Sollicité pour le besoin de notre enquête sur les cliniques privées, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière a mandaté (son) directeur des services de santé au ministère (DSS), le Dr Guennar, qui tente, dans cet entretien, de répondre aux critiques des citoyens qui accusent ces structures de les avoir souvent arnaqués. Si le représentant du département de Djamel Ould-Abbès reconnaît que “des insuffisances, sources de mécontentement des citoyens, sont enregistrées”, en revanche, il n'avance pas de solutions en mesure de juguler ce phénomène. Liberté : De nombreux citoyens se plaignent de plus en plus des prestations, notamment en matière de soins médicaux, jugées très en deçà des attentes que proposent certaines cliniques privées, et ce, en dépit des prix excessifs pratiqués par ces structures. Une véritable arnaque, selon les témoignages de certains citoyens. Le ministère n'a-t-il pas un rôle à jouer devant cette situation, sachant que c'est lui qui a délivré les agréments de ces cliniques ? Le Dr Guennar : Le ministère de la Santé est effectivement chargé de délivrer les agréments pour l'exercice des activités médicales à toutes les structures de soins publiques ou privées, en application des dispositions de l'article 17 de la loi 85.05 du 16 février 1985 relative à la promotion et à la protection de la santé. Pour s'assurer de la qualité des prestations, les services du ministère veillent sur les aspects liés à la conformité des structures et des équipements des cliniques privées. Les prestations fournies se sont de plus en plus améliorées et beaucoup d'efforts sont consentis dans ce sens. Cependant, des insuffisances sont enregistrées, elles constituent la source de mécontentement des citoyens, d'autant que ces prestations sont parfois payées à des prix très élevés. Pour ce qui est des tarifs pratiqués, il y a lieu de rappeler que les prestations assurées aux malades sont codifiées. On apprend également que des cliniques privées font appel aux services de soi-disant spécialistes de renommée internationale pour des interventions en Algérie. Est-ce que votre ministère a un droit de regard sur cette pratique ? Le ministère de la Santé veille sur tous les aspects liés à la pratique médicale en Algérie, il délivre les autorisations aux praticiens étrangers pour exercer à titre dérogatoire au niveau des établissements de santé, et cela, en application des dispositions de l'article 197 de la loi 85-05 de février 1985 relative à la promotion et à la protection de la santé. À ce titre, les praticiens étrangers interviennent dans 25 établissements hospitaliers dont 9 cliniques privées, et ce, dans le cadre d'un partenariat entre les structures sanitaires et des compétences médicales étrangères pour une assistance technique qui est appréhendée comme stratégie de substitution aux transferts pour soins à l'étranger, et comme moyen efficace de formation et d'implémentation des nouvelles technologies dans les spécialités de pointe, à l'image de la chirurgie cardiaque pour adulte et enfant essentiellement. Depuis 2010, le ministère a instauré un système de contrôle de toutes les interventions des personnels étrangers en vue de ne sélectionner que les véritables compétences médicales à travers l'étude des dossiers et l'authentification des documents des praticiens concernés. Beaucoup d'observateurs dénoncent le non-respect des cahiers des charges imposés par la tutelle aux structures privées. Est-ce que c'est par rapport à ce constat que le ministre avait menacé, à maintes reprises, de prendre des mesures restrictives à leur encontre ? Les services du ministère sont chargés de veiller au contrôle permanent et régulier du fonctionnement des établissements privés. Des dysfonctionnements existent dans certaines cliniques. À titre d'illustration, une vaste opération d'inspection des cahiers des charges a été diligentée au niveau de l'ensemble des cliniques privées en octobre 2010. Elle avait concerné tous les centres d'hémodialyse et les cliniques médicochirurgicales. Les anomalies relevées ont fait l'objet d'un redressement, qu'il s'agisse de l'emploi irrégulier des personnels médical et paramédical du secteur public et du non-respect des normes d'hygiène et d'asepsie ou, parfois, carrément de la non-conformité des espaces et des locaux. Des citoyens dénoncent la complicité du personnel médical du secteur public avec les responsables des cliniques privées, d'où l'orientation volontaire des patients vers le privé. Si c'est le cas, la tutelle ne devrait-elle pas agir pour mettre fin à ces pratiques ? La réglementation est claire à ce sujet, il s'agit de comportements condamnables. Le ministère de la Santé a eu à intervenir pour des cas signalés et des sanctions ont été prises à l'encontre des contrevenants. Il est attendu de la part des malades et de leurs parents de signaler tous ces abus qui n'engagent que leur personne. En dépit de la loi lui interdisant de cumuler les postes d'emploi, on dénonce de plus en plus la collaboration de la majorité du personnel paramédical du secteur public dans les différentes cliniques privées… Le contrôle des activités irrégulières de certains paramédicaux dans les structures privées a conduit à la suspension de nombreux d'entre eux et contre lesquels des sanctions ont été prises, notamment après les contrôles effectués dans les cliniques de dialyse en octobre 2010. De même, la mise à niveau des différents aspects d'organisation et fonctionnement des cliniques privées telle, par exemple, l'activité complémentaire et lucrative qui requiert un plan d'action avec des objectifs à court, moyen et long terme, qui s'intégrera au plan national d'amélioration de tous les établissements de santé, publics et privés.