De plus en plus impopulaire dans le monde musulman et arabe, en raison de sa politique trop favorable à Israël, qu'il laisse agir à sa guise, Barack Obama tentera aujourd'hui de convaincre de la justesse de sa ligne de conduite en s'adressant à nouveau aux peuples de la région, qui ne croient plus en ses promesses, faites dans précédent discours au Caire. Le président américain fera aujourd'hui le point sur la situation dans le monde arabe à la lumière des dernières révoltes populaires, au moment où l'image des Etats-Unis s'est sérieusement dégradée dans le monde arabo-musulman durant l'année écoulée. C'est ce que révèlent les résultats d'un sondage rendu public mardi. Barack Obama est devenu plus impopulaire dans la majorité des pays musulmans, où beaucoup de sondés désapprouvent sa réponse à la volonté de changement démocratique qui s'est exprimée dans ces pays. À titre d'exemple, en Jordanie le pourcentage d'opinions favorables concernant les Etats-Unis n'est que de 13%, soit une baisse de 8 points par rapport à 2010. Idem en Turquie, où les opinions positives sont passées de 17% à 10%. Au Pakistan, le pourcentage d'opinions favorables concernant les Etats-Unis est tombé de 17 à 11%, mais la confiance envers Obama a progressé, tout en restant très basse : elle est passée de 8 à 10%. Environ 1 000 personnes ont été interrogées dans chacun des pays étudiés (Egypte, Indonésie, Israël, Jordanie, Liban, Territoires palestiniens et Turquie) et 2.000 au Pakistan, sur une période de 30 jours en mars et avril. Que pourrait bien dire Barack Obama aujourd'hui aux Arabes et aux musulmans, qui puisse inverser cette tendance, dans ce discours au département d'Etat à Washington intervenant cinq mois après le début des révoltes qui ont renversé les régimes tunisien et égyptien, ébranlé le Yémen et Bahreïn, des pouvoirs alliés de Washington, mais aussi la Libye et la Syrie. La réaction différente de Washington d'un cas à l'autre en fonction de ses intérêts n'a guère était du goût de la rue arabe, comme l'indiquent les résultats du sondage. Il semblerait que locataire de la Maison-Blanche va insister sur les “opportunités” que recèlent, selon lui, les bouleversements en cours au Moyen-Orient et en Afrique du nord, dans une analyse commune des situations dans des pays amis, alliés ou ennemis des Etats-Unis. Ce sera peut-être l'occasion Obama pour “prendre un peu de recul et d'analyser ce dont nous avons été les témoins”, comme l'explique le porte-parole de la Maison-Blanche, Jay Carney. Selon lui, le locataire du bureau ovale estime que ces changements constituent “un moment d'opportunités” pour la région et veut “soutenir toutes les aspirations démocratiques de ses habitants”. La même source indiquera que le président US “parlera en particulier de la façon dont nous pouvons soutenir ces changements bénéfiques, tout en nous concentrant sur nos principes de base : la non-violence, les droits de l'homme et le soutien à des réformes politiques et économiques”. Barack Obama évoquera certainement la mort d'Oussama Ben Laden le 2 mai dernier dans un raid américain au Pakistan et sa signification pour la région. Des observateurs pensent qu'Obama prendra le soin de peser chaque mot, en raison de l'importance de la région, qui se caractérise par des équilibres fragiles et où les intérêts américains pourraient pâtir d'un brusque changement de cap. De son côté, Marina Ottaway, une spécialiste du Moyen-Orient à la fondation Carnegie, se dit curieuse de savoir “de la façon dont Obama va réussir à concilier le soutien aux transitions politiques et l'approche au cas par cas” des situations. Haïm Malka, expert ès Moyen-Orient au Centre pour les études internationales et stratégiques (Csis), un autre groupe de réflexion de Washington, pense quant à lui que “l'une des principales difficultés pour le président va être de faire sens pour les millions de personnes dans le monde arabe qui espèrent le changement, sans fâcher davantage des alliés importants des Etats-Unis dans le Golfe, qui ont intérêt à préserver le statu quo”. Vu la conjoncture actuelle marquée par le récent accord de réconciliation entre le Fatah et le Hamas, les déclarations de Netanyahu sur le maintien des colonies de Cisjordanie et son refus réitéré de partager Jérusalem avec les Palestiniens, Nathan Brown, professeur à l'université George-Washington trouve que “ce n'est apparemment pas le moment de se lancer dans des discours optimistes” sur ce conflit. Il ne faut probablement pas s'attendre à ce que Barack Obama annonce une nouvelle initiative pour un règlement dans ce dossier.