La hausse des produits de première nécessité, qui a suscité la colère légitime des citoyens, tient la route, mais les coupables sont à rechercher, plutôt, du côté des gouvernants, loin des aspirations et de la mal-vie des Algériens. Comparer les dernières folles nuits d'Alger et de certaines régions du pays à Octobre 88 relèverait purement de l'hérésie pour les raisons suivantes. D'abord, par l'absence d'un quelconque embryon idéologique qui avait servi, il y a 23 ans, de détonateur dévastateur. Ensuite, les slogans des manifestants, et non des émeutiers, restaient à hauteur de revendications légitimes, axées sur une érosion hallucinante du pouvoir d'achat. Par d'autres aspects, les jeunes qui ont sillonné les rues ont voulu donner une leçon à leurs aînés qui n'ont pas su ou pu engranger le mouvement de 88, dévoyé et ensuite récupéré. Comme les géniteurs de ces derniers, rendus coupables de collaboration avec le système du parti unique. Et la question est : est-ce que le système a changé depuis ? Assurément non. Comme ces évènements ne peuvent pas être considérés comme “un chahut de gamins” ou pire, être mis sur le compte de “la main étrangère”. Le pouvoir s'est contenté de se murer dans un autisme qui l'arrangeait jusqu'à ce que le fil régénérateur montre des signes d'essoufflement. Le mécontentement de la base n'est, en fait, que le baromètre de ce qui se passe au sommet : la lutte pour la succession. Le prétexte de la hausse des produits de première nécessité qui a suscité la colère légitime des citoyens tient la route, mais les coupables sont à rechercher, plutôt, du côté des gouvernants, loin des aspirations et de la mal-vie des Algériens. C'est la récolte de ce qui a été semé. Et c'est aux gouvernants d'en assumer l'entière responsabilité. Cinq jours après, on s'entête à positionner les marches et les cris de colère sur un plan technique : un dérèglement du marché, ce qui est aussi vrai. Il n'en demeure pas que le mal est plus profond et consiste au respect du citoyen qui n'est plus un immature et qui se situe avant ses dirigeants dans une avant-garde d'ouverture. Le bas de laine de 150 milliards de dollars qu'on brandit comme un trophée de réussite n'est que de pacotille, s'il n'est pas utilisé à bon escient ; au profit de toute la population. Et si l'Etat, dès le début, avait entrepris la guerre contre le marché informel, mamelle du blanchiment d'argent, avant qu'il ne devienne une véritable hydre avec des ramifications insoupçonnées, on n'en serait pas arrivé à cette révolte des jeunes, jusqu'ici traités comme des laissés-pour-compte et qui, aujourd'hui, veulent leur part de ce pays. O. A. [email protected]