Le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, a affirmé hier qu'il n'y avait “personne à qui parler” au sein de l'opposition, au moment où le pays est confronté à un mouvement de contestation sans précédent depuis son arrivée au sommet du pouvoir en 2000. L'opposition, qui a organisé la manifestation ayant rassemblé 70 000 à 100 000 personnes le 24 décembre à Moscou, n'a “pas de programme commun et il n'y a là personne à qui parler”, a déclaré M. Poutine, cité par les agences russes. Interrogé par des journalistes qui lui demandaient avec quel interlocuteur il pourrait dialoguer parmi les opposants qui ont participé aux manifestations des 10 et 24 décembre à Moscou, M. Poutine a ajouté : “Ecoutez, je ne sais même pas qui était là-bas.” Mardi, M. Poutine avait minimisé l'importance de ce mouvement de contestation et opposé une fin de non-recevoir aux appels de l'opposition à annuler les résultats des législatives controversées du 4 décembre. Le Premier ministre, candidat à la présidentielle de mars, avait déjà dénigré à plusieurs reprises les opposants, les accusant notamment d'être à la solde des Occidentaux et les comparant à la tribu de singes du Livre de la Jungle. Par ailleurs, Vladislav Sourkov, qui a été nommé mardi vice-Premier ministre après avoir œuvré dans l'ombre des murailles du Kremlin pendant 12 ans, est considéré comme l'éminence grise du pouvoir russe et est, à ce titre, l'une des figures les plus détestées par l'opposition. Sa nomination au gouvernement en charge de l'innovation et de la modernisation de la Russie place sur le devant de la scène cet homme de 47 ans à l'allure juvénile qui avait été pendant dix ans largement à l'abri des projecteurs en tant chef-adjoint de l'administration du Kremlin. Cette discrétion ne l'a pas empêché d'être désigné par l'opposition russe comme le mauvais génie et inventeur d'un système politique au service de l'homme fort du pays Vladimir Poutine. Ses détracteurs ont même créé un adjectif sur la base de son nom pour décrire la ligne éditoriale des télévisions russes : “La propagande sourkovienne”. Fin stratège au cœur du pouvoir russe depuis douze ans, médias et experts lui prêtent une influence parfois décrite comme quasi machiavélique sur la scène politique russe. “C'est un marionnettiste, il a privatisé le système politique, fait pression sur les médias et désinforme la direction du pays”, a dit de lui le milliardaire Mikhaïl Prokhorov, qui a été brutalement écarté des législatives de décembre mais se présente à la présidentielle de mars 2012. Vladislav Sourkov n'a pour sa part jamais caché son admiration et son dévouement pour l'homme fort du pays. “Je pense que Poutine est un homme que Dieu et le destin ont envoyé à la Russie lorsqu'elle traversait une période difficile”, déclarait-il en juillet. Arrivé au Kremlin dans les derniers mois de la présidence de Boris Eltsine en 1999, soit au moment où Vladimir Poutine, alors chef du FSB (service fédéral de sécurité), accédait au poste de Premier ministre, Vladislav Sourkov n'a fait qu'accroître son influence lorsque celui-ci est devenu président au début 2000. Durant ces années de reprise en main de la Russie par l'ex-agent du KGB, il est nommé chef-adjoint de l'administration présidentielle. Il est l'auteur des concepts de “démocratie dirigée”, ou “démocratie souveraine”, invoqués pour justifier la voie particulière adoptée par le Kremlin dans ce domaine. Il est aussi largement considéré comme l'architecte du parti de Vladimir Poutine, Russie unie, qui quadrille toutes les institutions politiques et administratives russes, et du mouvement de jeunesse Nachi, chargé de mobiliser les foules lorsqu'il faut manifester en masse un soutien au pouvoir. R. I./Agences