Cet humoriste, qui exprime son indignation pour le pire et pour le rire, est revenu sur plusieurs questions politiques, notamment la guerre en Libye, sa rencontre avec le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, et sur sa conception de l'humour, qui ne peut s'extraire du contexte. Présent en Algérie pour deux représentations (ce soir à Alger et demain à Oran) de son spectacle, Mahmoud, l'humoriste français Dieudonné M'bala a tenu, hier après-midi à l'hôtel Hilton, une conférence de presse, durant laquelle il a présenté brièvement son spectacle, tout en revenant sur plusieurs thèmes relatifs à l'actualité politique. Certes, le rire n'était pas loin puisqu'il agrémentait ses phrases tranchantes de petites doses d'humour, mais l'humoriste s'est montré quelque peu hanté par plusieurs questionnements liés à l'état du monde d'aujourd'hui. Dieudonné, qui est “persuadé que nous sommes tous en guerre”, a estimé qu'il était “un humoriste révolutionnaire car je pense que derrière le rire, on peut réveiller les esprits”. Revenant sur son duo avec Elie Semoun, l'humoriste déclarera qu'aujourd'hui encore, il est passionné par les mêmes sujets, mais qu'il les a juste approfondis. “Avec le temps, on détermine plus les contours, les enjeux de la démocratie”. Et de signaler : “Je me sens comme un artiste qui fait son travail du mieux qu'il peut (…). Je pense que le rire est une expression de paix en réalité. Je crois au rire car je pense que c'est une façon pour que le monde aille mieux malgré son arrogance, et malgré le mensonge dans lequel je vis. Le rire permet de passer à autre chose.” Dieudonné, pour qui “le rire est quelque chose de très sérieux”, a évoqué sa rencontre avec le président iranien, Ahmadinejad. La genèse de cette entrevue : Dieudonné avait pris part à un festival de cinéma en Iran en tant que membre de jury, et un proche du président qui appréciait le travail de l'humoriste, notamment sur “la question antisioniste” avait arrangé le rendez-vous. Une coïncidence donc qui a été largement instructive pour Dieudonné puisque “nous avons eu une discussion extrêmement intéressante sur l'art et sur Hollywood, cette branche armée des Etats-Unis et d'Israël qui déverse ses informations à travers le monde”. S'il n'a pas souhaité commenter la situation intérieure de l'Iran parce qu'il “ne la connaît pas”, l'humoriste a affiché son admiration pour Ahmadinejad et pour “la force, la puissance du discours iranien sur la scène internationale”, tout en considérant que la thèse de l'Iran relative aux attentats du 11 septembre 2001 selon laquelle, tout ne serait qu'une manipulation, est “intéressante”. Evoquant la guerre contre la Libye, Dieudonné a appuyé qu'il soutenait “la résistance libyenne parce que, pour moi, c'est une résistance africaine. Je soutiens le peuple libyen”. Pour lui, “se concentrer sur Kadhafi c'est jouer le rôle de ses adversaires”. Sans modération aucune, Dieudonné qui n'a pas la langue dans sa poche, et qui semble ne point maîtriser les figures de style, a chargé l'actuel président français, Nicolas Sarkozy, allant jusqu'à affirmer qu'“il suffit d'entendre Nicolas Sarkozy pour comprendre la bêtise du monde dans lequel nous vivons”. Et de marteler : “Kadhafi face à Sarkozy n'a pas à rougir.” Il soulignera, en outre, que “je ne vois pas pourquoi la France, qui fait aujourd'hui la guerre, tout un tas de pays et on ne sait pas pourquoi, a à intervenir dans le débat intérieur de la Libye”. L'humoriste a également appuyé que “cette guerre est menée pour des intérêts qui n'ont rien à voir avec la France”. L'artiste ne semble plus se reconnaître dans la France d'aujourd'hui, et pour schématiser ce sentiment, il parlera de la Célébration des Outre-mer et son incompréhension face à la production d'une comédie pour traiter de l'esclavage. Il ironisera en imaginant une “soirée Zouk à Auschwitz”. Sa vanne est lourde de sens et toujours de sous-entendus. Dieudonné qui se situe, lui-même, “en dehors de l'échiquier politique ; nulle part”, a également évoqué la presse occidentale qui le boude. “C'est le black-out sur mes spectacles mais elle n'est pas digne de bonne foi”, dira-t-il, avant de lâcher cette phrase à la fois drôle et pleine de sous-entendus : “Moi, je suis le mal dans l'humour, le bien c'est Dominique Strauss-Kahn. Et malheureusement, c'est le monde dans lequel on vit.” Quant aux sujets qui interpellent cet humoriste (qui a dévoilé qu'il avait un projet de film avec les Iraniens, qui sera tourné en Algérie) au verbe haut et aux mots tranchants, ils sont généralement d'ordre politique car “il faut rire de toute urgence sur ces questions-là”. Du rire, on va en avoir, ce soir, à Alger (chapiteau hôtel Hilton), et demain soir à Oran (salle Maghreb), avec le spectacle Mahmoud. Et d'ailleurs, comme il le dit si bien : “La meilleure façon de comprendre ce que je fais, c'est de venir me voir sur scène.”