C'est un vrai changement de cap dans la politique américaine vis-à-vis de la Syrie car, à la différence de la situation en Libye, les Etats-Unis n'avaient pas formellement appelé, à ce jour, au départ du pouvoir du président Assad. L'administration Obama a franchi un pas en estimant, lundi, pour la première fois après quatre mois de répression en Syrie, que le président Bachar Al-Assad avait perdu sa légitimité. Le verdict a été prononcé par la secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, quelques heures après que l'ambassade américaine à Damas eut été prise pour cible par une foule soutenant le régime syrien. Washington a d'abord accusé une télévision proche du régime d'avoir encouragé cet incident, avant de pointer du doigt le régime syrien de susciter l'attaque sinon de l'avoir autorisée. Certainement que cette position a été une réponse aux pourparlers derrière le rideau que Washington et Damas avaient maintenu en dépit de la terrible répression exercée quotidiennement contre les manifestants syriens exigeant la démocratie. Les Etats-Unis ont fini donc par lâcher Bachar qu'ils accusent de n'avoir pas honoré ses promesses d'ouverture et surtout d'avoir accepté l'aide de l'Iran sur la manière de réprimer son peuple. “Le président Assad n'est pas indispensable et nous n'avons absolument rien investi dans le fait qu'il reste au pouvoir”, a dit Hillary Clinton, avertissant le dirigeant syrien qu'il commettrait une grave erreur en pensant que les Etats-Unis redoutent sa chute. L'objectif des Etats-Unis est que la volonté de transformation démocratique du peuple syrien se réalise, a-t-elle martelé, appelant de nouveau à l'arrêt immédiat des violences, au retour de l'armée et des forces de l'ordre dans leurs casernes et au début d'un processus démocratique. Un vrai changement de cap car, à la différence de la situation en Libye, les Etats-Unis n'avaient pas formellement appelé, à ce jour, au départ du pouvoir du président Assad. Il y a quatre mois et demi, le 26 février, le président américain Barack Obama a condamné le dirigeant Kadhafi, estimant qu'il devait “partir maintenant”, jugeant que le dirigeant libyen avait perdu la légitimité pour rester au pouvoir. Damas se le tient pour dit désormais, c'en est fini de son chantage selon lequel la Syrie est exceptionnelle du fait que c'est une partie indispensable dans l'équilibre précaire et explosif de la région moyen-orientale et, surtout, une pièce maîtresse dans la poursuite de la politique hégémoniste israélienne. Bachar a pour ainsi dire contribué à maintenir tel quel l'équilibre israélo-américain grâce au jeu de sa politique de ni négociations ni guerre avec son voisin israélien lequel occupe pourtant depuis 1967 le Golan, son rapprochement ave l'Iran et ses influences au Liban via le Hezbollah. Aujourd'hui, Mme Clinton relève des points communs entre Assad et Kadhafi. La messe est dite. Au point où le département d'Etat a envoyé l'ambassadeur Robert Ford aux côtés des manifestants dans la ville de Hama. Une provocation qui s'était soldée par l'attaque du siège de la représentation américaine à Damas. L'émissaire du Quartette pour le Proche-Orient, Tony Blair, a été, lui aussi, catégorique : “Il est trop tard” pour Bachar Al-Assad. L'ex-Premier ministre britannique a toujours été la voix de ses maîtres de Washington. Il reste que l'idée d'une action militaire en Syrie n'a pas de soutien international.