Le cinéaste qui a présenté, avant-hier, son long-métrage Kef el Qamar, dans le cadre de la compétition du 5e Fofa, revient dans cet entretien sur les thématiques qui se dégagent de son film. Liberté : Vous avez qualifié votre film, Kef el Qamar qui relate le destin de cinq frères partis vers la grande ville, et qui vivent sous la protection (et même l'autorité) de l'aîné, de visionnaire. Dans quel sens ? Khaled Youssef : Ce film que j'ai tourné en novembre 2010 a été qualifié de visionnaire par certains critiques. Il porte, peut-être, en lui-même, les revendications de la révolution du 25 janvier, mais le propos de mon film tourne autour de la question du déchirement et de l'union entre les différentes couches sociales. Toutefois, le cinéma n'a pas pour rôle de décrire la réalité. C'est un regard et une position par rapport à la réalité. Le cinéma arabe actuellement filme l'actualité sans la commenter ni la nuancer. Peut-on considérer ce travail de l'urgence comme étant artistique ? Il m'apparaît impossible de faire un film sans avoir le recul nécessaire. L'art demande du temps et du recul. Et il est également difficile de dire que les films qui anticipent sur les évènements sont empreints de maturité. Votre film est optimiste, notamment à la fin. Ne trouvez-vous pas cette démarche comme étant en déphasage avec la réalité ? Il y a certes ce côté optimiste, mais mon film traite des liens fraternels et de la reconstruction. Dans mes précédents films, j'avais traité de la violence et de ce qu'elle génère comme tragédie, notamment auprès des couches sociales marginalisés. Le drame engendre la violence. Dans Kef El Qamar, ce n'était pas vraiment le propos du film. Vous avez travaillé avec Youssef Chahine et son empreinte est perceptible dans votre œuvre. N'avez-vous pas envie de passer à autre chose ? Son influence est indélébile. C'est lui qui m'a appris le cinéma. Je ne cherche pas à l'imiter mais avec lui, j'ai appris le respect de l'art et la passion d'un cinéma. Quel commentaire faites-vous sur la situation actuelle de votre pays ? l Chaque révolution à ses paris. Quant à la montée des mouvements islamistes, il me semble qu'ils n'ont pas un projet de société sur le long terme. Le peuple découvrira cela, tôt ou tard et cessera de les soutenir. S. K.