Simple hasard de calendrier ou sciemment calculé, c'est au moment où l'on célébrait le 4e anniversaire de la promulgation de la loi sur la concorde civile qu'une réunion africaine sur le terrorisme et le crime organisé se tient à Alger à l'initiative de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN) et sous l'égide d'Interpol. Une occasion pour le patron de la police, Ali Tounsi, de revenir sur divers aspects de la situation sécuritaire, même si, le plus souvent, ses propos péchaient par absence de détails et de précisions. Lors d'une conférence de presse organisée en marge de cette rencontre, Tounsi se contentait de réponses expéditives aux nombreuses questions des journalistes présents. Harcèlement contre la presse : “Je n'en pense rien.” Aussi paradoxal que cela puisse paraître, au moment même où Tounsi feignait ignorer la cabale contre la presse, des confrères ont été arrêtés devant le commissariat central. À la question de savoir ce que pensait le patron de la DGSN du harcèlement subi depuis quelques semaines par les journalistes, Tounsi a eu cette réponse laconique : “Je n'y pense rien. Nous sommes des auxiliaires de la justice. Quand on reçoit un ordre, on l'exécute.” Arrestation de Ali Benhadj : “Il a défié la loi.” Interrogé sur l'arrestation de Ali Benhadj récemment par les services de police, Ali Tounsi a indiqué que l'ex-numéro deux du parti dissous a transgressé la loi. “Des interdictions légales lui ont été notifiées après avoir purgé sa peine. Ali Benhadj a défié la loi”, a-t-il expliqué. Selon lui, il a organisé des attroupements. Toutefois, Tounsi a estimé que cela ne risquerait pas d'être réédité. “Je ne pense pas qu'il va récidiver”, a-t-il dit. Terroristes en activité : “On n'a pas de chiffres.” Alors que le général de corps d'armée, Mohamed Lamari, à la faveur d'un entretien accordé au quotidien qatari Al Ahram en juin dernier, estimait le nombre des terroristes en activité à quelque 700 éléments, tout en précisant que 220 jeunes parmi les repentis ont rejoint les maquis du GSPC, Ali Tounsi affirme que l'organisme qu'il dirige ne dispose pas de chiffres. “Nous n'avons pas de chiffres de ceux qui restent dans le maquis. Mais, ils ne sont pas nombreux. Ils sont dans un état psychologique qui ne leur permet pas de se repentir. Par contre, on connaît le nombre de repentis et des terroristes abattus”, a-t-il affirmé. Dans ce contexte, il a indiqué qu'il y a quelques semaines, plus de trente repentis se sont rendus aux autorités. “Les terroristes ne s'approvisionnent pas facilement en armes. Ce qui leur fait défaut, ce sont les armes, mais aussi l'état psychologique.” Mais, il a infirmé implicitement les informations rapportées par la presse et selon lesquelles de nombreux repentis auraient repris le chemin du maquis. “Dans une wilaya du pays, il y a quelques semaines, 15 personnes avaient rejoint le maquis. Après une semaine seulement, 7 se sont repentis avant d'être rejoints par 5 autres, quelques jours plus tard. On leur a promis des femmes et de l'argent, mais ils n'ont rien trouvé”, a-t-il commenté. Tounsi n'a pas jugé utile de préciser le nom de la wilaya, ni de donner le nombre de repentis enregistré depuis la promulgation de la loi sur la concorde civile. Une loi dont le bilan est jugé par le patron de la police “positif”. Tout comme il s'est contenté de rappeler qu'en matière de lutte contre le terrorisme, “ce qui intéresse la police, c'est la réaction de la société civile”. “Nous, on presse les terroristes mais, pour autre chose, c'est du ressort de la justice”, a-t-il dit. Touristes libérés : “Il y a eu des interférences politiques.” Ayant défrayé la chronique depuis de longs mois, la question des touristes disparus dans le désert a été l'un des points forts sur lesquels s'est exprimé Ali Tounsi. En dépit du fait qu'il ait rappelé que les conventions internationales interdisent le payement de rançon, le patron de la DGSN a concédé que “la question est politique et dépasse les compétences de la police”. “Je sais qu'il y a eu des tractations pour une opération, mais il y a eu des interférences politiques”, a-t-il expliqué. Toutefois, a-t-il ajouté, les enquêtes continuent pour traquer les auteurs du rapt. “Des mesures sont prises. La preuve, il n'y a pas eu de réédition”, a-t-il dit. Cependant, Tounsi s'est refusé de révéler le contenu de la démarche. “Nous sommes en guerre contre le terrorisme. On ne va tout de même pas vous dire ce qu'on fait. L'enquête continue, en collaboration avec d'autres parties. Mais on leur prépare quelque chose d'intéressant”, s'est-il contenté de répondre. Abdelmoumène Khalifa : “C'est l'affaire de la justice.” À propos du mandat d'arrêt lancé contre Abdelmoumène Khalifa et une éventuelle demande d'extradition, Tounsi s'est limité à rappeler que les poursuites contre le patron du groupe éponyme ont été initiées par le ministre de la Justice. De même, concernant le sinistre Belmokhtar. Par ailleurs, le patron de la DGSN a indiqué que l'Algérie est jugée “très coopérative” par Interpol dans la lutte menée contre le terrorisme. Il n'a pas manqué également de rappeler que c'est grâce aux efforts de l'Algérie qu'Interpol a créé un groupe de lutte antiterroriste, il y a trois ans seulement. “Avant, elle considérait le terrorisme comme politique”, a-t-il dit. Sur un autre registre, il a précisé qu'aujourd'hui, il y a des preuves établies sur l'interconnexion entre le terrorisme et certains groupes mafieux. K. K.