Deuxième grand marché sur le continent après l'Afrique du Sud, le créneau de la pièce détachée en Algérie est en proie à une fulgurante poussée de la contrefaçon aux conséquences dramatiques sur les usagers des véhicules. Les pièces de rechange automobiles, plus communément appelées «pièces détachées», sont en tête des produits contrefaits commercialisés sur le marché algérien, après les produits cosmétiques. Malgré une batterie de lois mise en place par le législateur, la lutte contre la commercialisation de ce type de pièces, dont le danger n'est plus à démontrer, piétine, reste difficile et complexe de l'aveu même de certains responsables du ministère du Commerce. Au courant du premier trimestre de cette année, plus de 86 tonnes de pièces détachées ont été saisies au port d'Oran par les services de la direction du commerce. Les motifs de saisie ont été l'absence de la marque et le défaut d'étiquetage. Il s'agissait de fausses pièces détachées qui peuvent porter atteinte à la sécurité de leurs utilisateurs. Le phénomène de la contrefaçon des pièces détachées a trouvé, à la faveur de l'ouverture anarchique du marché algérien, un environnement propice à son développement. Bien que le gouvernement ait fait part de la ferme détermination de l'Etat à frapper d'une main de fer ceux qui veulent faire du marché national un dépotoir, la difficulté de la tâche tendant à éradiquer ce trafic dangereux, mais juteux, a été reconnue, surtout que la sous-facturation des pièces contrefaites reste un puissant argument de vente qui pose un vrai problème aux autorités algériennes. Le plus gros volume de ces pièces de rechange est fabriqué en Chine et importé à partir de pays européens par des opérateurs économiques locaux. Auparavant, le ministre du Commerce avait averti tous les importateurs de ce type de pièces de rechange, à l'origine de dramatiques accidents de la circulation, que leur marchandise, conformément à la nouvelle législation, sera purement et simplement détruite, alors que dans le passé ces pièces étaient revendues aux enchères une fois saisies par la douane. Pour rappel, la législation algérienne met désormais fin à une aberration concernant ces saisies. En effet, la marchandise saisie par les services des douanes était jusqu'ici revendue aux enchères, malgré les risques d'accidents possibles que cette pratique générait. Elle sera désormais détruite, en vertu de la nouvelle règlementation. Les spécialistes sont unanimes, ils considèrent que près de 60% de la pièce de rechange commercialisée en Algérie sont contrefaits. En dehors des accessoires, certaines pièces, telles que les freins et les amortisseurs, peuvent provoquer des accidents mortels. Les études sur les causes des accidents de la circulation révèlent que 20% de ces accidents sont dus à la contrefaçon des pièces de rechange. D'autres pièces dites de friction (plaquettes de freins, disques d'embrayage, mâchoires de freins...) peuvent être cancérigènes, car certaines sont fabriquées à partir d'amiante. Au quartier «Ezraa» non loin des Castors, artère commerçante sur la périphérie sud d'Oran, incontestable de la pièce détachée, tout se vend ou presque. Carrosseries, mécanismes d'embrayage, essuie-glaces, plaquettes de freins, alternateurs, démarreurs, filtres à huile, optiques de phare... «Mais attention, rien n'échappe à la contrefaçon», avertit un automobiliste. Taïwan ou pièce d'origine ? Nul ne peut être sûr, bien que l'emballage des pièces porte effectivement l'estampille du nom d'une marque connue. «Mais comment être sûr que la griffe est bel et bien authentique ?», demande le client. Pour le commun des usagers, il est impossible, en effet, de savoir si la pièce est contrefaite ou non. L'appât du plus bas prix fait souvent basculer la décision des clients. A «Ezraa» comme partout ailleurs en Algérie, les produits contrefaits coûtent en général jusqu'à 30% moins cher. Dans un pays où le parc roulant est vieillissant et dont plus de 99% des pièces de rechange commercialisées sont importées, les fausses pièces détachées de voiture font des ravages sur les routes. Le «made in China» reste plus que jamais le plus répandu. Des milliers de commerçants vivent de ce commerce. Grandes victimes de produits contrefaits venus des usines pirates d'Asie, qui produisent chaque année des centaines de milliers de tonnes de fausses pièces, flouant les consommateurs. Les fausses pièces détachées de voitures sont de véritables copies bon marché. La disponibilité du «Taïwan» un peu partout dans les points de vente et la difficulté de différencier entre l'original et la contrefaçon ont grandement favorisé l'émergence d'un commerce parallèle de la pièce détachée.