On le connaissait journaliste, écrivain et surtout poète. Son œuvre, malheureusement, n'a pas beaucoup été étudiée. Hormis quelques travaux dirigés et des lectures de ses livres. Samedi dernier, au siège à la librairie Chihab, Rachid Mokhtari a animé une rencontre-débat à l'occasion de la sortie, chez cet éditeur, de son nouveau livre – un essai – intitulé Tahar Djaout, un écrivain pérenne. L'auteur, dans un premier temps, a voulu expliquer pourquoi il a écrit cet essai basé sur quelques travaux précédents, et à travers lequel il tente ou propose une relecture de l'œuvre romanesque de Tahar Djaout : l'Exproprié (Sned 1981), les Chercheurs d'os (Seuil 1984), l'Invention du désert (Seuil 1987), les Rets de l'oiseleur (Enal 1984), les Vigiles (Seuil 1991) et enfin son roman posthume le Dernier été de la raison (Seuil 1999). Parmi les raisons qui ont poussé Rachid Mokhtari à se pencher sur l'œuvre romanesque de Tahar Djaout, on peut citer : trois de ses romans constituent une trilogie, et le fait que son écriture ne véhicule pas un discours politique ni idéologique. À propos du premier point, l'intervenant a déclaré que les Chercheurs d'os, les Vigiles et le Dernier été de la raison constituent la trilogie djaoutienne. Selon l'orateur, les personnages principaux de ces œuvres peuvent être un seul personnage qui a évolué avec le temps mais aussi à travers l'écriture de Tahar Djaout. L'autre fait cité par R. Mokhtari et qui n'est pas de moindre taille, c'est que l'œuvre romanesque de Djaout n'est pas empreinte d'un discours politique et/ou idéologique. Certes, lui ne nie pas que la réalité sociale, économique et politique qu'a vécue l'Algérie à son époque soit très présente dans ses écrits, sans toutefois être politisée. Cet état de fait a une explication : la maîtrise de la langue française par Djaout et surtout l'aisance qu'il avait à “triturer” les mots. Au fil de la discussion, d'autres points ont été évoqués par l'intervenant concernant le style romanesque de Djaout. Grâce à cette aisance de la langue, ce dernier avait cette capacité, dans ses romans, de “détourner les mythes et les icônes” historiques. Sans les rabaisser ou les réduire, il les réinventait, les projetait hors de leur contexte historique. Deux autres faits ont été relevés également par Rachid Mokhtari : le retour à l'enfance. Dans toute l'œuvre romanesque, Tahar Djaout consacre un passage à l'enfance dans ses livres. À travers les souvenirs de ses personnages. Un retour au commencement, pour insuffler un nouvel élan, à l'histoire, la faire rebondir. L'autre détail relevé par l'intervenant est la présence dans l'œuvre djaoutienne des éléments cosmiques : la terre, l'air et l'eau. C'est l'un des rares auteurs algériens à créer une osmose entre ses personnages et la nature qu'il décrivait avec détails et précision. Presque 20 ans après sa disparition, Tahar Dajout n'arrête pas de surprendre par ses écrits, qui sont, comme l'a signalé Rachid Mokhtari, annonciateurs de ce qui allait arriver, car Dajout a été le témoin de sa société et il en a parlé dans ses romans.