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Une corruption passive
L'abus des biens sociaux de l'entreprise
Publié dans Liberté le 07 - 06 - 2010

Le délit d'abus de biens sociaux ABS, comme tout délit d'ailleurs, est constitué de deux éléments : un élément matériel et un autre dit intentionnel. L'élément matériel concerne les agissements de droit ou de fait émanant du dirigeant ou des représentants d'une société par actions qui “de mauvaise foi, auront fait du bien ou du crédit de la société un usage qu'ils savaient contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement". Les biens sociaux de l'entreprise sont tous les éléments mobiliers ou immobiliers qui constituent son patrimoine, même si l'entreprise est locataire de ces biens.
Le crédit social, quant à lui, concerne la confiance qui s'attache à l'entreprise, sa crédibilité et son image de marque. Le crédit social de l'entreprise c'est aussi sa capacité d'emprunter ou le fait de constituer des garanties. Le dirigeant ne possède donc pas le droit d'exposer au risque le capital social de l'entreprise, comme il ne lui est pas non plus permis d'utiliser, à des fins personnelles, sa réputation. L'intérêt de l'entreprise est au cœur même de la définition de l'ABS. Par cette protection, le législateur cherche à assurer la prospérité et la pérennité de la société. Cet intérêt diffère sans nul doute de celui de son dirigeant, car la société est un agent économique autonome qui poursuit un but bien distinct, non seulement de ses gestionnaires, mais aussi de ses propriétaires, salariés, clients, fournisseurs et créanciers. Par conséquent, tout acte de gestion en mesure de permettre au dirigeant de bénéficier d'un intérêt économique, professionnel ou même moral, est considéré comme un ABS et est susceptible de déclencher des poursuites judiciaires sur les plans pénal et civil. L'élément intentionnel, quant à lui, concerne les intentions du manager au moment de l'accomplissement de l'acte de gestion. Pour qu'il y ait un ABS, le dirigeant doit avoir agi de mauvaise foi, c'est-à-dire avoir en conscience que son acte est contraire à l'intérêt social de l'entreprise et qu'il l'a accompli pour s'enrichir lui-même ou permettre aux tiers de s'enrichir au détriment des propriétaires des actions.
Les exemples qui vont suivre nous donnent un aperçu sur des cas concrets d'ABS et permettent de mieux comprendre cette notion. Il est vrai que la loi est restée muette sur le contenu, l'étendue et le degré du délit d'ABS, cependant la jurisprudence a réussi à tracer les contours de cette forme de corruption passive, que l'on rencontre malheureusement souvent dans la gestion des entreprises publiques, et les cas concrets cernés par la jurisprudence nous éclairent davantage sur le contenu de ce délit qui demeure peu connu par les dirigeants :
Prise en charge des travaux dans le domicile privé du dirigeant; Affectation d'un véhicule, bien de l'entreprise pour les déplacements privés du dirigeant ou de ceux des membres de sa famille;
Achat de livres, journaux, revues pour le compte personnel du manager. (Ce point soulève la question pertinente de la facturation de complaisance) ;
Dépenses inopportunes :
Prise en charge des frais de voyages n'entrant dans le cadre d'aucune mission. (Dans ce cas, le comptable qui valide la dépense est aussi responsable) ;
Rémunération abusive :
Attribution illégale d'indemnités. (Dans ce cas précis, le manager commet à côté du délit d'ABS, un deuxième délit plus grave, celui de la concussion) ;
Salaires ou indemnités excessifs, accordés sans tenir compte des équilibres financiers de l'entreprise ni du travail réellement fourni; Recrutement abusif d'un personnel dont la qualification ne correspond pas à l'activité de l'entreprise. (Une entreprise spécialisée dans le domaine de l'électronique ne peut recruter un ingénieur agronome et le rémunérer en tant que tel, sous prétexte des services rendus à l'entreprise par le père de l'intéressé) ; Prise en charge des dettes personnelles du dirigeant. Cautionner un emprunt contracté par un proche du manager; Transmission du courrier de l'entreprise par un moyen très onéreux pour la société, alors qu'il existe d'autres possibilités assurant la même qualité et la même sécurité ;
Tout manque à gagner occasionné à l'entreprise ; Appauvrissement de l'entreprise mère en affectant à l'une de ses filiales certains biens. (Dans ce cas précis, le gestionnaire pourrait protéger des intérêts particuliers au niveau de la filiale);
Opérations désavantageuses pour la société, menées dans le but de maintenir des relations amicales avec un tiers, comme dans le cas où le manager sponsorise les activités de certaines associations ou institutions, dont l'entreprise ne peut tirer aucun avantage.
Attribution de cadeaux :
Utilisation des locaux de l'entreprise comme lieu de réunions pour des campagnes politiques ou à l'occasion d'événements n'ayant aucune relation avec l'activité de l'entreprise;
Utilisation abusive des moyens de communication et de transport par le dirigeant ;
Prise en charge des factures litigieuses dans le but de garder de bonnes relations avec le client ;
La non-réclamation des dus de l'entreprise
La non-résiliation d'un bail très onéreux :
On déduit aisément des cas d'ABS examinés par les instances judiciaires, que nous sommes en présence d'actes frauduleux portant gravement atteinte aux intérêts de l'entreprise, mais qui sont malheureusement considérés comme des actes anodins par de nombreux managers. Pour se justifier, les dirigeants mis en cause se cachent habilement derrière les autorisations qui leur auraient été accordées par le conseil d'administration (CA) ou l'assemblée générale (AG), avant d'exécuter les actes controversés. Parfois, certains dirigeants reconnaissent qu'ils ont commis les actes qui leur sont reprochés mais précisent qu'ils ont agi de bonne foi.
De telles aberrations n'existent, malheureusement, que dans les SPA propriété de l'Etat, car il est inconcevable que des propriétaires privés d'une société prennent des décisions menaçant leurs propres intérêts. Est-ce parce que l'état est propriétaire de l'entreprise que les organes de contrôle et de gestion se permettent l'inimaginable ?
Tout acte allant à l'encontre de la crédibilité de l'entreprise, menaçant son équilibre financier et sa pérennité, ne peut être validé par aucun organe de gestion ou de contrôle.
Ceux qui valident des actes de gestion déviants sont passibles de poursuites judiciaires pour complicité d'ABS. Ainsi les autorisations, quelle que soit leur origine, mettant à la disposition de certains managers et leurs familles – même durant les week-ends – des véhicules bien de l'entreprise, notamment publique, sont nulles et de nul effet. Nous l'avons déjà souligné plus haut, le patrimoine de l'entreprise est bien distinct de celui de ses gestionnaires et propriétaires. C'est pour cette raison, d'ailleurs, que les salaires attribués aux managers doivent leur permettre de mener une vie conforme à leur statut.
Certains dirigeants se réfugient aussi derrière “les services” qu'ils auraient rendus à l'entreprise, lui permettant à titre d'exemple de réaliser des bénéfices appréciables. Un tel raisonnement est inadmissible et témoigne de l'ignorance de certains gestionnaires de la notion même d'entreprise. Il en est de même pour ceux qui s'étonnent d'être poursuivis pour ABS d'une entreprise qu'ils ont créée eux-mêmes. La répression du délit d'ABS, quant à elle, soulève des questions pertinentes, notamment celles relatives à la prescription du délit et à la nature même de sa répression. Le ministère public n'agit que s'il est en possession de preuves tangibles en mesure de prouver l'existence du délit. Nous ne souscrivons donc pas aux idées qui tentent à interdire au parquet de diligenter des enquêtes, sauf dans le cas où il serait saisi par les associés, les organes de gestion ou les dirigeants mêmes. En effet, une telle approche mettrait en péril l'économie de l'Etat et déstabiliserait la paix sociale, car rares sont les cas où les organes de gestion ou les dirigeants signalent les abus de biens sociaux à la justice, notamment quand il s'agit des entreprises propriété de l'Etat. Les législations qui limitent dans le temps la vie du délit d'ABS, obéissent beaucoup plus à une philosophie libérale qui vise à dépénaliser tous les actes de gestion de l'entreprise, assurant ainsi une complète irresponsabilité aux cols blancs. Limiter dans le temps la vie du délit d'ABS, c'est exonérer de poursuites une bonne partie des délinquants financiers qui sévissent en particulier dans les entreprises publiques, car il ne faut pas perdre de vue que les effets des usages contraires aux intérêts de l'entreprise ne se manifestent pas dans l'immédiat.
Le souci majeur de la pénalisation de l'ABS demeure la protection des victimes ; ne pas reconnaître l'imprescriptibilité de ce délit c'est soutenir les délinquants contre les victimes. L'étude des jurisprudences comparées démontre que le juge tient de plus en plus compte des effets du délit d'ABS, procédé qui rend donc ce délit imprescriptible de fait. Les dirigeants des SPA reconnus coupables de délit d'ABS peuvent encourir deux types de sanctions : pénales et civiles. La sanction pénale vise la répression de l'acte en condamnant, généralement, le dirigeant fautif à une peine d'emprisonnement assortie d'une amende ou de l'une de ces peines seulement.
D'autres nations appliquent un autre type de sanction pénale comme celui de l'interdiction de gérer. Les infractions en matière d'ABS sont complexes et font parfois appel à des montages diaboliques. En effet, pour camoufler le délit, les managers indélicats commettent souvent d'autres infractions, sans le savoir généralement – comme celle de la concussion de l'usage de faux ou de présentation de comptes inexacts. Cependant, la frontière est facile à établir entre le comportement délictueux et l'acte audacieux pris par un entrepreneur dans le but de servir uniquement les intérêts de l'entreprise.
Dans ce cas, le juge examine si l'usage en question est de nature à causer un risque de perte ou une perte certaine pour l'entreprise, car ni le CA, ni l'AG et encore moins les dirigeants ne possèdent le droit de faire exposer au risque l'actif social de la société. L'exercice de l'action civile vise, quant à lui, à réparer les dommages subis par les victimes. La responsabilité civile est fondée sur la faute prouvée, le demandeur de l'action en responsabilité doit, en outre, prouver l'existence d'un dommage subi par la société ou les actionnaires, ainsi qu'un lien de causalité entre la faute et le dommage subi. Nous tenons à préciser que les actionnaires (ou l'état selon le cas) ont le droit d'intenter une action en civil UT Sunguli pour le compte de la société.
Nos propos n'ont pas l'intention d'encourager une fureur juridique à l'encontre des dirigeants d'entreprises, mais d'attirer seulement l'attention sur un type de corruption qui demeure mal connu en Algérie, notamment par les chefs d'entreprise qui dans beaucoup de cas agissent par ignorance des lois.
K. R.
(*) Docteur en sciences juridiques


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