Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
“Exclure les zaouaïas de l'espace politique désintéressé est un non-sens” LE Dr CHAÂLAL, PRéSIDENT DE L'UNION NATIONALE DES ZAOUAïA D'ALGERIE, À LIBERTE
Liberté : Vous êtes vous-même issu d'une zaouïa, Dr Chaâlal, celle de Sidi Benaouda. Peut-on vous qualifier de soufi ? Sentez-vous, en tout cas, une différence avec les autres ? Dr Chaâlal : Effectivement, je suis issu de la zaouïa Sidi Benaouda al-Chaâlal de Sougueur, mais mon appartenance à ce lieu de l'enseignement du Saint Coran, de la richesse spirituelle et de l'amour du prochain en Dieu ne m'accorde pas automatiquement la qualité de soufi. Votre question me renvoie inéluctablement vers la définition du soufi. Parmi les très nombreuses définitions du soufi, j'en retiens une seule, qui, à mon sens, inclut et couronne toutes les autres. Le soufi est le musulman qui cherche la vérité absolue en restant constamment dans la pauvreté pour Dieu. Cette définition dépouille le soufisme de toute appartenance systématique ou doctrinaire. Cependant, on peut être soufi, sans pour autant appartenir à une zaouïa, comme on peut être zaouï et privé par Dieu de la saveur soufie. Le cheikh Zarrouk, grand maître soufi, disait : “L'odeur du soufi parfume à distance, c'est-à-dire après sa mort.” Vous n'excluez pas, apparemment, que les zaouaïa puissent accéder à la fonction politique et jouer un rôle sur ce plan-là. Voulez-vous être plus explicite pour nos lecteurs ? Exclure les zaouaïa de l'espace politique désintéressé est un non-sens. Ce serait aussi une erreur, je crois, de considérer la zaouïa comme un coin pour autistes. La zaouïa, avec ses bonnes dispositions morales, est le lieu même de formation de tous les hommes de la connaissance et, parmi eux, les hommes politiques. Plus qu'un parti, elle éloigne l'homme politique de son ego, aplanit les obstacles qui s'opposent à sa stratégie et le met en communication avec la réalité. Les actions de la zaouïa se font discrètement pour ne pas humilier celui qui reçoit ses dons. Elle diffuse pieusement les paroles et les instructions de ses hommes “forts” et de ses chevaliers de la foi sans aucune ambition de prendre le pouvoir. Elle s'attache constamment à semer la culture des valeurs spirituelles pour récolter des faits matériels obligatoires à toute bonne gouvernance. L'origine du ribat est d'avoir assumé les ouvertures de l'Islam à l'époque des compagnons du Prophète (QSSSL). Doit-on aujourd'hui encore estimer que ce lien puisse exister ? Je présume que vous faites allusion à ma conférence sur le ribat donnée à Tlemcen en janvier 2010, à l'occasion du colloque sur Sidi Boumediene. Nul n'ignore que la zaouïa héritière du ribat est née en période de déclin de la civilisation musulmane. Elle a été fondée dans un but ultime de sauvegarder la parole divine, la tradition de son Prophète et d'entretenir la résistance du domaine musulman contre les croisades du Moyen-âge. Pour l'Algérie, la zaouïa a, durant plus de six siècles, accompli pleinement son devoir éducationnel, social, philanthropique et de protecteur de l'identité nationale par la résistance populaire. Aujourd'hui, elle arrive à la phase du renouvellement de ses structures, de ses modes d'action et de sa stratégie. Elle a besoin d'un algorithme nouveau. Pour les musulmans du monde entier, en quête de progrès par le retour au patrimoine musulman matériel et immatériel longtemps négligé, je leur dis, en ce qui concerne le patrimoine des zaouïas qu'une renaissance sur une charpente conçue pour la défense n'est que chimérique. Il convient alors, pour renaître “fort et capable” , de s'appuyer sur la soumission à Dieu (Islam), sur la grandeur de l'âme, sur le travail et sur le devoir de commander le bien et d'interdire le mal. À propos de la diffusion du fiqh et des prêches, ainsi que d'autres actions, envisagez-vous une nouvelle stratégie pour le soufisme ? La réponse à cette question demeure chez les spécialistes du fiqh et des prêches. Le conseil scientifique de l'Union nationale des zaouïas a déjà présenté plusieurs recommandations concernant ce domaine précis. Un mot sur l'Union nationale des zaouaïa ? Je vous envoie un mémorandum de l'Unza — Union nationale des zaouaïa d'Algérie — qui est une association à caractère socio-culturo-cultuel. Elle a été fondée le 16 juin 2003 à Sougueur, à l'occasion du colloque national : “Zaouïa, patrimoine et perspectives”, organisé par les descendants du cheikh Benaouda al-Chaâlal pour commémorer le 163e anniversaire de l'école Makhaldi de droit musulman (fiqh). Au terme de cette manifestation scientifique, une cellule de réflexion a été constituée en conformité avec les recommandations formulées par les membres fondateurs, avec pour mission de développer une stratégie d'action et d'informer et de regrouper l'ensemble des zaouïas d'Algérie.