Dans le cadre du prochain Salon de l'optique, organisé par RH. International communication, qui se tiendra à Alger - Riadh El-Feth - du 27 au 30 octobre sous le patronage du ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, le Dr Chabane évoque les grandes lignes qui caractérisent l'évolution de l'optique en Algérie. Liberté : La 4e édition du Salon international de l'optique et de la lunetterie se déroulera du 27 au 30 octobre à Alger. Quelles sont vos expectatives par rapport à cet événement ? Dr Chabane : C'est une opportunité réelle de regroupement des professionnels du secteur de l'optique ophtalmique, qui pourront se concerter dans la convivialité sur les questions liées à l'état de ce secteur. Mes attentes sont multiples : faire de cet événement un tremplin pour mieux avancer, établir non seulement un état des lieux mais un véritable arsenal de propositions pour développer ce secteur sensible lié à la santé visuelle de nos concitoyens et surtout s'organiser pour agir ensemble avec tous ceux qui sont concernés par cette problématique. Et sur ce plan, nous sommes optimistes. La formation dans ce secteur, où en est-on ? La première observation est que le ratio des pays développés est d'un opticien pour sept mille habitants. Nous sommes aujourd'hui à moins de un opticien pour trente et un mille habitants. À titre d'exemple, en France, où il y a un surplus d'opticiens, on avoisine un opticien pour quatre mille habitants. Il reste à former quelque quatre mille opticiens. La seconde observation est qu'aujourd'hui les problèmes de l'organe oculaire sont relativement bien pris en charge. Mais qu'est-ce que l'œil sans la vision ? Les problèmes de la fonction visuelle sont insuffisamment pris en charge. Cela est dû fondamentalement au recul enregistré dans le développement du profil optométriste. La troisième observation, liée directement à la formation, est que l'Algérie, en 1972, s'était dotée d'un socle juridico-administratif qui a permis l'émergence d'un département d'optométrie à l'université d'Oran. Les activités de l'optométriste ont été définies dans le décret 77-45 du 19 février 1977 portant statut particulier de l'optométriste. Il serait fort intéressant, après plus de 18 ans d'existence, que cette initiative formatrice et structurante reprenne du service. Il faut, par ailleurs, savoir que la loi 99-05, portant orientation de l'enseignement supérieur, a permis la création et l'agrément d'un établissement privé de formation supérieure en optométrie, lequel a permis la formation d'un certain nombre d'optométristes. Vers le début des années 2000, la formation paramédicale privée, sous la tutelle du MSPRH, a pris en charge la formation d'opticiens lunetiers. Presque sept opticiens, avec les deux profils brevetés et diplômés d'Etat, ont été formés. Aujourd'hui, qui prend en charge les problèmes visuels en Algérie ? Il existe deux modèles dans la prise en charge des problèmes visuels. Le premier est le modèle anglo-saxon de comanagement, par l'ophtalmologiste et l'optométriste, des problèmes oculo-visuels. Ce modèle est adopté de plus en plus par les pays développés et les pays émergents. Il est efficient, rationnel. Orienté pour le dépistage, il permet de réduire les coûts et dépenses liés à la santé oculo-visuelle. Il s'appuie aussi sur le profil de l'orthoptiste pour la prise en charge des problèmes de la vision binoculaire et de la basse vision. Le second modèle, presque spécifique à la France et aux pays s'inspirant des systèmes de santé français, concentre tous les actes oculo-visuels à l'ophtalmologiste et exclut les optométristes. C'est un modèle appelé à disparaître parce qu'il manque d'efficience. Il est coûteux et ne répond pas aux exigences de soins visuels. En Algérie, l'expérience de la cogestion des problèmes oculo-visuels, notamment dans les années 1980-1990 dans la région ouest du pays, a montré son efficacité. Malgré l'existence d'un bilan positif de l'apport de l'optométrie dans les soins visuels, l'absence d'une vision stratégique crée le besoin de continuer à mimer le modèle français. En tant qu'expert en formation en sciences de la vision, que proposez-vous ? ll L'OMS, dans le cadre d'un programme appelé 2020, a interpellé tous les Etats à œuvrer pour éviter les cécités évitables. Or, cette démarche exige la mise en place d'un système de dépistage oculo-visuel. Ce système de veille est à même de détecter précocement toute déficience oculo-visuelle. Dans les pays où l'optométriste est un praticien de première ligne, la prise en charge de ces déficiences se fait précocement, ce qui permet de réduire le coût socioéconomique des déficiences pouvant engendrer un handicap visuel total ou partiel. À titre d'exemple, en Grande-Bretagne, 90% des glaucomes sont dépistés par les optométristes. Il me paraît très logique de proposer donc la relance de la formation en optométrie. Quel que soit l'environnement, étatique ou privé, le plus important est le contenu du programme de formation qui doit s'inspirer de ceux des pays où l'optométrie est bien établie. L'architecture LMD peut permettre de fournir des opticiens lunetiers de niveau licence, des optométristes de niveau mastère et des enseignements de niveau PHD. L'organisation des assises des professions de la vision, sous l'égide du MSPRH, serait une excellente chose. Elles travailleraient éventuellement sur des recommandations stratégiques en vue de prendre en charge les problèmes de santé oculo-visuelle, et sur cette question nous y croyons, parce que le ministère est sensible à cette question. R. N. mecipsa 22-10-2011 19:08