La tonne de cuivre pur retirée des câbles électriques et téléphoniques est estimée à 300 000 euros sur le marché noir. Parfois, elle avoisine les 400 000 euros, selon la sélection des matériaux triés. La valeur marchande du cuivre volé, soit 200 000 mètres de câbles, dépasse de loin les 60 millions d'euros. La dernière saisie de cuivre, opérée en trois jours par la Gendarmerie nationale, a été de 20 tonnes à l'échelle nationale. Bradé en Tunisie et au Maroc, où la marchandise transite et/ou fait l'objet de traitements spécifiques, le cuivre algérien est “exporté” malgré le dispositif législatif mis en vigueur par la loi de finances complémentaire de 2009, et ce, à raison de 300 000 euros la tonne. C'est que les tentatives malsaines de certains barons de revenir sur le marché par la voie réglementaire n'ont pas payé à cause notamment des dégâts collatéraux que subit notre économie, à commencer par le transfert illégal de la devise et le non-rapatriement des revenus depuis l'étranger. D'où la multiplication des opérations frauduleuses d'une mafia qui ne lâche rien pour répondre aux “commandes” afin de blanchir des sommes astronomiques dans l'immobilier. En huit mois seulement, les entreprises nationales, dont Algérie Télécom et Sonelgaz, se sont vu subtiliser 35 000 mètres de câbles. Rien que ça ! Les enquêtes, menées par la GN à travers les sites où sont clandestinement stockées ces quantités impressionnantes, ont abouti à la récupération de près de 7 000 mètres de câbles. Durant la même période, ce sont 262 affaires qui ont été traitées, dont 26 cas à Tizi Ouzou, 23 à Boumerdès et 21 autres à Mostaganem. Les réseaux sont “câblés” partout : 40 wilayas sont sérieusement touchées par ce phénomène. Un phénomène qui marque de son empreinte sa grave ascension dans la grille du crime organisé et qui met à genoux des secteurs névralgiques comme les télécommunications et l'énergie. “Souvent les coupures d'électricité et du téléphone sont dues au vol des câbles. Des émeutes ont éclaté à cause de ces coupures dues au massacre que subissent notamment Algérie Télécom et Sonelgaz mais aussi des dommages que subissent les foyers, les administrations et le service public de manière générale. Il s'agit d'un trafic à grande échelle qui touche directement l'économie nationale”, explique le lieutenant-colonel, Abdelhamid Keroud, joint par téléphone. En trois ans, ce sont 200 000 mètres de câbles sauvagement arrachés avant d'être conditionnés sur des palettes destinées à la contrebande, soit 2 000 tonnes de cette noble matière, dont la valeur marchande dépasse de loin les 60 millions d'euros, soit un peu plus de 700 milliards en dinar algérien. Astronomique ! Ainsi, depuis 2009, année où le gouvernement a formellement interdit l'exportation des métaux ferreux et non ferreux, la Gendarmerie nationale a traité 600 affaires liées à ce trafic qui prend, par ailleurs, des proportions alarmantes. Rien qu'en huit mois d'activité, ce sont 84 individus impliqués qui ont été appréhendés alors que des dizaines de moyens de transport, dont des camionnettes et des camions de gros tonnage ont été mis en fourrière. Il y avait même un trafiquant zélé qui a été interpellé alors qu'il transportait du cuivre à bord d'un véhicule de marque… Mercedes ! Comme quoi, le commerce du cuivre est très juteux et suggère des sacrifices. Au prix fort de leur vie, des trafiquants se sont même exposés à des électrocutions au moment d'accomplir leur forfait. Des mineurs, des étudiants, des femmes, des agriculteurs et passons sont sollicités par la mafia du cuivre pour sectionner les câbles dans les champs et même sur les voies routières afin de “collecter” cette marchandise pour le compte des PMI basées sous d'autres cieux où la transformation fait fureur. Selon notre source, dix wilayas du Centre, de l'Est et de l'Ouest, dont Bouira, Médéa, Tizi Ouzou, Mostaganem, Constantine, Sétif, Tébessa, Tlemcen et Boumerdès sont ciblées par cette mafia qui défie les lois de la République pour engranger des sommes colossales au grand dam de l'économie nationale. Durant ces périodes où la mafia des métaux ferreux et non ferreux est traquée, la GN a spécialisé ses unités, notamment au niveau des postes de contrôle et de surveillance, ainsi qu'aux frontières, afin de juguler un trafic qui dépasse toutes les frontières.