Le ministre de la Santé rassure. La pharmacienne-chef du Centre Pierre-et-Marie-Curie (CHU Mustapha-Pache) le confirme. Les médicaments agissant dans le traitement du cancer, en rupture de stock, sont disponibles depuis une semaine. Les associations de cancéreux demeurent sceptiques. La disponibilité des produits d'oncologie n'est pas encore perceptible. Depuis la mi-août, date qui a marqué l'arrivée des premiers lots de médicaments manquants dans les officines et surtout dans les pharmacies d'hôpitaux, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière ne cesse de le répéter. La pénurie des 54 médicaments, indispensables dans la prise en charge thérapeutique de maladies chroniques, notamment les cancers, est jugulée sur au moins six mois. L'Etat a débloqué des sommes importantes — dix milliards de dinars pour être précis — pour permettre à la PCH (Pharmacie centrale des hôpitaux) d'importer en urgence les médicaments en rupture de stock, depuis plusieurs mois pour certains. À telle enseigne que les associations des malades chroniques sonnaient constamment l'alerte sur l'indisponibilité d'un produit ou d'un autre. La PCH s'est chargé d'approvisionner rapidement les structures hospitalières publiques. À ce titre, la pharmacienne-chef du Centre Pierre-et-Marie-Curie du CHU Mustapha-Pache, le Dr Nabchi, atteste que la situation, qui prévalait par le manque de 17 produits essentiels d'oncologie, s'est nettement améliorée. “Les médicaments sont disponibles en quantités suffisantes, depuis une semaine. Nous avons même reçu l'Herceptine (première thérapie ciblée dans le cancer du sein qui, associée à la chimiothérapie, augmente le taux de survie des malades, ndlr), sur lequel pesait une grande tension”, affirme notre interlocutrice. “Le ministre a réglé la majorité des problèmes. Nous avons commencé à prendre en charge les nouveaux cas, car le traitement est disponible”, poursuit Dr Nabchi. Du côté des malades ou des associations qui les représentent, la sortie de crise n'est pas encore tout à fait visible. “Nous n'avons malheureusement aucune information officielle sur les médicaments anticancéreux en arrivage. Où sont-ils ? Au niveau de la PCH ? Dans les pharmacies des hôpitaux ? En tant qu'association, nous aurions voulu rassurer avec plus de fermeté et d'assurance les personnes désespérées qui nous sollicitent et attendent une lueur d'espoir de notre part”, témoignent Mme Hamida Kettab et Mme Fazilett Dif, coordinatrices de l'association El-Amel. Au-delà de son actualité, la pénurie des médicaments contre le cancer est, selon nos deux interlocutrices, “un problème récurrent et profond puisqu'il dure depuis des années ! C'est ce qui nous fait dire qu'il s'agit d'aller au fond du problème pour régler les dysfonctionnement structurels qui causent les ruptures de médicaments et autres problèmes de prise en charge”. Elles sont rejointes dans cet avis, par des responsables dans divers organismes de pharmaciens, comme le Snapo (Syndicat national des pharmaciens d'officines) et l'Unop (Union nationale des opérateurs pharmaceutiques), qui estiment important de ne pas se limiter à des solutions conjoncturelles, voire ponctuelles, mais qu'il sied de réorganiser complètement le secteur du médicament. Jusqu'alors, les mesures officielles ne plaident pas en faveur d'un changement positif. Déjà, l'instauration par la loi de finances complémentaire 2009, du crédit documentaire comme moyen exclusif de paiement des importations, y compris celles des médicaments, est en grande partie responsable de la pénurie des produits pharmaceutiques. Autres contraintes posées, la limitation des volumes des importations imposée aux laboratoires et le gel de l'enregistrement des nouveaux produits. à ce propos, le ministre de tutelle a déclaré que désormais ne seront importés que les médicaments qui ne peuvent pas être fabriqués localement. Il a affirmé, par ailleurs, que sur les 121 médicaments signalés manquants sur le marché national, uniquement 54 l'étaient réellement. “Ils ne sont pas disponibles sous leur nom commercial, mais ils le sont sous forme de génériques”, soutient-il.