Résumé : Yamina est heureuse de la visite de sa belle-famille venue les féliciter pour le bébé. Ils n'en reviennent pas en la voyant. Magda est blonde. Zakia se met à douter de sa belle-fille… 2eme partie -Elle ne tient pas de la famille, dit sa belle-mère Zakia en la fusillant des yeux. Elle est blonde et ses yeux sont verts. Elle ne tient pas de la famille, insiste-t-elle, repoussant la tasse de café au lait que sa belle-fille venait de poser devant elle. Même ses traits... - J'avais une arrière grand-mère dont on vantait la blondeur de ses cheveux et l'éclat bleu de ses yeux, glisse Yamina en sentant une sueur lui mouiller la paume des mains. Mes parents pourront te parler d'elle. J'ai même des cousins aux yeux clairs. Ils les tiennent d'elle. - Je voudrais bien te croire, rétorque Zakia en soupirant. C'est si étrange qu'elle ne nous ressemble pas. Ni par le teint ni par les traits. Elle n'a rien de la famille. - Tu es jalouse d'elle, plaisante Farès. Elle est si belle qu'elle a réussi à délier ta langue. Tu la critiques si sévèrement. À qui la faute si elle est la plus belle ? - À sa mère. Je me serais bien contentée d'une brune comme elle, comme toi et moi, réplique sa mère en s'efforçant à sourire. Pourquoi une blonde ? - Dieu l'a ainsi voulu. Yamina n'y est pour rien, tout comme moi, dit Farès. Tu n'es pas fière d'elle ? Zakia hoche la tête et sourit. - Si j'ai de quoi être fière d'elle. Après tout, blonde ou brune, elle est ma petite-fille. Zakia ne touche pas à son café au lait ainsi qu'aux gâteaux. Si elle n'avait pas craint de peiner son fils, elle serait sortie. Yamina remarque, de son côté, le silence de sa belle-mère alors que tous les autres discutaient. Elle connaît trop bien sa belle-mère pour savoir que cela n'annonce rien de bon. Yamina a l'impression d'étouffer. Elle éprouve le besoin de quitter le salon. L'occasion lui est donnée par son bébé. Magda s'était mise à pleurer. Comme elle ne se sent pas bien, elle en profite pour aller dans sa chambre. Si elle était restée une minute de plus, elle se serait évanouie. Elle en a la certitude tout en s'allongeant, le bébé contre son sein. Elle sait qu'elle a faim mais elle ne lui donne pas la tétée. Elle laisse sa fille pleurer. Les fleurs du papier peint semblent tourner autour d'elle. Yamina ferme les yeux pendant un moment, attendant que le vertige passe. Magda pleurait toujours. Les yeux fermés, elle lui donne sa sucette. Le silence qui tombe d'un coup dans la chambre est pareil à une bouffée d'oxygène. Yamina se sent vite mieux. Si seulement sa belle-mère n'avait pas eu la mauvaise idée de la rejoindre. Lorsqu'elle avait entendu la porte s'ouvrir et se refermer, elle avait deviné que c'était elle. Sa belle-mère avait la démarche silencieuse. Yamina garde les yeux fermés, elle ne veut pas la voir. Tout est clair en elle. Sa belle-mère doute réellement de l'origine du bébé. - Qu'est-ce que tu croyais ? Que cela ne serait pas flagrant ? dit Zakia. Je ne suis pas née de la dernière pluie. Je sais que cette fille n'a pas notre sang. Pourquoi Yamina ? s'écrit-elle. Pourquoi avoir trahi mon fils ? Je te croyais digne de lui. Je te trouvais exceptionnelle ; de mes trois brus, tu étais ma préférée. Pourquoi avoir tout gâché ? - Comment peux-tu douter de moi ? s'écria Yamina qui voyait le ciel lui tomber sur la tête. Jamais je n'ai trompé mon mari. Cette fille est de lui, même si tu ne veux pas le croire. Elle a beau être blonde, elle est de lui et de moi. Elle a votre sang dans les veines. - Je ne te crois pas ! dit sa belle-mère. Elle n'est pas de la famille. D'où l'as-tu ramenée ? D'où ? insiste-t-elle. Qui était-ce ? Qui est son père ? - Je te jure sur le Saint Coran que je n'ai jamais trompé mon mari ! crie Yamina en s'emparant du livre sacré. Tu sais combien je l'aime. Pourquoi aurais-je compromis mon mariage pour rien ? Ce bébé, on le voulait. C'était une dernière couche de ciment pour solidifier notre mariage. Pas pour le détruire. - Que de belles paroles ! rétorque Zakia. Tu aurais pu me convaincre si je n‘étais pas aussi avertie. J'en ai tellement vu et entendu, j'ai plus de soixante-dix ans, lui rappelle-t-elle. Il en faudrait plus pour m'aveugler. Pourquoi n'avoues-tu pas ? Pourquoi ne reconnais-tu pas que cette fille n'est pas de lui ? Yamina s'apprête à se défendre quand la porte s'ouvre sur son mari. À son visage blafard, elle devine qu'il a tout entendu. (À suivre) A. K.