Invitée par l'AARC, cette auteure prolixe a évoqué son œuvre, les questionnements qui traversent son écriture, son rapport au monde d'aujourd'hui et son dernier roman, Une livre de chair, disponible en Algérie chez Chihab, à partir du 28 juin prochain. à sept ans déjà, elle disait vouloir devenir écrivain. À 16 ans, elle est partie en Grèce à la recherche de Zorba le Grec (le héros du roman de Nikos Kazantzakis Aléxis Zorbás, paru en 1946). La Scandinavie est absente dans son œuvre prolixe. Elle dénonce, dans ses livres, la froideur, l'ordre, l'inhumanité. D'origine danoise, la France est sa terre d'adoption et le français sa langue d'expression. Pia Petersen explore les limites de la liberté et piste l'homme vivant. Pia Petersen était l'invitée, jeudi dernier, du Dîwan Abdellatif, initié par l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel (AARC). Au cours de la rencontre modérée par Aïcha Kassoul, universitaire et auteure, Pia Petersen a évoqué son œuvre, les questionnements qui traversent son écriture, son exil choisi en France, son rapport au monde d'aujourd'hui et son dernier roman, Une livre de chair, paru aux éditions Actes Sud en février 2010, et disponible en Algérie chez Chihab, à partir du 28 juin prochain. Après avoir dit, avec beaucoup d'entrain, sa joie d'être en Algérie, et tout ce qu'il a marqué en arrivant, Pia Petersen a raconté son histoire avec l'écriture, et expliqué pourquoi la Scandinavie était absente dans ses romans. “Au Danemark, c'est une société du bonheur, mais c'est une société très pragmatique, et si on n'est pas dans la norme, on est considéré comme un psychopathe. La langue aussi est rigide. Dans la langue française, on donne beaucoup de définitions qui ne sont pas finis. Il y a un flou poétique et de l'ambiguïté”, a-t-elle révélée. Et là, on comprend pourquoi Pia Petersen a choisi d'écrire en français, car c'est une langue qui admet, volontiers, la demi-mesure, l'équivoque et l'ambivalence. L'écrivaine, qui a entamé sa carrière littéraire en 2000 avec la parution de son premier roman, le Jeu de la facilité (éditions Autres Temps), et qui compte déjà six romans à son actif, a choisi de vivre en France (entre Marseille et Paris), parce que “c'est un pays où on râle tout le temps”. Pia Petersen a fait sa première expérience de l'exil en France donc, et a choisi de faire des petits boulots afin de garder son esprit libre. Une fois sur place, elle a pris au hasard le roman, le Rouge et le Noir, de Stendhal, et munie d'un dictionnaire, elle a essayé d'apprendre la langue française. Aïcha Kassoul a d'ailleurs trouvé un lien entre Stendhal et Pia Petersen, puisque dans son roman, le premier s'interroge sur la manière de vivre au mieux avec ses capacités dans le monde, et Pia explore les limites de l'homme et sa soif de liberté, dans un contexte de crise financière, de mondialisation où l'être humain n'a plus de valeur, sinon celle de marchandise. En effet, dans son second roman, Parfois il discutait avec Dieu, paru en 2004 chez Actes Sud, Pia cherche les possibilités de liberté de l'être humain ; dans Une fenêtre au hasard, elle s'intéresse au concept de l'amour qu'elle juge comme absolument fondamental ; dans Passer le pont, elle traite du thème épineux des sectes et de la manipulation de l'esprit ; dans Iouri qui rappelle le roman 1984 de Georges Orwell, elle évoque la fin des libertés individuelles ; et dans son dernier né, une Livre de chair, elle dévoile concrètement et totalement son univers en s'intéressant aux thèmes de l'argent et de la spéculation. L'écrivaine s'interroge dans son une Livre de chair (titre choisi par l'écrivain Daniel Picouly) sur l'engagement et jusqu'où doit-on aller pour une idée. “Dans les œuvres de Pia Petersen, relève la modératrice, il y a beaucoup de solitude et de souffrance. Elle a le goût des autres mais il y a aussi des éléments fondateurs qui signalent l'écrivain.” Comme elle a étudié la philosophie à la Sorbonne, et après avoir remarqué que les philosophes étaient toujours en retard d'une guerre, Pia Petersen a tenté de trouver son propre rapport au réel qu'elle dit “ne percevoir qu'à travers l'écriture”. Après avoir compris que la pensée ne pouvait être que fragmentaire dans un monde bouleversé par les nouvelles technologies, Pia Petersen a fini par trouver son verbe, à révéler son univers, et à proposer une œuvre indissociable de son parcours personnel.