Révolte contre la réforme du Conseil français du culte musulman (CFCM), pilotée par le ministère de l'Intérieur, avec la collaboration de la Grande-mosquée de Paris (Algérie) et le Rassemblement des musulmans de France (Maroc). “À ce jour, n'ayant toujours pas pris connaissance des termes de cet accord, et ce, malgré nos demandes insistantes et répétées auprès du président du CFCM, nous sommes tous aussi consternés de constater qu'une AGE – assemblée générale extraordinaire – sera convoquée pour le 18 mars, en vue d'entériner les modifications des statuts de notre institution”, déplorent huit figures de l'islam de France, dont l'Algérien Kamal Kabtane, recteur de la mosquée de Lyon. “Nous déplorons et condamnons vivement cette manière de procéder et le mépris à l'égard des membres du bureau exécutif et du conseil d'administration, élus pour le mandat actuel (2011-2014)”, dénoncent les signataires dans un communiqué parvenu à Liberté. “Après neuf ans de fonctionnement, nul ne peut contester qu'un toilettage des statuts du CFCM était plus que nécessaire. cependant, une telle réflexion ne peut se faire dans une telle précipitation, d'autant que nos espoirs étaient que cette réforme puisse, à cette étape importante de notre instance, élargir la réflexion à tous les acteurs de notre communauté, qui auraient su saisir cette chance d'œuvrer pour un véritable islam de France”, ajoutent-ils. “Des défis majeurs attendent le culte musulman dans notre pays ; nous ne pourrons les relever que si l'instance représentative est forte et crédible”, notent encore les séditieux. Les deux principales fédérations musulmanes de France ont signé, le 16 février, un premier accord pour réformer une institution créée en 2003, mais qui n'a jamais réussi à surmonter ses divisions. Le RMF dont est issu Mohammed Moussaoui, président du CFCM, et la Grande-mosquée de Paris prévoient une direction collégiale, avec un changement de président tous les 18 mois, pour que toutes les fédérations soient représentées. M. Moussaoui assure depuis juin un second mandat électif. Il a succédé à Dalil Boubakeur qui a également effectué deux mandats de président par voie de cooptation car il n'avait pas de chance d'être élu. Depuis, il a d'ailleurs boycotté les consultations électorales. La nouvelle réforme lui permet d'exercer de nouveau la fonction de président du CFCM. “Il roule pour ses propres intérêts”, accuse un de ses contempteurs. Sans être contre la réforme, certaines voix au sein du CFCM militent pour l'émergence de nouvelles figures. Elles veulent interdire l'exercice de plus de deux mandats à la présidence. Cette disposition a peu de chances d'être adoptée. Elle permettrait de mettre hors jeu Dalil Boubakeur et Mohammed Moussaoui. La réforme, qui doit être acceptée par tous les membres du CFCM, ne pourra être validée qu'une fois votée en assemblée générale. Proche des Frères musulmans, l'Union des organisations islamiques de France (UOIF) ne participe toujours pas aux discussions. “On voulait une réforme, mais en dehors du cadre du CFCM”, s'indigne Amar Lasfar, le vice-président de l'UOIF. Les divisions paraissent insurmontables dans cette assemblée de notables qui n'intéresse que les autorités. Y S.