib Khelil dira : “Nous maintenons nos objectifs et nos investissements. Nous avons des engagements à long terme et malgré l'impact des marchés spots, nous ne sommes pas trop affectés.” Une déclaration qui sonne presque comme une fin de non-recevoir à ceux qui, justement, aimeraient que cette question fasse l'objet d'un grand débat, en dehors du cercle du ministère de l'Energie. Il faut dire que la stratégie et la politique gazière de l'Algérie sont primordiales pour l'avenir car cela déterminera les entrées en devises du pays. L'objectif de produire 85 milliards de m3 de gaz à l'horizon 2014 a nécessité, et nécessitera encore, des investissements très lourds fixés à quelque 65 milliards de dollars pour ne citer que les projets de GNL de Skikda, Arzew avec le GL3Z, etc. Ajouter à cela le développement des capacités de transport d'hydrocarbures par canalisation dont les investissements sur la période 2000 à 2009 ont déjà atteint 7,2 milliards de dollars. Et de se poser la question dans la foulée des coûts de production et de l'amortissement de ces coûts dans le contexte de baisse des prix du gaz et de redéfinition totale du rôle des acteurs mondiaux sur les marchés gaziers. Mais le ministre de l'Energie et des Mines, qui a déjà dû revoir certaines de ses positions sur notamment les perspectives du marché américain qui s'évapore du fait du développement dans ce pays du gaz non conventionnel, est depuis peu obligé de revenir également sur sa position de l'opportunité d'une OPEP du gaz. L'ouverture le 18 avril du LNG 16, et surtout la réunion du 10e Forum des pays exportateurs de gaz qui aura lieu le 19 avril, intervient donc à bon escient pour mettre en place les jalons d'une nouvelle stratégie nationale et régionale. Sur ce point, le ministère reconnaît qu'Oran, qui accueillera ces deux événements, se devra justement de sortir avec une décision historique, et dans son communiqué Chakib Khelil d'en rappeler les raisons. Si pour le LNG 16, les quelque 24 000 participants attendus pour l'heure débattront à travers des ateliers et conférences de l'évolution du marché du GNL, le développement technologique et les ressources non conventionnelles, les projets GNL, l'évolution des coûts d'investissements, etc. avec comme seul objectif un cadre de concertation pour une meilleure visibilité du secteur. Ce qui est attendu du Forum est tout autre. En effet, ce 10e Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG), qui regroupera à Oran les ministres des 11 pays membres (l'Algérie qui en assure la présidence, la Bolivie, l'Egypte, la Guinée équatoriale, l'Iran, la Libye, le Nigeria, le Qatar, la Russie, le Venezuela et Trinité&Tobago), ainsi que 3 pays observateurs qui sont la Norvège, le Kazakhstan et les Pays-Bas, devront se prononcer sur les occlusions et les recommandations d'une étude confiée à l'Algérie. Etude qui aura à évaluer la situation de l'offre et de la demande de gaz naturel sur les principaux marchés de consommation et qui déterminera dès lors “une stratégie pour développer une véritable coordination entre les pays membres afin d'anticiper les réactions des marchés gaziers”. Ce qui se fait en somme au sein de l'OPEP. À noter que le FPEG regroupe aujourd'hui les pays qui contrôlent 73% des réserves mondiales de gaz, mais seulement 42% pour ce qui est de la production. Présentée par le passé comme un pays pionnier dans l'industrie du GNL et en tant qu'acteur incontournable, l'Algérie pourra-t-elle par l'intermédiaire de son ministre, plus que fragilisé, rester le pays à même d'influer sur les stratégies à venir dans le FPEG. C'est ce double enjeu qui va se jouer ce 19 avril à Oran.