Le premier responsable de l'éducation nationale avait “prédit” que le premier bac de la réforme sera des plus performants. C'est peut-être le cas sur le plan de la quantité. Mais qu'en est-il de la qualité ? Si pour la tutelle ce taux est le fruit de la réforme, pour les spécialistes, les syndicalistes et l'opinion publique c'est un bac politique. Comme il fallait s'y attendre à l'analyse des déclarations faites par le premier responsable de l'éducation nationale, les résultats de l'examen du baccalauréat ont dépassé tout pronostic. En refusant de donner un quelconque pourcentage, à la veille de la tant attendue épreuve, en se contentant d'affirmer que “je ne fais pas de pronostics. Mais les résultats du premier bac de la réforme devraient être meilleurs que ceux des précédentes sessions”. M. Benbouzid avait donné le ton et le taux et n'a probablement jamais aussi bien pesé ses mots. Normal, dira-t-on, étant le premier responsable du secteur, il ne pouvait qu'être dans le secret des dieux et décidé de la suite et surtout de l'issue d'une réforme dont il n'a jamais cessé de vanter les miraculeux rendements au fur et à mesure que les critiques fusaient de part et d'autre. Rira bien qui rira le dernier. Le ministre de l'Education nationale aura attendu près de 12 longues années pour prendre sa revanche. Et quelle revanche ! Le premier bac de la réforme engagée contre vents et marées a atteint un taux inégalé de 61,23% avec toujours les filles en tête de liste : 64,73% admises contre seulement 35,27% admis. Qui pouvait s'attendre à un tel taux de réussite avec toutes les données et les appréhensions justifiées qui ont marqué l'année scolaire ? Mais en Algérie, spécialement en politique, quand on veut on peut. Le bac 2010 restera certainement dans les annales et le 5 juillet sera désormais fêté doublement par ceux qui ont eu la chance d'être parmi la première promotion de la réforme du système éducatif. Passée l'euphorie, les youyous et les félicitations, cette pensée qui traverse l'esprit des bacheliers et des parents qui tentent de “la couvrir par un tamis” est malheureusement réelle. Le taux de réussite dont s'enorgueillie la tutelle est loin d'être le fruit de la fameuse réforme tant décriée par les spécialistes et pédagogues. Pourquoi cette fameuse réforme n'a eu aucun effet sur les résultats de la wilaya de Djelfa classée une fois de plus dernière ? Comment peut-on croire si naïvement qu'avec toutes les insuffisances du système éducatif en général et des perturbations qui ont influé négativement sur le déroulement de l'année scolaire en particulier à une telle performance ? On passe carrément sans transition aucune de la menace d'une année blanche à une grandiose prouesse. Par quel miracle ? Car faire monter le taux de réussite en flèche relève du seul miracle. De 55% en 2008, le taux est passé à seulement 47% l'année dernière pour grimper subitement à 61,23%. Comment revenir d'une baisse sensible vers un envol vertigineux ? Et avec une forte amélioration même sur le plan quantitatif. En effet, alors qu'en 2008, et pour la première fois, seuls trois candidats ont pu décrocher leur bac avec la mention excellent, cette année le taux grimpe également en flèche avec pas moins de 49 mentions excellent. Quant aux mentions très bien, bien et assez bien, elles sont accordées à près de la moitié des lauréats, soit 43,49%. Il y a une dizaine d'années seulement, le taux de réussite au bac n'atteignait, dans le meilleur des cas, les 25%. Même les enseignants et les pédagogues n'arrivent pas à expliquer un tel revirement si ce n'est par “les miracles de la politique”. “Nous avons eu une chance inouïe”, ont commenté certains bacheliers alors que “c'est un bac politique” revenait sur toutes les langues à l'annonce des résultats par l'opérateur de la téléphonie mobile Mobilis via SMS. Offrir sur un plateau en or le visa d'accès à l'université à plus de la moitié des postulants est un cadeau qui ne se refuse pas, mais que l'on ne se voile pas la face. Il est vrai que parmi ces bacheliers, il en existe bel et bien des brillants mais une fois de plus le niveau réel des élèves et des étudiants soit des futures cadres, juristes, médecins… posera à jamais problème. Car c'est la quantité qui prime et non la qualité.