Temps de chien, c'est l'histoire de Mboudjak, un chien qui vit dans les bas-fonds de Yaoundé (appelée également Madagascar, au Cameroun) et qui raconte avec dégoût et mépris le quotidien de son maître, Massa-Yo, et des voisins de celui-ci. Afin de raconter objectivement la complexité de l'homme, et d'en saisir tous les contours et autres aspects obscurs de sa personnalité, entre lâcheté, bassesse et mesquinerie, Patrice Nganang, écrivain camerounais, a choisi pour son roman, Temps de chien, un chien comme narrateur. À travers le regard objectif de Mboudjak, l'auteur présente le portrait d'un peuple meurtri, blessé et engouffré dans la précarité. Les déboires et meurtrissures de son peuple sont au centre de ce roman, publié en octobre dernier par les éditions algériennes Apic, dans la collection Résonances.Temps de chien, c'est l'histoire de Mboudjak, un chien qui vit dans les bas-fonds de Yaoundé — appelé également Madagascar — (Cameroun) et qui raconte avec dégoût et mépris le quotidien de son maître, Massa-Yo, et des voisins de celui-ci. Pour Mboudjak, considéré comme un animal répugnant, l'une des plus grandes insultes pour un être vivant, c'est d'être “un homme”. Le maître, Massa-Yo, ancien cadre, s'est retrouvé du jour au lendemain sans travail. Sa vie sociale s'est transformée et son rapport au monde également. Massa-Yo s'est retourné contre son “fidèle compagnon”, en le maltraitant dans le but d'extérioriser ses frustrations. Mais au lieu de prendre la fuite, Mboudjak est resté, non par amour pour son maître mais parce qu'il savait qu'il ne trouverait sa place nulle part ailleurs. Il passe ses soirées dans le bar de son maître, appelé “le Client est roi”, tout en s'occupant à contempler les hommes, envahi par un sentiment d'incomplétude. Au Client est roi, Mboudjak, le narrateur, décrit les vices, l'hypocrisie, l'égoïsme… les tares de l'humanité qui privent les habitués de ce bar du côté noble et beau de leur humanité. D'après cet observateur impartial, dont l'ironie et l'humour noir ne font aucunement défaut, ces hommes illustrent parfaitement le dérèglement du monde. Son regard dresse également un tableau noir de la société camerounaise qui a cédé à la déchéance et l'aliénation. Ce qui a engendré de graves problèmes sociaux, notamment la corruption et la prostitution. Dans ses pérégrinations mentales, Mboudjak, chien méprisant de la race humaine, constate la complexité de l'homme, si égocentrique et tourné vers lui-même, et accouche au gré de ses envolées lyriques de cette sentence : “Le chien est le meilleur ami de l'homme mais l'homme est un loup pour l'homme.” Par ailleurs, même si Temps de chien est une fiction romanesque, elle n'en demeure pas moins un regard objectif sur la société camerounaise actuelle. Outre l'originalité de l'histoire, Patrice Nganang dénonce l'injustice qui sévit dans la plupart des pays africains. Les droits de l'homme sont bafoués la plupart du temps et les sociétés n'en finissent pas de muter jusqu'à revenir à leur point de départ. Patrice Nganang réussit à retranscrire les maux de son peuple, ainsi que ses souffrances et son désarroi face à une politique qui le tue par doses homéopathiques. Cependant, malgré un sens aiguisé de l'ironie, un grand effort imaginatif, et une écriture chaleureuse et accessible à tous, le roman manque d'action, notamment vers les dernières pages. Il est à noter que Temps de chien a été édité en 2001 par les éditions Le Serpent à Plume (France) et qu'il a reçu le prix Marguerite Yourcenar ainsi que le prestigieux prix de l'Afrique noire en 2003. Temps de chien, de Patrice Nganang, roman, 364 pages, éditions Apic, Algérie, octobre 2010, 600 DA.