Le président français, Nicolas Sarkozy, affrontait, hier, une journée test de grèves et de manifestations massives contre sa réforme des retraites, projet majeur de la fin de son mandat, alors qu'il est affaibli dans l'opinion dans un climat de scandales et de grogne générale. Les principaux dirigeants syndicaux tablent sur une mobilisation plus importante que lors de la précédente journée d'action. Le 24 juin, entre 800 000 personnes, selon la police, et 2 millions, selon les syndicats, avaient défilé dans les rues. À Paris, la manifestation aura lieu dans l'après-midi. “On voit bien que les salariés sont mobilisés”, a déclaré le dirigeant du syndicat CFDT (réformiste), François Chérèque, sur la radio RTL, ajoutant que la journée se présente “comme une réussite”. Hier matin, les grèves provoquaient d'importantes perturbations dans les transports ferroviaire, urbain et aérien. Deux trains à grande vitesse (TGV) sur cinq circulaient, le trafic était perturbé dans le métro parisien, et dans les principaux aéroports du pays. Dans l'éducation, plus de 30% des enseignants du primaire devaient faire grève. L'activité était réduite ou annulée dans de nombreuses écoles. Si les mouvements de grève devaient être forts dans le secteur public, bastion traditionnel des syndicats français, des débrayages devaient aussi se produire dans le secteur privé, comme l'automobile, les banques ou l'énergie. La réforme, considérée par Nicolas Sarkozy comme une “priorité absolue”, prévoit de repousser l'âge légal de la retraite (celui à partir duquel un salarié peut toucher sa pension s'il a cotisé le nombre d'années requises) de 60 à 62 ans d'ici 2018, revenant sur un acquis social des années Mitterrand. Cette journée d'action, la troisième de l'année, coïncide avec le début des débats à l'Assemblée nationale où la gauche entend ferrailler contre le texte qui sera défendu par le ministre du Travail, Eric Woerth, affaibli par une affaire de conflits d'intérêt liée à la femme la plus riche de France, Liliane Bettencourt, héritière du groupe l'Oréal. La gauche juge le recul de l'âge de départ à 62 ans, injuste pour les salariés ayant commencé à travailler tôt et exercé des emplois pénibles. “Les 60 ans, c'est une question de justice”, a répété, mardi, la numéro un du Parti socialiste, Martine Aubry, dans le quotidien Le Parisien. Selon les sondages, une majorité de Français approuvent cette mobilisation, tout en considérant la réforme inéluctable. Les syndicats ont prévenu, mardi, qu'il y aurait des suites à leur journée d'action, en l'absence de concessions. Mais Nicolas Sarkozy a déjà fait savoir qu'il serait inflexible “sur le fond” (les 62 ans), même si des négociations sont possibles sur les emplois pénibles ou les carrières longues. Confronté à l'augmentation du nombre des retraités, le gouvernement considère que faire travailler les Français plus longtemps, à l'instar de leurs voisins européens, est la meilleure option pour assurer des besoins de financement estimés à 70 milliards d'euros d'ici 2030. “C'est la seule attitude possible”, affirme au Figaro Jean-François Copé, le chef des députés du parti présidentiel UMP. Au plus bas dans les sondages, Nicolas Sarkozy compte sur cette réforme pour rétablir son autorité dans son camp tiraillé à l'approche d'un remaniement gouvernemental prévu à l'automne et de la présidentielle de 2012. Depuis des mois, le gouvernement est plombé par une succession d'affaires, en particulier les rebondissements quasi quotidiens du scandale politico-fiscal Bettencourt, et il est confronté à une conjoncture économique morose. Renouant pendant l'été avec un thème ayant participé à son succès en 2007, le président avait annoncé, fin juillet, un durcissement de sa politique sécuritaire, mais il a suscité l'indignation en France et l'inquiétude à l'étranger.