Des syndicats du secteur de l'éducation nationale tirent la sonnette d'alarme et interpellent la tutelle car cette situation engendrerait un énorme retard dans les programmes scolaires. Certains pensent d'ores et déjà qu'il faudrait sacrifier les vacances de printemps, mais d'autres se déclarent contre cette solution de facilité. D'aucuns n'ignorent que les conditions météorologiques extrêmes, qui affectent tout le territoire national depuis déjà deux semaines, ont eu des répercussions négatives sur le quotidien des familles. D'autant que ces dernières années, le pays s'est quelque peu habitué à des saisons hivernales loin d'être aussi rudes que ces dernières semaines. Cependant, s'il est connu que la mercuriale monte au fil des averses, il n'a jamais été de coutume que les établissements scolaires se vident de leurs élèves qui y grelottent de froid ! Les salles de classe, notamment celles des écoles primaires, n'ont jamais été équipées de chauffage. Nombreuses sont les APC chargées de faire le nécessaire pour éviter aux écoliers d'étudier dans des salles froides, qui ne se sont jamais acquittées de cette mission à laquelle une enveloppe spéciale est pourtant allouée. Craignant pour la santé de leur progéniture, nombreux sont les parents qui ont préféré garder leurs enfants au chaud que de les envoyer au “frigo” scolaire. SNTE : Pas de chauffage, point de cours et énorme retard ! Selon le secrétaire national du Syndicat national des travailleurs de l'éducation (SNTE), “des statistiques fiables sur le nombre d'écoles fermées ou d'élèves absents ne sont pas disponibles, mais l'on peut dire que pas moins de 50% des élèves ne vont plus à l'école depuis les derniers changements climatiques en raison de l'absence de chauffage dans leurs salles de classe. Alors que le premier déblayage n'est pas fini que d'autres chutes de neige et averses sont annoncées”. Ce qui voudrait dire que les vacances “météorologiques” risquent de se prolonger encore. Selon Hakim Aït Hamouda, “le manque de transport scolaire contraint également les élèves dont les établissements, notamment les lycées et les collèges, sont éloignés à rester à la maison”. Cette situation inédite aboutira inévitablement, selon le même interlocuteur, à un énorme problème de retard dans les programmes scolaires. Comment va-t-on rattraper les cours non dispensés pendant ces longues semaines ? s'interroge Aït Hamouda. Et de répondre : “La première solution de facilité serait de sacrifier une semaine des prochaines vacances scolaires du printemps, notamment pour les classes d'examen.” Mais le SNTE ne partage pas cette option qui ne ferait que stresser et perturber davantage les élèves. La solution ? Elle réside, selon le chargé de communication du SNTE, “dans le prolongement de l'année scolaire pour permettre aux élèves de reprendre les cours après les trois examens ou de reporter les examens scolaires des trois cycles”. SNAPEST : où va l'argent destiné à l'achat des chauffages ? Pour le premier responsable du Snapest, “certains parents préfèrent effectivement laisser leurs enfants qui grelottent de froid au chaud que de les envoyer dans des salles dépourvues de chauffage pour éviter qu'ils ne deviennent asthmatiques”. Meziane Meriane rappellera que son syndicat a longtemps tiré la sonnette d'alarme sur l'équipement des écoles en chauffage. “Nous avons demandé à la tutelle d'envoyer des commissions d'enquête car des enveloppes colossales sont allouées spécialement pour l'achat de chauffage mais les écoles en sont dépourvues”. Et de poursuivre : “Pour ce qui des écoles primaires, ce sont les APC qui doivent assurer cette mission, mais leur gestion laisse à désirer et l'argent prend d'autres directions. Et cela dure depuis des années.” Résultat : l'élève grelotte de froid et ne peut, par conséquent, enlever son manteau en classe, ce qui ne le met pas à l'aise. Certaines écoles ne peuvent même pas profiter du gaz de ville, faute de compteur que Sonelgaz tarde à brancher. Pour Meziane Meriane, “le même problème se pose pour la restauration des élèves, notamment pendant cette période de froid où ils doivent bien manger puisque la nourriture est un élément essentiel contre le froid. Mais il y a ceux qui profitent de la situation pour des détournements”. Selon le premier responsable du Snapest, le retard engendré par “l'école buissonnière forcée” ne pourrait pas être rattrapé facilement. “Ce sera très difficile, surtout qu'avec la formule du seuil des programmes, les élèves savent que seuls les cours dispensés seront concernés par les sujets d'examen, notamment celui du baccalauréat”. CNAPEST : Le voile est tombé sur le discours officiel ! Le chargé de communication du Cnapest dira d'emblée que “la sonnette d'alarme a été tirée à maintes reprises sur l'absence de chauffage dans les écoles”. Pour Messaoud Boudiba, “les conditions météorologiques ont finalement démenti le discours et les statistiques officielles faisant état de l'équipement de tous les établissements scolaires en chauffage”. Et de poursuivre : “Nous n'avions pas les moyens de vérifier ces déclarations, mais le voile est tombé enfin sur une situation catastrophique ! Même dans la capitale et les grandes wilayas, des élèves ont déserté les bancs de l'école pour rester au chaud.” Le comble est que quand la classe est équipée de chauffage, c'est le gasoil qui fait défaut. Plus grave encore, “ce n'est pas l'argent qui fait défaut puisque le budget existe. Et c'est ce que nous n'avons pas compris !” Evoquant le retard des cours, notre interlocuteur dira qu'il est déjà de trois semaines au niveau de certaines régions en raison de quelques grèves. Comment le rattraper ? “Probablement par l'annulation des vacances de printemps mais les élèves, qui ont découvert l'arme de la pression, vont-ils accepter ? De toutes les façons, même cette solution ne permettrait pas de rattraper le déficit.” UNPEF : la tutelle doit trouver des solutions N'allant pas vraiment au fond des choses, le chargé de communication de l'Unpef se contentera de confirmer que “même dans les grandes villes, des élèves ne vont pas en classe en raison du froid et de l'absence de chauffage. Et ceci ne manquera pas d'avoir des répercussions sur leur rendement et sur l'achèvement du programme scolaire”. Selon Amraoui, “les élèves des écoles primaires en souffrent plus car les APC qui gèrent ce volet sont déficitaires et ne peuvent pas se permettre de nouveaux équipements”. Question : mais une enveloppe est allouée rien que pour la dotation des écoles en chauffage. Où va-t-elle ? L'Unpef “ne se mêle pas”. Pour ce qui est du retard, des solutions urgentes doivent être proposées par la tutelle. Ecourter la période des prochaines vacances du printemps est l'option envisagée par notre interlocuteur. Il propose aussi le recours à la formule du seuil des programmes “qui sera justifiée pour cette fois-ci au moins”, ironise Messaoud Amraoui. Que peut-on espérer finalement d'un système éducatif que même les humeurs de Dame Nature affectent sensiblement pour des raisons évitables ? M B