Le Premier ministre russe Mikhaïl Kassianov a critiqué vendredi la saisie, la veille, des actions du pétrolier Ioukos et l'arrestation de son patron Mikhaïl Khodorkovski, confirmant, en s'opposant au président Vladimir Poutine, qu'un conflit politique faisait rage au sein du pouvoir russe. "Je suis profondément préoccupé par cet événement, dont les conséquences sont difficiles à évaluer", a déclaré M. Kassianov, réputé proche des "oligarques" russes, en évoquant la saisie la veille de 44% des actions de Ioukos par le Parquet général dans le cadre des poursuites contre M. Khodorkovski et deux de ses associés pour escroquerie et évasion fiscale. Le Parquet a indiqué vendredi avoir levé la saisie de 4,5% de ces actions, dont les vérifications auraient montré qu'elles appartenaient "à des personnes physiques qui n'ont aucun rapport avec les enquêtes criminelles en cours". Concernant l'arrestation de M. Khodorkovski, Mikhaïl Kassianov a indiqué n'avoir "pas modifié sa position déjà énoncée à plusieurs reprises" sur la détention d'hommes d'affaires. Les poursuites contre Ioukos sont considérées comme inspirées par la fraction montante au sein du pouvoir russe, celle des forces de l'ordre et des anciens des services secrets amenés avec lui par l'ex-agent du KGB, Vladimir Poutine. Elles seraient motivées à la fois par la montée en puissance et l'indépendance de Ioukos, les ambitions d'influence politique et le soutien aux partis d'opposition libérale, affiché ouvertement par son patron Mikhaïl Khodorkovski à l'approche des législatives de décembre. Le chef du gouvernement a également commenté devant la presse la démission, entérinée jeudi soir par Vladimir Poutine, du très influent chef de l'administration présidentielle Alexandre Volochine. La presse et les experts ont vu le signe avant-coureur d'une crise politique majeure dans la démission de ce responsable considéré comme une figure-clef du groupe d'influence des libéraux et des oligarques, hérité par le président russe de son prédécesseur Boris Eltsine, face à la montée des "tchékistes de Saint-Pétersbourg". Le Premier ministre a déclaré vendredi qu'il espérait que la démission de M. Volochine "n'aurait pas de conséquences" sur les rapports entre le Kremlin et le gouvernement. La Bourse de Moscou a enregistré au total une baisse de 15% de son indice de référence RTS sur la semaine, rythmée par les rebondissements de l'affaire Ioukos, malgré une séance de vendredi clôturée en hausse de 1,90%. Le gouvernement allemand, dont le pays est le premier investisseur en Russie, a de son côté déclaré qu'il observait "avec une grande attention" les développements de l'affaire Ioukos, et comptait sur le respect des "principes de l'Etat de droit", soulignant qu'il en allait de l'intégration de la Russie à l'économie internationale et de l'avenir des investissements étrangers dans ce pays.