Malgré l'impressionnant dispositif de sécurité, le mouvement de contestation s'est renouvelé hier en égypte, où les forces de police ont fait usage de gaz lacrymogènes, de balles, réelles et en caoutchouc, pour disperser les dizaines de milliers de manifestants, en vain. Un couvre-feu a été décrété au Caire, à Alexandrie et à Suez. Le Caire, Alexandrie, Mansoura, El-Menia, Suez, Ismaïlia et d'autres villes égyptiennes ont été secouées, hier, et pour le quatrième jour consécutif, par de nouvelles manifestations contre le régime de Hosni Moubarak, en dépit d'un déploiement massif des forces de sécurité, particulièrement dans la capitale. Très violents, les affrontements avec les forces de l'ordre auraient fait un mort et plusieurs blessés. La veille, un communiqué du ministère égyptien de l'Intérieur a averti qu'il allait prendre “des mesures décisives” contre les manifestants. Pensant réduire l'importance des manifestations, les autorités égyptiennes ont coupé Internet et bloqué l'usage des messages courts des téléphones mobiles, qui ont été largement utilisés pour appeler les rassemblements par le Mouvement du 6 avril, un groupe de jeunes pro-démocratie inspirés de la Révolution du Jasmin de Tunisie. Dès la fin de la prière hebdomadaire du vendredi, des accrochages ont éclaté entre policiers et manifestants devant une mosquée du Caire, en présence de l'opposant le plus en vue, Mohamed El-Baradei, parmi 2 000 autres fidèles. “à bas Hosni Moubarak”, scandaient les manifestants devant M. El-Baradei qui s'est dit prêt à mener la transition au régime de M. Moubarak. Les manifestants scandaient : “Le peuple veut la chute du régime”, salués par de nombreux habitants qui regardaient sans manifester. L'ancien directeur de l'AIEA aurait été placé en résidence surveillée, selon des sources sécuritaires égyptiennes. Peu à peu, les manifestations contre le régime du président égyptien Hosni Moubarak se sont étendues à travers tout Le Caire en début d'après-midi, obligeant l'armée à déployer ses blindés dans la ville. Des dizaines de milliers d'égyptiens sont descendus dans les rues de nombreuses villes pour demander le départ du raïs, l'acculant, en sa qualité de gouverneur militaire également de l'égypte, à décréter un couvre-feu de 18h à 7h. Il faut croire qu'il n'a guère été respecté après son entrée en vigueur. Les rues du Caire étaient submergées de monde. à Alexandrie, la deuxième ville d'égypte, la police a tiré des gaz lacrymogènes et des balles caoutchoutées pour disperser les 4 000 à 5 000 manifestants antirégime rassemblés après la prière dans une mosquée proche de la gare routière de Raml. Devant la masse de plus en plus nombreuse, les forces de sécurité se sont retirées, laissant le contrôle de la rue aux manifestants. à Mansoura, dans le delta du Nil, plusieurs centaines de personnes ont manifesté, scandant “à bas Moubarak” à l'issue de la prière dans la mosquée Al-Salam, dans le centre de la ville. Certains imams de la ville ont appelé dans leurs prêches à “sortir dans la rue et à demander le changement”. Les forces de sécurité, dont le nombre dépassait celui des manifestants, ont tiré des gaz lacrymogènes pour disperser la foule qui criait également : “Le peuple veut la chute du régime.” Plusieurs sièges du Parti national démocrate (PND), au pouvoir, y compris celui du Caire, ont été incendiés par les manifestants. Pour rappel, les trois derniers jours, les manifestations ont été violentes, les protestataires lançant des pierres et des bouteilles incendiaires contre les bâtiments officiels et les policiers qui ripostaient par des gaz lacrymogènes, des balles caoutchoutées et aussi des pierres. Jeudi soir, dans le nord du Sinaï, même des roquettes antichars ont été utilisées contre la police mais sans la toucher. à Suez (nord-est), des manifestants ont mis le feu à une caserne de pompiers après avoir lancé des cocktails Molotov sur la police. Les arrestations s'élevaient à plusieurs dizaines dans les rangs des “frères musulmans”, qui ont soutenu avec force ce mouvement insurrectionnel. à signaler cette image diffusée par la chaîne Al-Jazeera d'un véhicule blindé de l'armée rallié aux manifestants et salué par une foule enthousiaste. Il était impossible de savoir s'il s'agissait d'un événement isolé ou du début d'un basculement possible plus large. Réagissant à cette flambée de violence, les états-Unis jugent les évènements “profondément inquiétants”, appelant à “respecter les droits fondamentaux, éviter la violence, et permettre les communications”. Hillary Clinton a appelé, de son côté, Moubarak à accélérer les réformes politiques et sociales. à noter que la coupure d'Internet a conduit au blocage du site Internet de la Fédération internationale de handball (IHF), présidée par l'égyptien Hassan Mustafa, qui était inaccessible hier, jour des demi-finales du Mondial-2011 en Suède. L'IHF est basée à Bâle, en Suisse, mais le serveur de son site est hébergé en égypte, pays d'origine de son président.