Finalement, et à entendre le ministre de l'Energie et des mines, l'Algérie n'est ni pour ni contre Desertec. Pourtant, le président de la République a bien dit, à Berlin, que les deux pays, l'Algérie et l'Allemagne, collaborent “dans les énergies nouvelles à travers un projet colossal que nous allons approfondir d'un commun accord”. Mais en quoi le fait que Desertec “n'a rien à voir avec un projet de gouvernement” et qu'il s'agit “d'une idée d'industriels”, comme l'explique Youcef Yousfi, nous dispense d'une position ? Le gouvernement semble refaire le chemin inverse que celui qu'il a pris du temps de Chakib Khelil. Celui-ci déclarait en juillet 2009 : “Les conditions sont tout d'abord qu'il y ait le partenariat entre les sociétés algériennes et étrangères et qu'il y ait un transfert de technologie concernant l'engineering, les équipements, les matériels et la construction”, avant d'ajouter : “Nous ne nous voulons pas d'entreprises étrangères qui exploitent le solaire à partir de chez nous”. En octobre, il revenait de son scepticisme : “Nous sommes prêts à discuter du projet Desertec”, tempérant ainsi son engagement : “Mais où trouver trente milliards d'euros (la part théorique d'investissement national) ?” Un semestre après sa présentation, l'Algérie n'a finalement toujours pas de point de vue sur ce concept qui, en gros, s'attelle à promouvoir un projet de réseau de centrale solaire thermique en Afrique du Nord. Ce qui n'étonne pas, puisque, depuis son indépendance, le pays n'a pu établir une politique en matière d'énergie nucléaire. Pourtant, le centre de recherche nucléaire date du lendemain de l'Indépendance et le premier réacteur nucléaire à été installé en 1989 et un second en 1993. Aux dernières nouvelles, et si on se décidait, l'Algérie pourrait se doter d'une centrale nucléaire d'ici une douzaine d'années, mais nous en sommes encore à évaluer notre potentiel d'uranium. Même en matière d'énergies fossiles, nos dirigeants ont souvent oscillé, dans le discours du moins, entre l'économie des réserves et leur exploitation intensive. Depuis que le pouvoir a adopté cette espèce de stratégie de développement par la dépense, l'exploration se fait plus frénétique : en 2009, le rythme s'est accru de 40% ! Et comme pour appuyer cette option pour le pompage du sous-sol, Yousfi vient d'annoncer que l'Algérie pourrait se remettre à ouvrir des mines de charbon. L'intention correspond bien à la politique “au jour le jour” qui consiste à puiser tout ce qui peut être pompé et qui fait de la stratégie de l'après-pétrole un simple exercice de style. Jusqu'ici, l'énergie n'a constitué que l'objet d'une politique commerciale et budgétaire. À moins que le plan énergétique attendu de la réunion du gouvernement d'aujourd'hui ne vienne enfin inaugurer une politique énergétique. M. H. [email protected]