Porte-parole du mouvement Justice et bienfaisance, Nadia Yacine, fille du fondateur de l'association, qui possède une grande capacité de mobilisation, voit dans le calme régnant au Maroc comme “le silence qui précède la tempête”, et estime que “le basculement démocratique se fera de gré ou de force”. Dans un entretien accordé au journal espagnol El Pais, Nadia Yacine, “la fille du maître à penser de la puissante association Justice et bienfaisance”, ne partage guère le point de vue du gouvernement marocain, qui croit que “le pays est à l'abri d'une révolte similaire à celles vécues par la Tunisie et l'Egypte actuellement”. Elle pense que “le calme apparent au Maroc est peut-être le silence qui précède la tempête”, et estime que “le basculement démocratique se fera de gré ou de force”. Dans une interview au quotidien madrilène El Pais, publiée mercredi dernier, la fille de cheikh Yacine fait remarquer que “le calme apparent est peut-être le silence qui précède la tempête, à l'image de celle qui déferle sur le monde arabe. Cela dit, la tranquillité n'est pas absolue. Les revendications et les révoltes brutalement réprimées sont communes au Maroc depuis des années”. La porte-parole de cette formation politique, qui a une grande capacité de mobilisation, souligne qu'“au Maroc, comme dans tout autre pays arabe, il y a des équilibres sociopolitiques corrodés (...). Le Maroc n'est pas exempt du peloton. Le renversement démocratique aura lieu par n'importe quel moyen”. À partir de cette analyse, elle demande au régime marocain de “jeter à la poubelle la Constitution” et à mener une campagne de “nettoyage des réseaux de népotisme pour restituer au peuple marocain ses biens confisqués et que le makhzen ne continue pas à s'imaginer qu'il est au-dessus de l'histoire !” Dans son analyse, Nadia Yacine énumère les facteurs objectifs à même de déclencher la révolte au Maroc, comme “le taux de chômage qui atteint les 20% et qui affecte principalement les diplômés qui ont le sentiment d'être socialement inutiles, l'effondrement du visa d'immigration en raison de la sélection des pays bénéficiaires, de la montée de l'islamophobie et la rapine des dirigeants du népotisme, qui encouragent la corruption endémique”. Selon elle, d'autres “facteurs subjectifs” versent également dans une implosion latente au Maroc. Elle évoque “la hogra célèbre” (l'humiliation) subie par les citoyens, et “la frustration causée par la proximité médiatique d'un Occident perçu comme un eldorado de liberté, de dignité et aussi de bien-être”. Quant à la participation de sa formation politique au rassemblement, le 20 février, auquel ont appelé des milliers de Marocains qui se sont inscrits sur Facebook, elle affirme qu'elle soutiendra “n'importe quel rassemblement pacifique, civilisé et organisé”. “Nous sommes une force tranquille profondément ancrée dans le peuple, et si nous ne faisons aucun choix pour lui, nous serons avec lui dans ses choix tant que la non-violence est respectée”, martèle-t-elle. Interrogé sur la position qu'adopteront les Etats-Unis en cas de soulèvement au Maroc, Mme Yacine croit savoir que “le pragmatisme et la connaissance du terrain” de l'Administration américaine font qu'“elle s'adapte afin de ne pas perdre complètement les rênes”, estimant que Washington pourrait accepter un régime “quand il est un peu corrompu”, mais pas quand il est “complètement pourri” au point de compromettre la stabilité à court ou à long terme du système. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler l'avertissement du prince Hicham, troisième dans la ligne de succession au trône alaouite, qui avait déclaré que “le Maroc n'est pas encore touché, mais il ne faut pas se leurrer sur ce fait : pratiquement tous les systèmes autoritaires vont être atteints par la vague de contestation, et le Maroc ne fera probablement pas exception”. Il a été jusqu'à affirmer qu'“il ne manque seulement que l'étincelle qui amorcera l'implosion”. Le prince Hicham s'est seulement demandé “si elle viendra directement du peuple ou des formations politiques marocaines, excitées par l'exemple de leur voisin tunisien”.