On doit accepter les défaites. Mais certaines sont dures à avaler. Il ne s'agit pas non plus de se défouler sur Saâdane, mais il faut dire qu'il a réussi une seule chose dans ce match : tuer le génie du football algérien. Voyez-vous, j'ai grandi avec l'idée qu'on était “les brésiliens de l'Afrique” avec notre technique supérieure à la moyenne. On est des manieurs de ballon. On le caresse, on dribble, on improvise, on se lâche. Notre football est d'abord un jeu de rue, rien d'académique, où l'inspiration est tout. La discipline n'est rien. J'aurais tant aimé les voir se rebeller, ne pas respecter des consignes défensives, aller de l'avant. Comme j'aurais bien aimé que Saâdane ne soit pas un Mourinho raté avec son goût immodéré pour le béton armé et le jeu inerte. Mais on aurait tous aimé que les Verts rendent une autre copie surtout dans l'envie et le culot. Cela étant dit, revenons au match, je ne résiste pas comme vous autres à tenter de comprendre ce fiasco. Assez prévisible par ailleurs. Les Verts ont été loin d'être ridicules, entamant avec conviction leur match, même si le déchet technique était fréquent. Puis, je me suis rendu compte d'une troublante évidence. Cette Slovénie-là n'est pas une bonne équipe. Elle n'a rien de “Yougoslave”. Elle est même très loin d'être redoutable et qu'on avait la place pour s'imposer. C'est avec cette heureuse constatation que j'ai patienté à la mi-temps. Et puis arrive le reste. C'est-à-dire le “grand n'importe quoi”. Ma première palme d'or du grand n'importe quoi revient à Djebbour. Il paraît qu'il joue à Athènes. Je me suis dit qu'il a été sûrement affecté par la crise en Grèce, car on n'a rien pu se mettre sous la dent comme occasion de but. Comme tout le monde, je me suis mis à espérer Ghezzal. Imaginez-vous, Ghezzal. Le buteur fâché avec le cadre. Coiffure à l'iroquois et des bas aux genoux, on savait qu'il serait plus motivé pour se battre comme un chiffonnier que le fantôme de Djebbour. Et là, arriva l'incroyable. 10 minutes. Un tirage de maillot, deux têtes non cadrées et une main : carton rouge. Et c'est là que j'ai compris qu'on n'y arrivera jamais. Pas parce qu'on était réduit à dix, mais parce que la frustration de Ghezzal est la mienne et la vôtre. Parce que ce joueur a été sacrifié à cause de son inefficacité, avec le consentement populaire, et qu'on s'est mis à le réclamer en plein match comme on prie pour un sauveur. Comme on s'est mis à réclamer le petit Boudebouz ou l'inutilisé Abdoun, croyant que le mal de notre sélection est dans le profil des joueurs au lieu de voir les choses comme elles nous ont apparu depuis des semaines : Saâdane qu'as-tu fait de cette équipe ? Je parlerais deux secondes de Saïfi que j'ai cru apercevoir sur les ralentis (j'attends vos confirmations), mais un peu plus de Chaouchi. Green, le gardien anglais doit être soulagé de ne pas être le seul gardien qui sera dans le bêtisier du mondial. Mais autant je ne veux pas accabler Chaouchi, car je suis Abou Jabulani, le père de ce ballon ingrat et turbulent, autant il reflète ce mal qui ronge l'équipe algérienne qui est traversée d'ego surdimensionné qui sont devenus des stars. Des chouchous. Nos enfants gâtés à nous qu'on a gavés de louanges, de clémence et de contrats publicitaires. Saâdane et ses joueurs nous doivent une revanche et au plus vite. Pas celle où on va battre l'Angleterre. Mais une revanche sur le jeu. Démontrer au monde qu'on sait jouer le football qui nous correspond. Qu'on en prenne 5 contre les anglais ne me dérange pas. Mais qu'on se batte avec nos armes et notre beau jeu en n'ayant pas la palme de l'équipe la plus faible du mondial. Bon sang, c'est la COUPE DU MONDE et souvent elle n'arrive qu'une seule fois dans une vie. Ps : L'un des plus grands matches de l'EN était une défaite contre le Brésil en 1986. [email protected]