Malgré les assurances des autorités locales, notamment la cellule de crise présidée par le wali pour faire face à la situation qui prévaut suite aux intempéries, la situation n'est pas reluisante. Les citoyens des différentes localités dénoncent le laxisme des autorités dans la prise en charge de la pénurie des produits de première nécessité, notamment le gaz butane et le lait. Des régions entières sont restées durant près de cinq jours coupées du reste du monde. En plus des coupures d'électricité, du manque de gaz, des routes bloquées, s'ajoute le manque des denrées alimentaires. Dès l'ouverture des routes, c'est la ruée vers les centres urbains pour s'approvisionner. Les magasins ont été pris d'assaut. Les spéculateurs ont trouvé leurs comptes Des bonbonnes de gaz vendues à 200 DA sont cédées dans des régions isolées au triple de leur prix. Au niveau des stations de Naftal, des queues interminables. Les personnes passent plus de 8 heures d'attente pour avoir le gaz butane. Jeudi, des centaines de personnes avaient fermé la RN5 traversant la ville de Bouira à proximité de deux stations de Naftal. Ils ont exigé le ravitaillement du point de vente. Ce n'est qu'après l'intervention de la police que la voie a été dégagée. En fin de journée, ils sont revenus à la charge. Devant le centre enfûtage de Sidi-Khaled, des milliers de citoyens venus des différentes régions de la wilaya de Bouira et celles limitrophes notamment ceux de la wilaya de Médéa dans l'espoir de se procurer une bonbonne. Les aviculteurs de leur côté n'ont pas caché leur désarroi. “Tout notre labeur est en danger”, explique un éleveur. Las d'attendre et de voir leur production en faillite, ou voir leur progéniture en détresse, ils avaient assailli les camions de transport de gaz butane et se sont servis. Face à cette situation, les transporteurs avaient refusé de sortir de l'unité de production qu'en présence d'escorte par les services de sécurité. Cet acte avait retardé l'acheminement vers les stations et accentué davantage la pénurie. Durant la nuit du jeudi à vendredi, plusieurs personnes ont passé la nuit devant la station Naftal de la ville de Bouira. Rencontré sur les lieux, Mohamed une vingtaine d'années enveloppé dans sa kachabia, témoigne : “Je suis ici depuis hier (jeudi) dans l'espoir d'avoir deux bonbonnes de gaz. J'ai passé la nuit sous le froid glacial car à chaque fois, on nous dit qu'il y a un camion qui arrive. Il est maintenant 11h (vendredi) mais on ne voit rien arriver. Chez moi, il me reste qu'une seule pour préparer à manger.” Son voisin qui a passé la nuit en sa compagnie ajoute : “Chez moi, on s'est rabattu sur le bois pour préparer à manger”. Un autre citoyen de Krarib (Kadiria) nous déclare qu'il fait le va-et-vient, sans résultat, et ce depuis quatre jours. “En Europe, cette crise de manque de gaz n'est pas connue sauf chez nous car nous sommes un pays producteur de gaz”. Pour le lait, c'est la même situation. Dans la plupart des commerces, les étalages sont vides. “On ne voit que les caisses vides devant les magasins”, ironise un citoyen. Des altercations ont été enregistrées entre clients dans un magasin à la cité 1100-Logements de Bouira pour avoir un sachet de lait. Son magasin a été même pillé. À l'heure où nous mettons sous presse, des queues interminables en attente de gaz au niveau des stations de Naftal, le lait est aussi introuvable. Pour les fruits et légumes, les prix ont flambé. Des citoyens de la commune de Thénia ont fermé hier la RN5 pour exiger des bouteilles de gaz butane. Les citoyens issus des villages de Talamali et Boukhenfer, situés sur les hauteurs de la ville de Thénia, se sont déployés vers 14h30 sur le principal axe routier reliant l'est et le centre du pays pour déposer sur la chaussée, à l'entrée de la ville, des blocs de pierre et des troncs d'arbre bloquant ainsi la circulation dans les deux sens. De nombreux automobilistes ont été pris au piège et des ambulances transportant des malades qui s'apprêtaient à joindre l'hôpital se sont trouvées bloquées à Tidjellabine. Les protestataires ont manifesté leur colère contre la non-disponibilité des bonbonnes de gaz au niveau des principaux dépôts de Thénia mais aussi contre les coupures d'électricité dont sont victimes les habitants de ces villages. Les gendarmes et la police ont été dépêchés sur les lieux mais à l'heure où nous mettons sous presse, la route est toujours bloquée. A. DEBBACHE et M. T.