Depuis l'instauration du crédit automobile, le marché de la pièce détachée a connu un boum sans précédent. Au quartier des Castors d'Oran, les magasins de la pièce détachée poussent comme des champignons. Cependant, la contrefaçon, la falsification et l'anarchie dans les prix font la loi face à un client impuissant. En effet, une immersion dans ce marché juteux a permis de constater quelques facettes de ce secteur qui nuisent énormément à la sécurité routière et aux caisses de l'état. Des préjudices financiers de plusieurs milliards pour les recettes fiscales sont recensés. “La plupart des commerçants ne délivrent pas de factures. Quant aux prix, c'est l'anarchie totale !”, déclare un client rencontré au marché de la pièce dans le quartier des Castors. Effectivement, les prix de la même pièce varient d'un magasin à un autre. “Bien sûr qu'il y a une grande différence entre la pièce contrefaite et celle d'origine. Il y en a de toutes les nationalités. L'importation de la pièce est la plus dynamique ces dernières années. Mais nous faisons des rabais à nos clients”, affirme un jeune commerçant. À titre d'exemple, “pour réparer le tuyau d'échappement de ma voiture de marque Kia, il a fallu trois pièces détachées de trois nationalités différentes : coréenne (silencieux d'origine), algérienne (tube d'une R4) et chinoise (partie collecteur contrefaite)”, explique un client, soit 11 000 DA déboursés pour un simple tuyau d'échappement. L'absence totale des contrôleurs des prix a mis, de facto, hors circuit les pouvoirs publics. Mais le plus inquiétant est l'utilisation des pièces contrefaites de très mauvaise qualité qui risquent de provoquer des accidents de la circulation meurtriers. “Oui, c'est vrai ! Des plaquettes de frein fabriquées avec de l'herbe séchée et compactée. Vous les trouvez souvent dans les souks de la pièce. Ceux qui vendent ces pièces sont des criminels et non des importateurs”, avoue un chauffeur de taxi. Cependant, les pièces des voitures de luxe sont rares et chères. “Celui qui possède une Mercedes a les moyens de mettre le prix”, renchérit un revendeur. Quant à la pièce de rechange des anciennes voitures, les clients se rabattent surtout sur les magasins de pièces détachées usées ou se dirigent vers le grand marché de la “casse” de Chteibo, dans la commune de Sidi Chahmi. “Les prix sont faits à la tête du client. Il n'y a aucune norme de vente. C'est la jungle !” fait savoir un mécanicien. Côté clients, ceux rencontrés sont unanimes à dire que le marché de la pièce de rechange est livré à lui-même, sans aucun contrôle. Le ou les associations des consommateurs semblent absentes face à des importateurs puissants qui tirent les ficelles de ce commerce. NOUREDDINE BENABBOU