Nous avons exposé dans une précédente contribution les raisons de l'expansion rapide de l'Islam au début. Nous poursuivons aujourd'hui cette analyse en proposant les principes de l'organisation sociale de la société tels que proposés par le Coran et la sunna. Le Coran nous propose plusieurs principes de l'organisation de la société. Il est dit : “Nous n'avons, dans le Livre, rien manqué.” 6-38. Je me limite, dans cet exposé, à cinq principes que je considère très importants, au moment où tout le monde s'inquiète de la bonne gouvernance et du droit de l'homme. Le premier principe est l'anoblissement de l'être humain et sa prédilection. Il est écrit dans le Livre : “Et très certainement, Nous avons donné de la noblesse aux enfants d'Adam. Et Nous leur avons procuré, sur terre comme sur mer, de quoi monter et attribué d'excellentes choses comme nourriture, et les avons fait exceller d'excellence sur beaucoup de ce que Nous avons créé !” 17-70. Le deuxième principe est l'égalité ; alors que la différenciation ne se justifie que par le niveau de piété : “Ô les gens ! Nous vous avons créés d'un mâle et d'une femelle et vous avons désignés en nations et tribus, pour que vous vous entre-connaissiez. Oui, le plus noble des vôtres, auprès de Dieu, c'est le plus pieux des vôtres. Dieu est savant, informé, vraiment.” 49-13. Comme il est aisé de le constater, ce principe s'oppose aux systèmes de classes et au racisme. Il appelle à l'égalité et la justice : les gens sont égaux. Il ne peut y avoir de différenciation pour des raisons de race, de couleur, de langue, de religion, de genre ou de nationalité. Le troisième principe est la fraternité humaine : “Ô hommes ! Craignez votre Seigneur qui vous a créés d'un seul être et qui, ayant créé de celui-ci une épouse, fit naître de leur union un grand nombre d'hommes et de femmes. Craignez Dieu que vous invoquez dans vos requêtes mutuelles ; craignez (de rompre) les liens du sang. Certes, Dieu vous observe.” 1-4. De même, le droit à la charité et à la justice est protégé pour les frères humains, y compris pour les non-musulmans, comme l'atteste ce verset : “Dieu ne vous empêche pas, à l'égard de ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassés de vos demeures, de leur faire la charité et d'être, envers eux, à la balance. Oui, Dieu aime ceux qui traitent à la balance.” 8-60. Le quatrième principe est la fraternité islamique : “Les croyants ne sont rien moins que des frères. Réconciliez donc vos frères (quand ils sont séparés par un différend) et craignez Dieu pour (mériter) sa miséricorde.” 10-49. Et le Prophète nous enseigne : “L'un de vous ne peut être considéré croyant que lorsqu'il aime à son frère ce qu'il aime à lui-même.” Le cinquième principe est la sacralisation du respect de la vie privée : “Croyants ! Abstenez-vous de vous livrer aux conjectures (sur autrui) car il est des suppositions qui sont des péchés. N'espionnez point et ne médisez pas les uns des autres. Lequel d'entre vous voudrait manger la chair de son frère mort ? Vous en auriez horreur ! Craignez Dieu ! Il est très clément et très compatissant.” 12-49. C'est sur ces cinq principes que devrait se baser l'organisation de la société musulmane dans sa dimension sociale : l'anoblissement de l'être humain, l'égalité, la fraternité humaine, la fraternité islamique et la sacralisation du respect de la vie privée. Mais, lorsque nous parlons de l'organisation sociale, nous devons porter une attention particulière à la question du pouvoir politique. Dans la société musulmane, le pouvoir est organisé autour de trois principes : la non-appropriation du pouvoir, le pouvoir est éphémère, le pouvoir se réalise par la consultation, la finalité et l'effort. Le pouvoir n'appartient ni à une lignée, ni à une oligarchie, ni à une catégorie sociale. “El moulkou lillah.” Le pouvoir (comme la richesse) est éphémère. Ce n'est qu'un dépôt (amana). C'est une mission devant laquelle les montagnes ont reculé, nous dit le Coran : “Nous avons proposé aux cieux, à la terre et aux montagnes la responsabilité (de porter les charges, de faire le bien et d'éviter le mal). Ils ont refusé de la porter et ont eu peur, alors que l'homme s'en est chargé ; car il est très injuste (envers lui-même) et très ignorant.” 72-33. Dieu qualifie l'homme d'être devenu injuste et insensé dans une telle situation. Le pouvoir en Islam repose sur la consultation (choura), la finalité (maqsad) et l'effort (ijtihad). La consultation est un principe constitutionnel dans la société musulmane : “…qui répondent à l'appel de leur Seigneur, accomplissent la Salât, se consultent entre eux à propos de leurs affaires, dépensent de ce que Nous leur attribuons, et qui atteint par l'injustice, ripostent.” 38/39-42. Mais la consultation doit nécessairement déboucher sur la décision et l'action : “Et consulte-les à propos des affaires ; puis une fois que tu t'es décidé, confie-toi donc à Allah, Allah aime, en vérité, ceux qui Lui font confiance.” 3-159. Le pouvoir repose sur une finalité ; il doit aller aux opprimés et aux méritants : “…Ceux qui, si Nous leur donnons la puissance sur terre, accomplissent la Salât, acquittent la zakat, ordonnent le convenable et interdisent le blâmable. Cependant, l'issue finale de toute chose appartient à Allah.” 22-41. Mais aussi : “Or, Nous voulions favoriser ceux qui étaient opprimés dans le (dit) pays, faire d'eux des dirigeants, des héritiers.” 28-5. Le pouvoir s'appuie sur l'effort (ijtihad), à savoir un engagement vers le développement scientifique et éducatif en s'ouvrant sur le monde. La motivation pour ce développement scientifique et éducatif est assurée par une incitation au savoir et une considération particulière pour les gens du savoir. Les savants musulmans se sont empressés, dès les premières heures, d'étudier les sciences des différentes sources : asiatiques, grecques et autres. C'est ce qui a permis l'izdihar. Et c'est lorsque, autour du quatorzième siècle de l'ère chrétienne, les musulmans ont fermé les portes de l'ijtihad que la communauté musulmane a commencé sa décadence. C'était alors les conflits internes pour l'accession au pouvoir, la répression des peuples et leur éloignement de toute source de pouvoir. Nous aborderons la question de l'organisation de l'économie en Islam dans la prochaine contribution.