La multiplication des combats entre les forces du régime et l'opposition, qui bénéficie d'un soutien des plus conséquents du groupe de contact, laisse supposer que la situation va empirer en Libye, où les chefs de tribu tentent d'apaiser la tension en appelant à une amnistie générale afin de mettre fin à la guerre civile. Au lendemain de la réunion du groupe de contact sur la Libye à Rome, Mouammar Kadhafi a rassemblé ses chefs de tribu à Tripoli, qui ont appelé à une amnistie générale pour mettre fin à la guerre civile, alors que les combats entre rebelles et forces gouvernementales marquent le pas, près de trois mois après le début du conflit. Il s'agit aussi d'une réponse au communiqué de la fin du mois d'avril, dans lequel les chefs ou représentants de 61 tribus avaient affirmé, dans une déclaration rédigée à Benghazi (Est), fief de la rébellion, leur volonté de construire “une Libye unie”, “une fois le dictateur (Kadhafi) parti”. Quant à la Conférence nationale des tribus libyennes, elle affirme qu'elle veut “travailler à une loi d'amnistie générale qui inclut tous ceux qui ont été impliqués et ont pris les armes” depuis le début du soulèvement contre le colonel Mouammar Kadhafi à la mi-février. Une telle loi “ouvrira la voie à une ère de paix et de pardon”, ajoute la déclaration publiée tard vendredi soir, sans autre détail sur la loi ni sur son calendrier. La conférence qualifie les insurgés de “traîtres” et s'engage à ne pas “abandonner” Mouammar Kadhafi. Sur le terrain, la situation semblait s'enliser et les combats se focaliser sur Misrata, troisième ville du pays assiégée depuis plus de deux mois par les pro-Kadhafi. Souleiman Fortiya, un représentant de Misrata au Conseil national de transition (CNT), l'organe représentatif des rebelles, indique qu'actuellement à Benghazi, les troupes gouvernementales sont massées à Zliten, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Misrata. Il a déclaré : “Je suis sûr qu'il va y avoir beaucoup de combats au sol dans l'avenir. Misrata s'inquiète de cela, car (Kadhafi) est en grands préparatifs pour marcher sur Misrata.” Vendredi, des combats ont fait de nombreuses victimes des deux côtés autour de Misrata et à Abou Roueya, à l'ouest de la ville, selon la même source, mais aucun bilan n'était disponible dans l'immédiat. Elle a également souligné que le port de Misrata, seul accès pour évacuer les blessés et les étrangers et décharger l'aide humanitaire, avait été “calme” le même jour. Réagissant à la situation, Amnesty International affirme que le siège de Misrata pourrait revenir à un crime de guerre. “L'intensité des attaques acharnées des forces de Kadhafi pour intimider les habitants de Misrata depuis plus de deux mois est vraiment effroyable”, a déclaré l'ONG. “Cela montre une totale indifférence pour la vie des gens ordinaires, et cela constitue une violation claire des règles humanitaires internationales”, poursuit-elle. Pour le procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno-Ocampo, qui compte demander trois mandats d'arrêt pour des crimes contre l'humanité commis en Libye, le conflit a déjà fait des milliers de morts, et les violences ont par ailleurs poussé à la fuite des dizaines de milliers de personnes. Des centaines de personnes à bord de deux bateaux ont ainsi débarqué samedi sur l'île italienne de Lampedusa, ont annoncé les garde-côtes de l'île où des milliers de Libyens sont déjà arrivés ces dernières semaines. Le groupe de contact sur la Libye avait réaffirmé son aide à la rébellion en créant un “fonds spécial” pour le CNT, qui sera alimenté par des dons et des prêts, notamment arabes, puis en partie par les avoirs libyens gelés aux Etats-Unis et en Europe. Outré par cette annonce, le régime libyen s'est insurgé contre ce plan, et réaffirmé que le colonel Kadhafi n'entendait nullement céder le pouvoir.