L'ancien patron des renseignements saoudiens, le prince Turki al-Fayçal, a accusé le Premier ministre irakien sortant, le chiite Nouri al-Maliki, d'avoir usurpé le résultat des élections législatives du 7 mars, donnant gagnant son rival Iyad Allawi, un sunnite laïc. Le prince a officiellement demandé que le Conseil de sécurité de l'Onu garantisse l'intégrité territoriale de l'Irak, avertissant que des groupes internes et des pays étrangers vont tenter de la démanteler. L'Arabie saoudite est persuadée qu'avec al-Maliki et le départ des troupes américaines l'année prochaine, les autorités de Téhéran œuvrent déjà à l'exacerbation des rivalités entre les diverses factions irakienne, y compris chiites, pour une partition de l'Irak et conquérir à leur avantage des portions du territoire de leur voisins. Le prince, très en vue dans le sérail saoudien, a rappelé l'empiétement iranien dans le sud de l'Irak cette année. La liste Allawi, soutenue par la communauté irakienne sunnite et qui est bien vue par l'Arabie saoudite, a théoriquement remporté les législatives du 7 mars en obtenant 91 sièges, contre 89 à celle de al-Maliki, qui n'a pas les faveurs de Ryad mais celle de Allawi. Celui-ci n'a pas voulu s'avouer vaincu et a demandé un nouveau comptage des voix, qui n'a rien changé aux résultats. Il s'en est alors remis à Téhéran qui a poussé l'autre liste chiite de 70 sièges à s'allier avec le premier ministre sortant. Mais al-Maliki a encore besoin de quatre sièges. Qu'à cela ne tienne, Téhéran à plus d''un tour dans son sac: le mouvement sadriste est invité à faire allégeance à al-Maliki. Le fougueux chiite de Bagdad ne peut rien refuser aux Iraniens dont il est l'hôte depuis un bon bout de temps. D'abord, pour ne pas être assassiné en Irak par des fractions rivales chiites, sinon par des djihadistes. Ensuite, le jeune imam poursuit des études à Qom pour s'affubler du titre d'ayatollah, comme son père, le vieux Sadr pendu par Saddam Hussein. Ce virage à 180 degrés du mouvement sadriste, qui affichait son opposition à une reconduction d'al-Maliki, est intervenu après des pressions iraniennes. En contrepartie, al-Maliki promet de libérer des commandos sadristes détenus sans jugement. Sadr reprochait à al- Maliki, qui avait lancé en 2008 une campagne militaire contre son bras armé, l'armée du Mahdi, de maintenir en prison plus de 2 000 de partisans. Ce mouvement a enregistré un bon score aux législatives en obtenant 39 sièges sur les 325 du nouveau Parlement, faisant de lui un acteur incontournable pour la formation d'un gouvernement. La probabilité qu'al-Maliki prenne la tête du troisième gouvernement élu depuis la chute de Saddam Hussein en 2003, fait craindre une reprise de la violence intercommunautaire. “Tout semble indiquer que nous nous dirigeons vers une escalade de la violence”, n'arrête pas d'avertir l'ancien Premier ministre Iyad Allawi qui parle de guerre civile. Le 10 mai, plus de 100 personnes ont été tuées dans près de 60 attentats à travers le pays. Les attaques sont survenues après un communiqué du nouveau “ministre de la Guerre” de l'Etat islamique en Irak, ombrelle de plusieurs organisations chapeautée par Al-Qaïda, annonçant le lancement d'une campagne militaire.