Résumé : Da Kaci est fort embarrassé devant la demande de Aïssa qu'il trouve insensée. Le vieil homme avait dû perdre la tête. Il avait déjà enterré sept femmes, et Da Kaci n'imaginait pas Ghenima lié à un homme tel que lui, que jusqu'à ce jour, elle respectait comme son propre père. 6eme partie Kaci se retourne vers son ami et lance d'une voix à peine audible : - Comme tu l'as déjà suggéré, je prends le temps de peser le pour et le contre de ce mariage. Nous en reparlerons au printemps prochain. D'ici-là, épargne-moi toute question concernant ce sujet. Aïssa se frotte les mains : -Je me réjouis déjà de ta réponse, mais il faut savoir être patient dans la vie. J'attendrais donc la belle saison pour t'en reparler. Kaci hoche la tête d'un air résigné et se promet intérieurement d'oublier ce sujet. Il repense à sa fille Ghenima et sent son cœur se serrer. Rien qu'à l'imaginer dans les bras de cet “ogre”, il avait la chair de poule. Il se faisait tard, et Da Kaci exhorta sa famille à rentrer. Il se met tout de suite à remonter le sentier qui menait au village, suivi de sa femme, de ses deux fils, et de ses deux belles-filles. Tout en marchant, il repensait à la conversation qu'il venait d'avoir avec Aïssa. Va-t-il en toucher un mot ce soir à Zouina, sa femme ? Après réflexion, il préféra garder le secret. Qui sait comment Zouina allait réagir, elle qui adorait sa fille, et donnerait sans hésitation aucune les prunelles de ses yeux pour la voir heureuse. Tout compte fait donc, il décide de ne rien révéler. Le printemps est encore loin, et il pourra dormir sur ses deux oreilles, avant que l'hiver ne tire sa révérence. Mais le temps passait vite. Et en ce matin printanier, Da Kaci se sentait l'âme en peine. Il repensait à Aïssa, qu'il avait tenté d'éviter même dans les marchés, et lors de certaines rencontres entre amis. Mais ce dernier tenait à sa parole, et ne reparla jamais du sujet. Si bien que Kaci, se demandait parfois, s'il n'avait pas rêvé de cette proposition, qu'il avait qualifiée, à chaque fois qu'il y repensait, de honteuse. Hélas, ce n'était pas un rêve. À peine s'était-il installé à la table du petit café du village, en ce premier jour de printemps, qu'il vit Aïssa qui se dirigeait vers lui. -Ah Kaci, ah mon cher ami, lui lance t-il avant de lui donner une tape amicale sur l'épaule. Voici enfin le printemps parmi nous. Tu ne peux pas savoir comme je suis heureux d'être encore en vie, afin de savourer cette saison, qui promet déjà tant de bonheur. -Que Dieu t'accorde une longue vie Aïssa, et te donne une bonne santé. Aïssa sourit. Et Da Kaci constate qu'il avait encore perdu trois dents. Deux sur la mâchoire supérieure, et la troisième, sur la mâchoire inférieure. Déjà qu'il n'avait plus la moitié de ses dents depuis belle lurette ! Kaci estime que d'ici deux années tout au plus, le vieil homme deviendra édenté à souhait. -Que Dieu t'entende, lance Aïssa d'un air gai, ma santé est des plus rayonnantes, mon ami. Malgré mon âge, je veux dire notre âge, je me sens encore aussi vigoureux qu'un jeune puceau. -Chut, quelqu'un pourrait t'entendre. -Et alors ? -N'est-ce pas indécent de ta part, de t'exhiber ainsi, je veux dire de te vanter dans un lieu public de ta virilité ? (À suivre) Y. H.