“Je considère que la participation à ces élections est une nécessité tactique pour le FFS qui s'inscrit en droit ligne de notre stratégie de construction pacifique de l'alternative démocratique à ce régime despotique, destructeur et corrompu”, a écrit Aït Ahmed dans une lettre aux membres du conseil national. Les rencontres organisées au niveau de la base n'auront visiblement servi qu'à “vendre” aux militants une option décidée “depuis un temps” par le président du parti, Hocine Aït Ahmed. Sans grande surprise, donc, malgré un faux suspense entretenu à dessein, le Front des forces socialistes (FFS) a décidé de prendre part aux élections législatives, prévues le 10 mai prochain. Cette décision a été entérinée, hier, à une écrasante majorité, lors du conseil national du parti, réuni en session extraordinaire, à Alger. Dans une lettre lue à l'ouverture des travaux, le président charismatique du parti, Hocine Aït Ahmed, qui souligne, dès l'entame de la missive, que “son opinion concernant cette élection est faite depuis un certain temps”, justifie la participation par une “nécessité tactique”. “Je considère que la participation à ces élections est une nécessité tactique pour le FFS qui s'inscrit en droite ligne de notre stratégie de construction pacifique de l'alternative démocratique à ce régime despotique, destructeur et corrompu.” Instruit sans doute sur les appréhensions qui ne manqueront pas de s'exprimer autour de cette décision, d'autant que les garanties de transparence du scrutin avancées par le régime ont du mal à passer auprès de la base, Aït Ahmed rassure : “Je sais, nombre d'entre vous craignez la puissante attractivité de la mangeoire du régime. Ceux-là, je les comprends, je partage leur souci et je les rassure : nous pouvons, nous devons et nous allons nous donner les moyens du contrôle de notre participation. Cette participation a tiré les enseignements de nos lacunes de 1997 et nous allons tout mettre en œuvre pour les combler.” Aït Ahmed ne précise pas la nature de ces moyens. Ni l'exigence d'un gouvernement neutre ni la présence d'observateurs, encore moins la révision du fichier électoral ne sont, pour l'heure, réclamées. En tout cas, aux yeux du plus vieux parti de l'opposition, la participation ne procède pas de la course aux strapontins. “D'abord parce que notre but ne réside pas dans un quota de sièges à atteindre. Notre but est dans la remobilisation politique et pacifique de notre parti et de notre peuple. C'est là l'essentiel de notre décision. Remettre du mouvement dans le statu quo”, écrit Aït Ahmed. Cette remobilisation est d'autant plus impérieuse, suggère l'homme historique, notamment en raison de l'impasse dans laquelle le pouvoir a engagé le pays. “Le pouvoir a conduit le pays dans une impasse. Une triple impasse : celle du pouvoir, celle du pays et celle de la Kabylie. Le démantèlement du politique partout dans le pays a particulièrement ciblé la Kabylie parce qu'elle a, pendant des décennies, constitué le réservoir de mobilisation démocratique et de contestation politique du pays. Ces vingt dernières années ont constitué une régression phénoménale dans tous les domaines à l'échelle nationale. Le renforcement du régime s'est fait dans le sillage du démantèlement des structures de l'Etat partout à travers le pays. En Kabylie, c'est également au démantèlement d'une organisation et d'un engagement politique de la population qu'il a été procédé. Car ces derniers s'étaient maintenus dans la région contre vents et marées. Je vous ai longuement décrit ce processus machiavélique dans ma note sur les archs”, rappelle Aït Ahmed. Affirmant ne rien “apprendre du pouvoir” et n'ignorant rien de “sa démarche et de ses entraves”, Aït Ahmed lance aussi une volée de bois vert à l'endroit des traîtres des causes qu'il n'identifie pas pour autant. “C'est en toute sérénité que le parti doit aborder cette étape de son parcours, et dans le respect de tous ceux qui, hors du parti, défendront de manière respectable d'autres visions que la nôtre, mais il est exclu que quiconque nous donne des leçons en politique, en démocratie, en militantisme, en patriotisme ou en takbaylit”, affirme Aït Ahmed. “Nous n'avons aucune leçon à recevoir, ni de ceux qui veulent nous apprendre comment défendre notre parcours —qu'ils n'ont pas — ni de ceux pour qui l'engagement ne fut qu'une alternance de trahisons. Trahir une cause puis une autre avec l'irresponsabilité politique, l'outrance verbale et le mensonge comme seules constantes. Nous avons appris, dans la pratique des êtres, à identifier et choisir ceux qui nous agréent comme camarades, comme frères et comme amis et ceux qui ne nous agréent à aucun de ces titres, mais que nous supportons car ils sont, malgré tout, des compatriotes”, ajoute-t-il encore. K.K.