L'artiste plasticien Nourdine Chegrane expose jusqu'au 10 avril à la maison de la Culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou où il partage avec le public plusieurs toiles semi-figuratives et abstraites. Une peinture de signes et de symboles, inspirée de la calligraphie arabe et berbère, réinventée et revisitée par extension pour former des figures, celles de femmes, d'hommes et d'enfants qui dansent et parfois s'inclinent pour saluer les visiteurs. “Je symbolise comme un enfant, je donne une expression.” Suivant des techniques mixtes, les toiles sont pour la plupart d'une dominance de couleurs chaudes ou froides, le bleu, “familier à la Méditerranée”, y revient souvent. Les signes et les symboles, quelquefois refoulés dans notre mémoire commune, refont surface. Une présence culturelle par le signe qui rapproche plus le public des peintures de Nourdine Chegrane, le ramenant à s'identifier à celle-ci. Etant l'un des adeptes du groupe Awchem, l'artiste poursuit cette mission de faire du symbole, puisé dans une culture ancestrale, un sujet d'art contemporain. “Mon travail s'inscrit dans la continuité. Initié par des professeurs des Beaux-Arts, dont Issiakhem, j'ai intégré ce groupe, Awchem, dans les années 1970 avec lequel j'ai exposé lors de sa deuxième exposition en 1971”, dit l'artiste. Créé en 1967, ce groupe “ne s'est pas limité à l'exploration des signes”, mais répondait à une volonté de regagner l'essence d'un art populaire avec toutes ses richesses et de briser les carcans qui figent l'art plastique algérien à l'époque et qui devait répondre à certaines normes et être politiquement correcte. Cet art semble renaître de ses cendres, car, selon M. Chegrane, des écoles et des courants sont en train de refaire surface cherchant une part de liberté dans le signe. “Le signe peut être libre, mais il faut qu'il y ait à la base une écriture, puis une gestuelle, un acte de peindre. On personnalise un symbole par le geste.” Né le 26 mai 1942 à Rabat, d'un père natif de Tizi Hibel en kabyle, Nouredine Chegrane était infirmier et petit commerçant ambulant au Maroc. Vers 1956, il allait voir peindre une artiste française, Simone Manvoisin, dans son atelier et eut cette envie d'imiter cette artiste et adorait ses peintures de paysages marocains. En 1961, Nourdine Chegrane fait partie d'un groupe musical, Toubkal, et jouait en trio d'harmoniciste, soliste de variété et jazz, puis animateur d'une émission, “Radio crochet”, à la télévision marocaine et forme son propre groupe, les Tittans. Il fait la connaissance et joue parfois comme batteur avec le saxophoniste américain Gary Nash (actuellement jazzman aux USA). 1964, il quitte le Maroc pour son pays natal où il se lança dans une carrière de plasticien. K. Tighilt