C'est sous haute surveillance que les travaux du projet de parking du Bois-des-Pins s'engagent. Ici, comme ailleurs, dans le parc d'El-Kala balafré par un tronçon d'autoroute, sur la baie d'Alger souillée par une usine de dessalement d'eau, verrue d'acier déposée sur les Sablettes, ou dans le Tassili-Hoggar bientôt éventré de partout par les chercheurs d'or et de… rente, l'état a affiché son mépris politique pour la question environnementale. On peut multiplier les exemples de ces opérations de “culture sur brûlis” qui veulent tenir lieu d'actes de développement. Pourquoi le petit Bois-des-Pins ne connaîtrait donc pas le sort de la forêt de Bouchaoui ? Graduellement morcelée en portions attribuées à des institutions ou des promoteurs, elle sera bientôt réduite à sa plus simple expression, livrée à la valse de voitures qui viennent déposer des “familles” si peu soucieuses de la sauvegarde des lieux. Et l'insouciance des commerçants y rejoint l'incivisme des usagers pour assurer la mort lente du poumon d'Alger. à terme, il ne restera de vert que les parcs annexés par les institutions de pouvoirs et les pelouses des belles résidences. C'est donc un acte d'héroïsme que celui des riverains de l'actuel Bois-des-Pins et bientôt parking d'Hydra que de s'investir à leur corps défendant dans ce combat d'arrière-garde. Ils auront déclenché les foudres d'un pouvoir qui s'apprête à déclasser des terres agricoles et qui n'a aucune envie d'être gêné dans sa planification à courte vue par une pédagogie de l'écologie. Le style stratégique national est ainsi conçu : il ne tient compte que de ce qui est réalisé ; jamais de ses délais, de ce qu'il coûte, de son impact sur l'environnent, sur le paysage, sur la qualité de vie des riverains. Pas la moindre réflexion en matière d'économie de l'espace. Dans cette approche, le béton seul est durable. Après mon projet, le déluge ! Sinon comment expliquer que s'impose une enquête de commodo et incommodo pour l'ouverture d'un bar, mais pas pour un équipement qui va faire défiler des centaines de véhicules par jour ? La manière dont est réprimée la contestation du projet montre à quel point l'autoritarisme brutal soutient le dogmatisme en matière de “développement” et d'“aménagement”. Tout se fait au forceps. Les pouvoirs publics ont simplement procédé à l'occupation de la cité : il est rapporté des cas de portes enfoncées, d'habitants traumatisés. Et désormais, les riverains entrent et sortent de leur immeuble à travers des filtres de police installés jusque dans les halls et la terrasse. Visiblement instruits de cette brutalité, les policiers semblent exprimer par leur action le mépris officiel pour ce sentimentalisme écologique des habitants du quartier. L'histoire en témoigne : les régimes autoritaires détruisent beaucoup pour construire peu et laid. Et c'est connu, l'architecture et l'urbanisme sont révélateurs de la nature politique du régime qui a “construit” un pays. M. H. [email protected]