L'Algérie du football bascule en mode professionnel. Dans le but évident de mettre fin à l'ère de l'amateurisme de bon aloi dans lequel végétait le football national depuis déjà assez longtemps, les instances qui gèrent les compétitions estampillées DZ ont ainsi instauré le tout nouveau championnat professionnel avec ses deux niveaux. Objectif : mettre fin à l'anarchie pénalisante qui régissait les lois d'un marché interne non producteur et depuis quelques années déjà non exportateur de talents. Voulant mettre à profit le retour à la mode du football algérien dans le concert international des nations à la faveur de l'inoubliable épopée des Verts lors des éliminatoires jumelées du Mondial et de la CAN-2010 ainsi que les participations, certes, mitigées mais toujours énergisantes dans les deux compétitions majeures précitées, la FAF, en étroite collaboration avec une LNF rebaptisée LFP, a ainsi promulgué une batterie de mesures à laquelle ont dû se soumettre, non sans mal, les clubs-acteurs du championnat national avec ses deux paliers pour mériter le qualificatif de professionnel qui s'érigera désormais, non pas en simple appellation bonne seulement à apparaître sur les documents officiels à en-tête, mais plutôt en nouveau mode de vie. Pour la postérité, c'est le 12 juillet 2010 que la FAF et la LNF ont rendu public le fameux cahier des charges relatif aux obligations techniques devant être souscrites par les clubs éligibles au professionnalisme. La date-butoir pour la mise en conformité a d'ailleurs maintes fois été décalée afin de permettre aux clubs concernés de prendre les mesures utiles et nécessaires à l'application des dispositions de ce même cahier des charges. Puisant son origine de quatre ordonnances gouvernementales, dix lois républicaines, deux décrets exécutifs, un arrêté ministériel et les résolutions d'un conseil interministériel, ce cahier des charges, adopté après délibérations par le conseil fédéral s'articule, en fait, autour de trente-cinq articles répartis en neuf chapitres : dispositions générales (3 articles), conditions et obligations en matière d'encadrement sportif et technique, de joueurs et de dirigeants (4 articles), conditions et obligations en matière d'installations sportives et de formation (5 articles), conditions et obligations en matière financière et comptable (5 articles), conditions et obligations en matière sécuritaire (4 articles), conditions et obligations en matière d'encadrement des supporters (2 articles), conditions et obligations vis-à-vis de l'administration chargée des sports, de la Fédération algérienne de football et de la Ligue du football professionnel (4 articles), conditions et obligations en matière de relations de travail et de règlement intérieur (5 articles) et, enfin, conditions et obligations en matière d'organisation structurelle (3 articles). Un cahier des charges qui ne laisse rien au hasard On l'aura bien compris, rien n'a été laissé au hasard. Et les clubs qui désiraient se fondre dans le moule et faire partie du premier championnat professionnel, ont ainsi été contraints de revoir leur mode de fonctionnement selon le nouveau modèle. N'y étant pas totalement préparés, beaucoup de clubs, anciennement appelés clubs sportifs non amateurs et régis dorénavant par les règles de sociétés par actions (sportives, commerciales ou simplement à but lucratif), ont éprouvé mille et une difficultés pour se conformer à cet exigeant cahier des charges qui présente bien des particularités. Ainsi, dans le registre “nouveautés”, les clubs seront dorénavant obligés de déclarer les personnes chargées de l'encadrement technique et médical auprès de l'administration fiscale et des organismes d'assurances sociales et de retraite, de disposer d'un directeur technique justifiant des qualifications requises, de souscrire des assurances pour l'encadrement sportif technique et médical mais également, grande innovation, de disposer de psychologues. Libres par le passé de dicter à leurs futurs clubs employeurs des clauses qui leur semblaient adéquates et avantageuses dans leurs contrats, les joueurs seront, désormais, pour leur part, tenus de s'engager selon le nouveau statut du joueur fixé par la FAF. En contrepartie, le club se doit de déclarer ses joueurs auprès de l'administration fiscale et des organismes d'assurances sociales et de retraite et de leur transmettre conformément aux procédures et dispositions législatives, et réglementaires en vigueur, les déclarations des salaires, ainsi qu'à la FAF et à la LFP. Toujours en matière de “nouveautés”, les clubs seront tenus, à l'orée de la saison, de transmettre à leur tutelle la liste nominative de leur équipe dirigeante composée d'un président-directeur général, d'un président du conseil d'administration, d'un directeur général ou manager, d'un président du directoire, d'un président du conseil de surveillance, de membres du directoire ou du conseil de surveillance, des administrateurs désignés et du gérant de société. Plus de ch'kara, place aux virements bancaires ! Mais la grande innovation intervient surtout dans le mode de paiement et de rémunération. Habitués à percevoir leur argent cash, en liquide, dans des sachets et en tranches, les joueurs, désormais professionnels, doivent apprendre à connaître les particularités des services bancaires car, comme le stipule clairement le cahier des charges, les clubs sont obligés de régler toutes opérations financières par chèque ou virement vu qu'ils sont tenus de s'interdire la manipulation d'espèces sauf pour des régies nécessaires aux menues dépenses conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur prévues en la matière. En des termes plus clairs, la ch'kara sera bannie pour laisser place à des virements de salaires mensuels ! Faisant la part belle au volet formation et infrastructures, le nouveau code de la route du modèle professionnel algérien impose, par ailleurs, aux clubs de justifier, par tout document légal, de la jouissance permanente ou partielle d'une installation sportive, de souscrire aux contrats d'assurances obligatoires aux installations recevant du public, de disposer d'une installation de vidéo surveillance et de disposer au sein de l'installation sportive d'un système d'éclairage approprié pour permettre le déroulement des rencontres en nocturne et leur retransmission télévisuelle, tout en s'engageant à établir une feuille de recettes à l'occasion de chaque rencontre, ce document devant mentionner toutes les places vendues et faire apparaître les recettes brutes. En parallèle à la création d'un comité de supporters, le club sportif professionnel doit aussi disposer d'un centre de formation ou à défaut de s'engager à en créer un dans un délai de trois ans. Tout un programme !