Si on peut concéder à l'Assemblée nationale un programme chargé durant la dernière session parlementaire de printemps, par le nombre de projets de textes de loi examinés, cette institution est restée, toutefois, fermée à toute initiative institutionnelle autonome émanant de ses membres. À la clôture de la session du printemps, le président de l'APN, Abdelaziz Ziari, a affirmé que l'Assemblée nationale a réalisé un bilan législatif considérable, qui s'inscrit dans le cadre de l'appui au programme des réformes engagées depuis 1999 dans divers domaines. Sur la douzaine de projets de loi annoncés, onze textes ont été présentés, examinés et adoptés par les deux Chambres du Parlement. Le ministère de la Justice a été particulièrement prolixe par la présentation de cinq projets de loi, dont celui relatif à la dépénalisation de l'acte de gestion. Seulement, la session parlementaire de printemps n'a pas dérogé à la règle en s'achevant sur le même type de blocage développé tout au long de l'actuelle législature contre les députés de l'opposition. Quatre initiatives, réunissant de 22 à 29 députés, ont été ignorées. Dans le détail, deux propositions de lois déposées respectivement les 14 et 19 avril 2011 pour un amendement de l'article 87 bis du code pénal et l'enseignement obligatoire de tamazight ont été transmises par le bureau de l'Assemblée au gouvernement, qui n'a pas jugé utile de communiquer sa position officielle.Selon le député de Bouira, Ali Brahimi, “le président de l'APN n'a pas cru devoir déférer ces deux propositions de loi devant les commissions permanentes concernées malgré l'écoulement du délai de 2 mois, en violation de l'article 25 de la loi 99-02 fixant l'organisation et le fonctionnement de l'APN et le Conseil de la nation ainsi que leurs relations avec le gouvernement”. Une troisième proposition de loi visant à déverrouiller l'accès des institutions électives aux femmes, aux jeunes et aux candidatures indépendantes n'a pas été transmise à l'Exécutif, sous prétexte que ce dernier détient un projet plus exhaustif sur le régime électoral. Pourtant le règlement n'interdit que les propositions de loi dont le contenu est identique à un projet gouvernemental en cours d'examen au sein de l'Assemblée. De même une résolution portant sur la mise en place d'une commission parlementaire sur l'exercice des droits et libertés publiques s'est heurtée à un mur de silence. Le bureau de l'Assemblée n'a pas jugé nécessaire de lui opposer un refus écrit comme c'était le cas pour la demande d'enquête parlementaire sur la corruption en juin 2009. À la même période, une autre demande d'enquête émanant des partis de la majorité, portant sur les émeutes de janvier 2011, a été vite acceptée. De quoi susciter des interrogations. En dehors de cet épisode, pratiquement aucune proposition des membres de l'APN n'est passée en trois législatures pluralistes, à l'exception de celle portant révision de la loi organique relative au régime électoral initié par le groupe parlementaire du mouvement Ennahda qui avait été validée, contre toute attente, par le gouvernement et adoptée par la plénière de l'Assemblée nationale. À l'exception de cet événement, qualifié d'inédit, la mission des députés, dans l'entendement des autorités nationales, se limite à donner une existence légale aux projets de loi élaborés par l'équipe gouvernementale. Depuis 2008, pas moins d'une vingtaine de propositions de loi émanant de parlementaires de différentes sensibilités politiques ont été déposées au bureau de l'APN. Certaines ont été rejetées purement et simplement par cette instance, qui a, parfois, motivé sa décision par des vices de forme ou de procédures. D'autres se sont heurtées au refus ou à une réserve de la part du gouvernement. De la proposition de loi criminalisant le colonialisme français ou amendant la loi électorale, celle proposant l'interdiction d'installation de bases militaires étrangères et des bureaux de renseignements sur le sol algérien à de simples propositions relatives à la circulation routière, statut des handicapés, protection des orphelins et amendement de la loi fixant les fêtes nationales, les députés se sont heurtés au même mur de silence. Le même traitement sélectif et méprisant est réservé aux questions orales des parlementaires. Quand une question orale ne dérange pas, le ministre concerné s'empresse de répondre à coup de chiffres en s'attardant particulièrement sur les projets déjà réalisés. Mais lorsqu'une question d'un parlementaire est mal perçue et risque de créer une polémique, le gouvernement s'abstient de répondre non seulement oralement, mais aussi par écrit. C'est le cas, notamment pour la question orale portant sur la réduction du Service national à 6 mois, en attente depuis 2008.