Mandaté par ses pairs, porte-parole des clubs des deux ligues professionnelles 1 et 2, Mahfoud Kerbadj revient sur les dernières démarches, entreprises par le mouvement des présidents de club, de solliciter le premier magistrat du pays par rapport à l'engagement de l'Etat d'accompagner les clubs vers le professionnalisme. Dans cet entretien, Kerbadj parle aussi de la menace de retrait collectif brandie par les responsables des clubs professionnels. Liberté : Lors de votre dernière réunion, les présidents des clubs professionnels ont brandi la menace d'un éventuel retrait collectif à cause des problèmes liés notamment aux moyens financiers. Qu'en est-il au juste ? Mahfoud Kerbadj : Il faut savoir que cette réunion intervient après celle tenue avec le président de la FAF, il y a quelques mois. En sa qualité de premier responsable du football, nous nous sommes réunis avec lui, dans le but de lui faire part de la situation des clubs et tenter de trouver une issue pour l'application des mesures qui nous ont été promises pour l'accompagnement des clubs dans le nouveau mode du professionnalisme de football. Il nous a expliqué que c'est un domaine qui ne dépend pas de lui. Toutefois, il nous a promis de saisir le Premier ministre pour tenter de débloquer la situation. Depuis trois mois, je pense, on n'a rien vu venir, absolument rien. La situation reste la même qu'au mois d'août. C'est même pire, puisque les problèmes s'accumulent. On continue d'exiger tout des clubs, mais, en contrepartie, aucune promesse n'a été tenue. Nous avons décidé, dès lors, de porter notre recours devant le premier magistrat du pays. La professionnalisation du football est, avant tout, un projet initié par le président de la République et nous avons jugé utile de solliciter son intervention pour l'application des mesures et les instructions qu'il avait ordonnées pour le redressement de cette discipline. Vous n'êtes pas sans savoir que des fonds ont été dégagés pour accompagner les clubs dans ce projet, et il n'est pas normal que ces fonds restent bloqués au niveau du Trésor alors que les clubs sont sur le point de l'asphyxie. On ne sait pas où se situe le blocage. Si c'est nous le problème, on est prêts à nous retirer et nous allons le faire si cela continue comme cela. On ne peut plus continuer à bricoler. Vous envisagez, également, la mise en place de l'association des présidents des clubs professionnels. Quel est l'objectif de cette démarche ? Nous avons convenu de nous réunir, mercredi, pour effectivement la création de cette association qui ne traite pas les conflits individuels. Elle a pour objectif de défendre les intérêts communs des clubs. Nous sommes tous confrontés aux mêmes problèmes. Il est temps qu'on soit unis afin de faire entendre nos voix d'une manière organisée et représentative. Toutes les décisions seront prises d'une manière collective. Presque tous les présidents de club adhèrent à cette démarche. Ceux qui étaient absents à la dernière réunion également. Ces derniers nous ont sollicités par écrit pour nous préciser qu'ils étaient partants pour toutes les actions qui seront entreprises à l'avenir. Ne pensez-vous pas que ce genre d'action va appuyer le conflit ou susciter la colère des pouvoirs publics ? Mais cela n'a rien d'un conflit avec les pouvoirs publics. Ce qu'on demande, c'est de mettre en application les mesures prises par le premier magistrat du pays en faveur des clubs pour la mise en place du professionnalisme. Il y a une loi de finances très claire là-dessus et nous demandons juste son application. Il faut qu'on arrête de nous mentir. Le problème ne se situe pas dans l'ouverture du capital social. Si, depuis le mois d'août, le début du championnat, l'Etat n'a rien fait, comment peut-on s'attendre que des sociétés privées le fassent. Je vous donne l'exemple du crédit destiné aux clubs. Les banques exigent un fonds de garantie pour qu'un club puisse toucher ce crédit. Dans la loi de finances complémentaire, il est précisé que c'est le Trésor qui donne ces garanties. Or, cela n'a pas été fait jusqu'à aujourd'hui, même si tout est clair. À travers notre action, la création, notamment de l'association des présidents de club, on veut savoir si on a vraiment l'intention d'aller au bout de ce projet pour notre football. C'est, soit on continue, soit on se retire. Le MJS vous a remis un document dans lequel la tutelle précise les démarches faites jusque-là. Quelle est votre position par rapport à cet écrit ? Ce document a été, comme par hasard, rédigé à la veille de notre dernière réunion. Nous pensons qu'il a été fait juste dans le but de gagner du temps. Nous parlons du football et le football demande du concret. On ne cherche pas à entendre des excuses. Les clubs veulent savoir quand est-ce qu'ils auront les deux hectares de terrain pour bâtir leur centre de formation. Ils veulent savoir quand est-ce qu'ils auront les 10 milliards de crédit pour avancer dans ce projet. On veut l'application de l'ordonnance du président de la République sur la professionnalisation du football. Si on n'est pas en mesure de passer au professionnalisme, si on n'est pas capables de réaliser ce projet, les clubs pensent qu'il vaut mieux alors revenir amateur, quitte à ne pas disputer de compétitions internationales, si on n'est pas encore prêts pour cela.