L'équipe d'Espagne s'est construite sur les ruines de la cinglante élimination en 8e de finale du Mondial-2006 face à la France de Zidane, pour arriver à son apogée lors de la conquête de l'Euro-2008, confirmée par sa présence en finale du Mondial-2010. Ce 27 juin 2006 à Hanovre, l'Espagne tombe de haut, corrigée par la France des “vieux” Zidane et Vieira (3-1). Sont déjà titulaires ce soir-là : Casillas, Sergio Ramos, Puyol, Xabi Alonso, Xavi, Fabregas, Torres et Villa. Iniesta est sur le banc. Le sélectionneur d'alors, Luis Aragones, va s'appuyer sur ce noyau. Mais l'Espagne touche le fond : en septembre 2006, elle perd (3-2) en Irlande du Nord, avant un nouveau revers en Suède (2-0) en qualifications pour l'Euro-2008. La défaite en amical face à la Roumanie à domicile (1-0) referme l'annus horribilis. Aragones sacrifie Raul, le capitaine. Presque un crime de lèse-majesté, et le débat fait rage entre “raulistes” et “luisistes”. Emblématique, le joueur du Real Madrid était aussi clivant. Le gardien remplaçant Reina le dira plus tard à demi-mots, parlant d'un “autre type de joueurs, avec plus de hiérarchie”. Villa récupère son numéro 7, comme une passation entre buteurs. La renaissance de l'Espagne, et la naissance de son système de jeu fondé sur des passes courtes et une forte possession de ballon, se produit au Danemark. “Là, sincèrement, nous étions tout seuls”, raconte le défenseur Capdevila dans le livre les Secrets de la Roja, de Miguel Angel Diaz. “Si l'on perdait, on était éliminés. Tout était ligué contre nous et les couteaux s'aiguisaient dans la presse. On s'est dit : "C'est notre moment, c'est l'heure de vérité, à nous de voir si on avance ou si on recule." Cela a été le moment-clé." Ce 13 octobre 2007 à Aarhus, la Roja s'impose (3-1). Sergio Ramos marque un but au terme d'une action de 27 passes au cours de laquelle 9 des 10 joueurs de champ touchent le ballon. C'est l'acte fondateur du “toque” ou “tiqui-taca”. L'Espagne a trouvé son style et elle s'installe en Autriche à Neustift (nouveau stylo en allemand) pour écrire une nouvelle page d'histoire en remportant l'Euro-2008. En demi-finale, elle doit affronter la Russie. Les Espagnols craignent Arshavin, auteur de deux buts et d'une passe décisive en quarts face aux Pays-Bas (3-1 a.p.). “Arshavin n'est pas bon, les enfants. Le bon, c'est Pavlyuchenko, lance Aragones à ses joueurs médusés. On m'a dit qu'après avoir éliminé les Pays-Bas, Arshavin s'est bu une bouteille entière de whisky. Contre nous, il ne pourra même pas bouger.” “C'était comme s'il nous avait dit tout un tas de conneries, mais après, en parlant entre nous dans le bus, on s'est rendu compte à quel point nous étions motivés”, se souvient Villa. “Cette causerie a été la meilleure que j'aie jamais entendue”, abonde Puyol. Et l'Espagne balaie la Russie (3-0) avant de dominer l'Allemagne en finale (1-0). Après l'Euro-2008, Vicente Del Bosque succède à Aragones dans un style plus rond, mais conserve le même fond de jeu et injecte du sang frais (Busquets, Piqué, plus tard Pedro). Et les victoires s'enchaînent avec un record de 15 succès consécutifs, jusqu'à un revers surprise en demi-finale de la Coupe de Confédérations 2009 contre les Etats-Unis (2-0). Fin de 35 matches sans défaite, égalant le record du Brésil (1993-1996). “Une défaite accidentelle, juge le sélectionneur. Nous devons continuer avec notre identité.” Au premier match de qualifications pour le Mondial-2010, l'Espagne est menée (2-0) par la Macédoine. Del Bosque opère trois changements et la Roja l'emporte 3-2. C'est reparti pour une longue invincibilité, jusqu'à la finale du Mondial-2010. Seulement ébréchée par la défaite contre la Suisse (0-1) au début du tournoi. Un autre accident sans incidence.