“Stop aux kidnappings, libérez Mourad !” Le message est des Ath Douala aux ravisseurs du jeune Bilek enlevé par un groupe armé le 11 mai à 8h à Thala Bounane, un lieu-dit situé sur la route reliant Béni Aïssi à la ville de Tizi Ouzou. Ecrit sur des banderoles et des photos portrait grand format de ce jeune de 18 ans, ce message on le retrouve partout dans la ville de Tizi Ouzou tout comme dans toute la région de Béni Douala. En empruntant la sinueuse route menant vers cette localité située à 15 kilomètres du chef-lieu de wilaya, ces écriteaux se font de plus en plus nombreux. À Béni Aïssi, commune natale de la victime, tous les murs et les devantures des véhicules sont placardés. Une foule s'est déjà formée depuis les premières heures de la matinée. Elles sont plus de 500 personnes, dont certaines sont agglutinées aux murs des magasins et des habitations du chef-lieu. Aucun rideau de magasin n'est ouvert et point de fourgon de transport en circulation. Les Ath Aïssi ont répondu massivement à l'appel à la grève générale décidée lors de la réunion des villages de la région à l'expiration de l'ultimatum de 48h fixé par la population de la région aux ravisseurs de Bilek Mourad qui vivait hier sa 7e journée de captivité. L'ambiance est lourde ce matin à Béni Aïssi. De la tristesse mais aussi de la détermination se lisaient sur tous les visages. “Nous n'avons encore aucune nouvelle de Mourad”, dira un des frères de la victime. Un cousin à lui, entouré d'un groupe de villageois, explique : “Nous n'allons payer aucune rançon, ils ont intérêt à le libérer parce que nous somme déterminés à aller les déloger des maquis où ils se cachent.” Une caravane, qui va sillonner les abords des maquis avec des mégaphones pour s'adresser directement aux ravisseurs, est déjà prévue pour aujourd'hui, mercredi. Pour demain jeudi, c'est une marche qui sera organisée dans la région, annoncent les membres de la cellule de crise à Béni Aïssi avant d'inviter les présents à former un cortège pour se rendre au chef-lieu de daïra de Béni Douala. Une file interminable de véhicules se forme immédiatement et s'ébranle. 10h. Béni Douala centre était totalement paralysé par la grève générale. Tous les commerces sont fermés et les transporteurs en stationnement. Béni Zmenzer et Aït Mahmoud n'y ont pas échappé à cette situation qui caractérise ainsi les quatre communes que compte la daïra. C'est dire que la solidarité et la mobilisation citoyenne contre le phénomène des kidnappings sont encore une fois au rendez-vous. Béni Douala qui, à travers le jeune Bilek Mourad, vient d'enregistrer son 5e enlèvement depuis l'apparition de ce phénomène en 2005, ne jure que par sa volonté à faire libérer la victime sans préalable, comme cela a été héroïquement réussi en novembre 2009 par la population d'Iflissen, puis en mars 2010 par celle de Boghni et en juillet de la même année par celle d'Aghribs. À une vingtaine de kilomètres Béni Douala, à Mechtras, dans la daïra de Boghni, une autre mobilisation citoyenne commence à prendre forme pour exiger la libération de Hamour Saïd, un marbrier de 71 ans, enlevé samedi dernier par trois individus armés de kalachnikovs et dont deux étaient habillés en civil alors que le troisième, barbu, était en tenue afghane. Avant-hier, une réunion qui a regroupé 15 villages a eu lieu dans la région pour décider des actions à entreprendre pour libérer sain et sauf et sans versement de rançon cet homme diabétique enlevé devant l'entrée de son domicile où il était attendu. Un regroupement des villages de la région est prévu également aujourd'hui devant le siège de la mairie de Mechtras pour donner une forme plus concrète à cette mobilisation à laquelle adhère toute la population de la région car convaincue que c'est le seul moyen de mettre fin à ce phénomène qui a fait 63 victimes dans la wilaya de Tizi Ouzou et qui ne cesse de faire fuir industriels, commerçants et entrepreneurs vers d'autres régions du pays.