“La société civile et violence comme forme d'expression. Pour quelle médiation ?” est le thème débattu, hier, à la maison des droits de l'Homme de Béjaïa. Une rencontre, initiée par le bureau de Béjaïa de la ligue des droits de l'Homme, tendance Me Zehouane. Le débat, franc, a été vif par moment. Et pour cause ! La notion de société civile demeure, comme l'a rappelé à juste titre, M. Kamel Aïssat, l'ancien coordinateur local du Cnes et modérateur du débat, “une des notions les plus ambigües du débat politique actuel”. Avant de passer la parole aux délégués, représentant quelque 20 associations, M. Aïssat a fait “l'histoire du mot” : société civile, qui a présentement deux interprétations. Pour les uns, la société civile se définit par opposition à l'état. Pour d'autres, la société civile ne serait pas le simple envers de l'état mais au contraire “le lieu où le privé et le public s'interpénètrent”. Ces derniers récusent l'opposition manichéenne entre l'état et la société civile à l'état et pensent “qu'il y a de l'autorité, de l'institution, de la loi dans la société civile elle-même”. Bien que la naissance de la société civile remonte à l'époque romaine, Hobbes (auteur du XVIIe) serait peut-être son inventeur. Il est en tout cas le premier à opposer la société civile à un autre néologisme, “l'état de nature”, termes qui connaitront l'un et l'autre une large diffusion. De cette évolution, deux versions nouvelles de la société civile prennent naissance au XIXè siècle, a indiqué M. Aïssat. L'une d'inspiration libérale (inspirée par les idées libérales de Benjamin Constant), présente une société civile autonome. L'autre version, hégélienne puis marxiste, s'appuie sur les deux principales caractéristiques de la société civile dégagée à la fin du XVIIIe siècle : société économique et société conflictuelle. Séparée de l'état par Hegel et Constant, identifiée à la société bourgeoise par Marx, puis réinsérée dans la sphère des superstructures par Gramsci, la notion de société civile semble se diluer, a poursuivi l'ancien coordinateur du Cnes à Béjaïa, en une multitude de significations, sans qu'une logique quelconque semble relier entre eux les divers usages de la notion. Et à trop parler de société civile en des sens si divers — et même contradictoires —, on finit par ne plus savoir de quoi on parle, a souligné M. Aïssat. Il ne croyait pas si bien dire. On en a eu la parfaite illustration lors des débats d'où les multiples recadrages et mises au point du responsable local de la ligue, M. Saïd Salhi.