Ben Laden laisse un héritage qui n'est pas prêt de disparaître et à infecter le corps le plus sain des sociétés musulmanes. Il a laissé une marque, un label et une multinationale aux tentacules impressionnantes qui s'est autonomisée de son fondateur jusqu'à lui échapper. Ben Laden est mort. Et après ? La liquidation de l'ennemi numéro un est davantage symbolique. Le président du conseil d'administration du terrorisme international a été tué comme un vulgaire “émir” dans une casemate. Sa multinationale lui survivra. Car Ben Laden est mort depuis 10 ans. Depuis que ces maudits avions se sont écrasés sur des milliers d'Américains qui ont découvert la face la plus hideuse du terrorisme un matin du 11 septembre. Ben Laden avait cessé d'exister en tant qu'organisateur du terrorisme pour devenir un mythe, de plus en plus puissant, au sein de la jeunesse éprise de la salafia et du jihad. Et plus le mythe se confondait en fantôme insaisissable, plus son aura grandissait au sein de la firme qu'il avait fondée avec l'aimable collaboration de la CIA à l'époque où il était fréquentable. Al-Qaïda lui a déjà survécu et est devenue, sans lui, une infernale machine à tuer aux quatre coins du monde. Ben Laden laisse un héritage qui n'est pas prêt de disparaître et à infecter le corps le plus sain des sociétés musulmanes. Il a laissé une marque, un label et une multinationale aux tentacules impressionnantes qui s'est autonomisée de son fondateur jusqu'à lui échapper. Depuis, des groupuscules injectés du Maghreb à l'Asie en passant par les cellules dormantes en Europe et au Caucase sont opérationnels et menacent déjà de représailles inéluctables. De nouvelles têtes du terrorisme ont éclos, plus jeunes, plus politiciennes et plus au fait des nouvelles technologies. Même les fetwas ont changé, les objectifs ont été revus, l'asymétrie de la violence a été modernisée par les nouveaux DRH d'Al-Qaïda. Exit Ben Laden devenu Has Been dans son propre camp et tout juste bon à être collé sur un tee-shirt de pop'art comme une sous-marque d'un “révolutionnaire” avorté. Que va-t-il se passer maintenant ? Eh bien rien ou bien peu de choses. Ses amis et successeurs lui ont déjà trouvé une fonction : celle d'un mythe mort est bien plus rentable en “martyr” qu'en inspirateur vivant et gênant. Ses ennemis de l'Occident vont pleinement profiter de l'onde de choc à une année d'élections majeures dans le monde. Ben Laden a cessé d'être utile pour un paquet de gens mais la menace qu'il a représentée et incarnée continuera à peser sur nos vies comme un virus sans antidote. Ben Laden est mort mais la méfiance qu'il a laissée entre l'Occident et le monde musulman est telle qu'il a réussi à diviser la conscience humaine et à raviver des clivages religieux et culturels entre deux blocs qui se font dorénavant la guerre. Même sans lui.