Le Forum des chefs d'entreprise lance un appel “solennel” aux autorités publiques pour le gel des dispositions du décret fixant les modalités de suivi des importations en franchise de droits de douane. Le décret n°10-89 du 10 mars 2010 fixant les modalités de suivi des importations en franchise de droits de douane est-il rétroactif ? Publié dans le Journal officiel du 14 mars dernier, le décret est appliqué par les services des Douanes pour des commandes effectuées par des producteurs bien longtemps avant que cette nouvelle réglementation ne soit portée à leur connaissance. Les opérateurs économiques sont désemparés par ce fait accompli imposé par l'administration. Le Forum des chefs d'entreprise se dit assailli depuis quelques jours par des appels de détresse lancés par des chefs d'entreprise suite à la mise en application immédiate des dispositions du décret n°10-89 du 10 mars 2010 fixant les modalités de suivi des importations en franchise de droits de douane. “Ce texte, qui vient à peine d'être publié au Journal officiel, a été mis en œuvre sans désemparer et commence donc à être appliqué y compris aux opérations en cours de dédouanement au niveau des enceintes portuaires et aéroportuaires”. Le décret n°10-89 stipule ainsi que “toute personne morale exerçant une activité de production et/ou commerciale, conformément à la législation en vigueur, doit avant toute opération d'importation formuler une demande de franchise de droits de douane”. Le texte explique que la demande de franchise des droits de douane est le document préalable à toute opération d'importation en franchise des droits de douane dans le cadre des accords de libre-échange comportant l'ensemble des renseignements requis. Concrètement, les opérateurs devront demander une licence d'importation. La demande de franchise des droits de douane constitue une licence statistique aux fins de suivi des importations. La demande de franchise des droits de douane doit être accompagnée obligatoirement par une liasse de documents : la facture pro-forma en trois exemplaires, une copie légalisée du registre du commerce, une copie légalisée de l'identifiant fiscal, une copie légalisée des statuts de la société, une copie légalisée de l'attestation de dépôt des comptes sociaux auprès du Centre national du registre du commerce ; un extrait de rôle apuré, une copie légalisée de l'attestation de mise à jour avec la Cnas et/ou la Casnos. Le hic, “c'est que cette licence d'importation en franchise est exigée par les services douaniers pour des commandes effectuées par des producteurs bien longtemps avant que cette nouvelle réglementation ne soit portée à leur connaissance”, regrette le Forum des chefs d'entreprise. Par ailleurs, ajoute le FCE, “les services administratifs des DCP (Directions de commerce de wilaya) ne sont pas suffisamment préparées pour réceptionner dans des conditions acceptables le flot important des demandes de licence dont le nombre a été manifestement sous-estimé, en particulier dans certaines wilayas (Alger, Blida, Sétif, Oran, etc.) à forte densité économique”. En effet, le décret précise que la demande dûment renseignée, accompagnée des documents est déposée auprès de la Direction du commerce de wilaya territorialement compétente, qui la transmet à la Direction régionale du commerce concernée pour visa. Une fois visée par les autorités, la demande doit être présentée par l'opérateur lors du dédouanement de sa marchandise pour bénéficier de la franchise des droits. “La situation devient donc de plus en plus préoccupante sur le terrain pour les producteurs dont les matières premières sont bloquées au port, dans l'attente d'une licence statistique dont la délivrance pourrait durer jusqu'à un mois. Tous ces retards leur occasionnent d'importants surcoûts, aggravés par les pénalités financières que les services douaniers appliquent à toute marchandise dont le délai d'enlèvement dépasse les 21 jours”, alerte le Forum des chefs d'entreprise. Ce nouveau tour de vis vient alourdir encore un peu le fardeau des entreprises de production, déjà malmenées par l'obligation qui leur est faite de n'utiliser que le crédit documentaire pour régler leurs importations. Le Forum des chefs d'entreprise lance un appel “solennel” aux autorités publiques pour le gel des dispositions de ce décret. La mise en place éventuelle d'un instrument de suivi statistique des importations pourra être réalisée à travers des procédures beaucoup plus simples, estime le FCE. Pour rappel, le Forum des chefs d'entreprise avait déjà estimé que “l'orientation prise vers un retour graduel à la gestion administrative des importations est une mauvaise réponse à un vrai problème”, appelant à renouer un dialogue plus fructueux autour des solutions qui permettent effectivement à la production nationale de décupler ses capacités et de mieux contribuer à la satisfaction d'une demande nationale.