L'opinion publique est en droit de connaître les tenants et les aboutissants d'un scandale qui n'a pas fini de livrer ses secrets. Voici donc quelques éléments d'information, parmi les plus visibles, qui méritent d'être relatés. Liquidation politique La mesure de retrait d'agrément, décidée par le président de la République comme mesure conservatoire et exécutée par la commission bancaire de la Banque d'Algérie, a mis fin à la mission de l'administrateur provisoire moins de trois mois après sa désignation, c'est-à-dire très en deçà de la norme admise pour la période d'observation et de redressement qu'autorise la loi. Pour rappel, l'Union Bank a été sous administration provisoire pendant 11 mois et l'AIB l'est encore depuis plus d'une année. La dimension et la complexité d'El Khalifa Bank auguraient d'une action de contrôle et d'assainissement de plusieurs années. Les révélations de A. Benachenhou ont mis en exergue l'intervention du président de la République devant l'ampleur des dégâts occasionnés par le laxisme pour ne pas dire la complicité de la Banque d'Algérie et des autorités de contrôle. C'est ce qui explique que dans un document de travail confidentiel, “le liquidateur” recommande d'opérer toutes démarches visant à faire prononcer la liquidation judiciaire de la banque incriminée, parallèlement à l'évaluation de ses actifs : - faire prononcer, par voie judiciaire et après consultation juridique, la dissolution de la société El Khalifa Bank ; - dépôt au greffe du tribunal, au registre du commerce et au bulletin d'annonces légales ; - clôture des comptes de disponibilités ; - ouverture de nouveaux comptes de disponibilités dinars et devises au nom de la liquidation. Les errements de la Banque d'Algérie Dans un rapport établi en avril 2003, la commission bancaire reconnaît qu'elle “a été quelque peu handicapée dans l'exercice de sa mission de supervision du fait de l'absence d'arrêté et d'adoption de comptes annuels des exercices 1999, 2000 et 2001, par les organes sociaux de la banque (conseil d'administration et assemblée générale) ainsi que des rapports de certification des commissaires aux comptes”. Ce n'est qu'en octobre 2001 que les hauts responsables de la Banque d'Algérie ont fait part “de leurs plus vives préoccupations quant au strict respect... des règles de la profession”. À cette occasion, ils ont signalé les dangereux dépassements en matière de ratios, de division des risques et de solvabilité. De même qu'ils ont fait remarquer au premier responsable de la Banque le gonflement anormal du poste divers à l'actif du bilan, élément qui pouvait occulter la politique réelle de crédits engagée. (...) La Banque d'Algérie a de nouveau failli à ses devoirs en choisissant l'administrateur provisoire parmi les cadres dirigeants d'une banque concurrente, ce qui est une grave entorse à l'éthique, mais aussi à la loi. En effet, le code du commerce prohibe la présence dans les conseils de direction des sociétés commerciales de personnes ayant des intérêts dans des sociétés concurrentes. Et pour cause, M. Djellab, puisque c'est de lui qu'il s'agit, a tout fait pour liquider non seulement El Khalifa Bank, mais aussi tout le groupe Khalifa. Pour mémoire : - Il a refusé les propositions du groupe Monceau Finances qui apportait 350 millions de dollars (en deux tranches) et s'apprêtait à déclencher un audit par le biais d'un grand cabinet international en vue de payer la dette de Khalifa Airways. Il faut aussi rappeler qu'après le refus de M. Djellab, le cabinet du ministre des Finances en place avait accepté le principe d'une rencontre qui n'a finalement jamais eu lieu. - Il a ordonné des transferts de fonds de 600 millions de DA pendant plusieurs jours. La commission bancaire a failli à sa mission de surveiller le fonctionnement du système bancaire afin de préserver les intérêts des déposants, de sécuriser les usagers, d'éviter tout danger systématique et de veiller au renom de la place par la production de situations financières fidèles. Elle a même fermé les yeux sur le recrutement, au sein du staff de la banque El Khalifa, de cadres qui, quelques mois auparavant, étaient en mission de contrôle auprès de ladite banque. La solution est politique La décision annoncée par le ministre des Finances d'honorer tous les engagements pris via la banque El Khalifa, vis-à-vis des opérateurs étrangers, hors processus de liquidation, est politique et vise à ne pas aggraver le risque Algérie. La décision de rendre leurs avoirs aux organismes sociaux (Sécurité sociale, caisse des retraites, etc.) procède de la même volonté politique de préserver le climat social. Les autres catégories de victimes du hold-up administratif attendent une mesure du même type. On ne peut pas opter pour une solution politique envers une catégorie de clients et prétendre appliquer les règles de la liquidation judiciaire à d'autres. Le comité